Le dernier livre de l’ancien député et ancien maire socialiste de Sarcelles, François Pupponi, La Gauche en perdition (Paris, éditions du Cerf, 2023), est un réquisitoire implacable contre les dérives d’une gauche biberonnée aux idéologies collectivistes de notre temps (wokisme, indigénisme, décolonialisme, néoféminisme, écolologisme radical, etc.). La gauche actuelle, écrit-il avec raison, n’est plus la gauche : au lieu de défendre comme elle avait pu le faire par le passé la liberté et les libertés, la laïcité, l’instruction, l’universalisme, elle ne jure plus aujourd’hui que par un néocollectivisme liberticide assis sur la tyrannie du politiquement correct, la mise au pas idéologique des récalcitrants, et, parfois aussi, le recours à la violence.
Se référant souvent à l’histoire, François Pupponi multiplie les exemples concourant à montrer cette vérité universelle : l’ultragauche au pouvoir n’a jamais provoqué que des catastrophes, et ce dans tous les domaines. Non seulement les anciens pays communistes ont laissé derrière eux des champs de ruines et des monceaux de cadavres, ils ont aussi provoqué de véritables désastres écologiques : pollution des airs et des sols, contamination des rivières et des plans d’eau (20 km3 d’eaux usées y étaient déversés annuellement, soit vingt fois le lac d’Annecy – p. 83), mort écologique du lac BaÏkal et de la mer d’Aral… Des faits sur lesquels les écologistes radicaux restent étrangement silencieux, probablement pour cette raison que l’écologisme idéologique vise moins à sauver la planète qu’à mettre en accusation le capitalisme libéral, qui reste la bête noire de l’ultragauche. (François Pupponi intitule d’ailleurs un des chapitres du livre : « L’écologisme se soucie moins de la planète que de détruire la civilisation occidentale ».)
Si François Pupponi a raison sur bien des points abordés dans cet essai (ainsi par exemple lorsqu’il rappelle que la croissance économique est foncièrement génératrice de prospérité, n’en déplaise aux actuels propagateurs de fariboles « décroissantistes »), nous pensons pour notre part que la vraie cassure idéologique passe non entre social-démocratie et ultragauche, mais entre libéralisme et collectivisme. De ce point de vue, la social-démocratie n’est jamais qu’un mélange hybride, et donc intrinsèquement contradictoire, de libéralisme et de collectivisme. Voir les sociaux-démocrates reprendre le contrôle de la gauche, actuellement monopolisée par les ultragauchistes, serait certes déjà une bonne chose. Mais ce que l’on peut souhaiter de meilleur à la France, c’est qu’une majorité de nos concitoyens s’aperçoive que les blocages, les injustices, les retards dont souffre notre pays (qui compte aussi, bien sûr, des succès dont il faut se réjouir) dérivent d’un mal qui tient en un seul mot : collectivisme.