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Laurent Fabius tire le bilan de sa présidence du Conseil constitutionnel

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Non, ce n’était ni Austerlitz, ni un coup d’État ! Le 2 décembre, jour de l’élection de Bernard Arnault en son sein, l’Académie des sciences morales et politiques a reçu Laurent Fabius pour une conférence sur « Le Conseil constitutionnel aujourd’hui ».

L’ancien Premier ministre doit quitter la présidence de la Haute juridiction au début du mois de mars, terme de son mandat non reconductible de neuf années (il avait été nommé par l’immense François Hollande). Nous venons de consacrer une pendule à la nomination des trois membres qui aura lieu courant février en vertu de la règle du renouvellement par tiers de l’institution.

Le Président du Conseil constitutionnel est tenu à une stricte obligation de réserve, rappelée par l’orateur lui-même. Laurent Fabius n’en aura pas moins passé quelques messages, transparents pour certains, beaucoup moins pour d’autres, au fil d’une conférence qui a sonné comme un éloge de sa propre action…

Il s’est gaussé de l’accusation traditionnelle selon laquelle le Conseil serait dirigé politiquement : « à droite » lors de la réforme des retraites, « à gauche » lors de la loi sur l’immigration, alors même que la composition de l’organe n’avait pas changé entre temps. Il en a cependant profité pour rappeler que la « préférence nationale systématique » n’était pas permise par le Conseil. Une pierre dans le jardin du Rassemblement national…

Préalablement, il avait dit que la Constitution ne pouvait être révisée sans un accord préalable des deux assemblées parlementaires, autrement dit par la voie de l’article 89 de la Constitution, et non par celle de l’article 11. Une pierre entre autres dans le jardin de La France Insoumise…

Enfin, Laurent Fabius s’est référé en conclusion à l’élection américaine en posant la question de l’absence de « limites juridiques au pouvoir du futur Président ». Une pierre dans le jardin de Donald Trump.

Juste avant, le Président du Conseil s’est attaqué à la « tarte à la crème » du « gouvernement des juges », même s’il n’a pas employé l’expression. Les conseillers, a-t-il demandé en usant de termes d’ailleurs discutables, décideraient-ils « à la place du peuple et contre la Constitution » ? Voici sa réponse : « Le constitutionnalisme ne vaut que par la conscience qu’ont les juges constitutionnels des limites de leur rôle, qui n’est pas de substituer leur appréciation à celle du législateur, mais seulement de s’assurer que la loi ne méconnaît pas la Constitution ». C’est peut-être une manière habile de contrer les arguments des populistes, de droite comme de gauche, mais c’est aussi une manière d’évincer le vrai problème, à savoir celui de l’interprétation. Car, si le Conseil doit s’assurer que la loi respecte la loi suprême qu’est la Constitution, il doit pour cela user des ressources de l’interprétation. Et c’est là justement que l’accusation de politisation est portée.

Laurent Fabius a suggéré quatre réformes, toutes relatives au mode de désignation des juges constitutionnels : supprimer les membres de droit, autrement dit la présence des anciens chefs de l’État (une proposition aujourd’hui très largement partagée par les constitutionnalistes) ; prévoir que toute personne pour être nommée ait une « expérience juridique solide » (c’est bien le moins) ; s’assurer d’un délai de viduité entre la nomination et les éventuelles fonctions de membre du gouvernement ou du Parlement (afin de limiter le risque de la politisation dont on vient de parler) ; enfin, instaurer une parité, même si elle ne peut pas être absolue (il y a neuf membres…), une proposition démagogique qui ravira les féministes.

Au début de son discours, Laurent Fabius a parlé du coût modéré du budget du Conseil constitutionnel, soit environ 14 millions d’euros chaque année. En revanche, il s’est bien gardé de rappeler que les traitements des conseillers (rémunération et avantages) ne respectaient pas la Constitution. Une situation dénoncée depuis plusieurs années par l’Iref.

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8 commentaires

Armand de Montbron 13 décembre 2024 - 8:51 am

Bonjour M. Feldman, pouvez vous préciser les raisons pour lesquelles “…les traitements des conseillers (rémunération et avantages) ne respectent pas la Constitution”

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Feldman Jean-Philippe 13 décembre 2024 - 2:44 pm

Monsieur,
Vous pouvez consulter sur notre site plusieurs articles précis consacrés à ce sujet (rémunérations indues ou rémunérations illégales des membres du Conseil constitutionnel), notamment plusieurs articles de Thierry Benne ou un renvoi à un article signé par votre serviteur et paru dans L’Opinion.
Me Jean-Philippe Feldman

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duriiez 13 décembre 2024 - 9:22 am

Après Fabius qui ne laissera pas un souvenir impérissable, qui pour lui succéder? Encore un politique sur le retour nommé parmi les chouchous du maître des horloges, un de ceux qui avec obstination ont fait carrière en amenant notre pays là où il se trouve aujourd’hui.

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Broussard 13 décembre 2024 - 10:23 am

Qui surprendrais-je avec l’épouvantable souci que je me fais sur l’avenir de ce sire ?
Christian

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Jojo 13 décembre 2024 - 11:55 am

Dans son bilan, parmi les points positifs, il semble qu’il a oublié le bel enrichissement de lui même et sa famille. Rappelons nous l’appartement à 7 millions acquis par son fils qui n’a pas de profession ou talent bien défini.

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DUQUESNE-PINELLI Claudie 13 décembre 2024 - 4:09 pm

Les traitements des membres du Conseil Constitutionnel sont également décriés comme anticonstitutionnels par l’Association CONTRIBUABLES ASSOCIES !!! … Il n’empêche, ces Seigneurs / Saigneurs continuent, allègrement, à s’asseoir sur cet abus de l’argent des Con-tribuables pr leur beau train de vie car … “ils le valent bien” !!!

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Berzud 13 décembre 2024 - 9:08 pm

Tartuffe sort par la grande porte, les poches bien remplies, après s’être assis sur la loi ,en augmentant inconstitutionnellement les indemnités de ses courtisans. Illustration du socialiste pur jus dans toute sa splendeur ! L’hypocrisie à son paroxysme

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AlainD 14 décembre 2024 - 7:18 pm

Laurent Fabius s’est auto absout, pouvait on attendre autre chose ? Aucune juridiction ne semble vouloir mettre de l’ordre dans la rémunération des membres du Conseil. Cela dit, même si l’on supprimait ce supplément indû je me demande si la partie légale ne serait pas déjà exagérée car la tâche de ces messieurs-dames ne me semble pas relever du stakhanovisme…

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