Introduction
La coexistence d’un impôt sur la fortune et d’un impôt sur l’héritage crée les conditions d’une double imposition qui aurait pour vertu d’égaliser la distribution des patrimoines. L’impôt sur l’héritage est l’autre impôt sur la fortune (wealth tax) qui fait débat, avec le même biais de stigmatisation envers les riches. Il s’agit plus précisément d’un impôt sur le transfert de la fortune au moment de la mort du contribuable (taxes on transfers of wealth). L’impôt sur les successions est, pour cette raison, appelé, impôt sur la mort. Il s’agit d’un impôt sur la richesse du défunt. Il combine deux certitudes, le fait que l’homme est mortel et qu’il paie des impôts. La succession imposable est égale à la valeur des actifs détenus par le contribuable au moment du décès, moins les legs au conjoint exonéré, les sommes qui font l’objet d’abattement et d’exonération, les dettes, les contributions à des organismes de bienfaisance, les frais funéraires et le coût de l’administration de la succession.
Il est au cœur d’une importante actualité. De nombreux experts estiment, en effet, qu’il faut repenser la fiscalité de l’héritage. Les économistes de France Stratégie avaient en 2017 proposé une première réforme (France Stratégie 2017[1]). Leur diagnostic était le suivant. Les patrimoines sont détenus par les personnes âgées. Les inégalités de patrimoines sont plus fortes que les inégalités de revenus. Elles trouvent leur origine dans l’héritage. Le patrimoine net d’un agent — la valeur de ses actifs moins ses dettes et les engagements financiers qu’il a contractés — peut être obtenu par héritage ou par accumulation de revenus salariaux et/ou non salariaux. La part de la fortune héritée représente aujourd’hui 60% du patrimoine total contre 35% au début des années 1970 et la part des 1% des fortunes les plus élevées serait passée de 15% en 1985 à 25% en 2015. La principale cause des inégalités de patrimoine serait alors l’héritage. Ces évolutions font craindre le retour des rentiers et d’un ordre social moins méritocratique (Fremeaux 2018[2]). Pour limiter ce risque le rapport propose deux mesures :
- l’une est d’inciter par la loi les propriétaires à transmettre de leurs vivants,
- l’autre de mettre en place un système capable d’assurer à chaque citoyen un patrimoine de départ minimum.
Une note du Conseil d’Analyse Economique confirme ce diagnostic (Dherbécourt et al. 2021[3]) et complète l’une des propositions du rapport sur « les grands défis économiques » des économistes Tirole et Blanchard (2021[4], Chapitre 2). Ce rapport défendait la mise en place d’un régime unifié d’imposition des successions et des donations, imposant l’héritier sur la base d’un taux progressif fonction du montant cumulé reçu (Tirole et al. 2021, p. 226). La note du CAE précitée reprend ce principe. Elle défend une hausse de la progressivité des taux, un système d’imposition des flux successoraux tout au long de la vie et l’idée d’un patrimoine de départ minimum. Il y a en ce sens dans cette note un esprit de synthèse. Le diagnostic diffère cependant un peu, car l’enjeu n’est plus seulement les inégalités, mais le risque de déconsolidation démocratique. A l’origine du populisme il y aurait, d’après ses auteurs, la violation d’une valeur cardinale des sociétés démocratiques : l’égalité des chances. L’inégalité serait la cause des crises de la démocratie contemporaine.
Le principal obstacle que rencontrent néanmoins les experts en ce domaine est l’impopularité de la taxation de l’héritage. En 2018 une enquête constatait que 80% des Français interrogés se déclaraient opposés à la taxation de l’héritage[5]. A cet obstacle s’ajoute un contexte international plutôt défavorable à une plus grande progressivité de l’impôt sur les successions. Pourquoi songer à augmenter l’impôt sur les successions si la part des recettes de l’impôt sur l’héritage dans les recettes totales de l’État central baisse partout dans les pays de l’OCDE (OCDE 2021[6]). Ce n’est pas seulement la part des recettes qui interroge. Ce sont aussi les expériences des pays qui suppriment l’impôt sur l’héritage. Sur trente-huit pays membres de l’OCDE, 14 n’ont aucun droit de succession. L’Autriche, la Norvège et la Suède ont récemment supprimé ce type d’impôt. Parmi les 24 pays taxant les successions, la France et la Belgique sont les pays qui ont les taux les plus élevés. Les droits de succession et de donation constituent 1,4% des recettes fiscales en France alors qu’ils ne représentent que 0,5% dans les 24 pays de l’OCDE ayant une telle taxe (OCDE 2021[7]). Outre les pays qui n’imposent pas l’héritage, il existe dans la plupart des pays des abattements qui réduisent considérablement le montant des actifs sur lequel est prélevé l’impôt.
Pour répondre à ces objections potentielles à leurs réformes, les experts estiment que l’impopularité de l’impôt sur les successions est la conséquence d’une mauvaise information de la population et que le retrait de ce type d’impôt dans de nombreux pays ne serait pas la conséquence de leurs vices intrinsèques. C’est la position adoptée par l’un des spécialistes français de l’épargne et du patrimoine, André Masson. A l’origine de cette mauvaise compréhension des enjeux de la réforme, il y aurait selon lui un consensus social alimenté par une coalition idéologique entre les néo-libéraux et les familialistes (Masson 2018[8]). Pour rendre la réforme soutenable, il faudrait donc faire sauter ce verrou. Il faudrait selon les mots d’André Masson le « détrôner » au profit « d’une coalition plus large et plus équilibrée ». Si on devait nommer cette coalition qu’il appelle de ses vœux on dirait qu’elle est égalitariste ; une réelle menace pour la stabilité des démocraties libérales (Facchini et Melki 2021[9]). L’égalitarisme porte d’ailleurs une conception très particulière de l’impôt : alors que chez les classiques l’impôt sert uniquement au financement des biens publics, chez eux il est aussi un moyen de réaliser l’égalité réelle ; égalité des conditions et égalité des chances.
Les débats actuels comme passés autour de l’impôt sur la mort sont par conséquent essentiellement motivés par des considérations d’équité. Le principal argument en sa faveur est l’égalité des chances. Le principal argument en sa défaveur est la liberté du défunt. Ce qui rappelle que l’économie de l’impôt est fondamentalement une science morale et politique. L’opposition socialistes–libéraux est ici tenace et reste structurante. Protège-t-on la propriété du mort, ou empêchons-nous ses dernières volontés d’être réalisées au nom d’un idéal égalitaire ?
L’économiste doit, de plus, être honnête. Il ne peut dénoncer le consensus néo-libéral sans nommer la doctrine par laquelle il désire le remplacer ; sans avouer qu’il veut mettre en œuvre un consensus égalitariste, socialiste ou néo-socialiste. Il est vrai que cette recherche d’un consensus égalitariste structure l’histoire de l’impôt sur l’héritage. Une première section se propose de le rappeler (1). Une telle norme explique l’importance de l’appareillage statistique mobilisé, mais expose ses partisans à la critique de Robert Nozick ([1974] 1988[10]) : les statistiques sur les inégalités ne disant rien sur la justice ou l’injustice, la norme égalitariste expose ses défenseurs à la critique de l’efficience (2). La progressivité de l’impôt sur l’héritage a en effet, selon les travaux les plus récents sur la question, un effet négatif sur l’accumulation de capital et finalement sur la croissance économique du pays (3). Ce sont ces trois points qui sont discutés dans les sections qui suivent et qui convergent vers l’idée que la suppression de l’impôt sur l’héritage serait une mesure tout à la fois juste et efficiente.
14 commentaires
Des taxes toujours des taxes pour ceux qui ont travaillé pour financer toute la racaille du monde et les gros rentiers de la république toujours plus nombreux. En somme piller ceux qui travaillent ou ont travaillé pour financer et cultiver la fainéantise et l’escroquerie légale.
Escroquerie légalisé par nos divers gouvernements depuis 40 ans, la perte de l’économie de la France.
J’ai bien lue l’article les personnes qui veulent augmenter les taxes sur l’héritage sont surement de gauche car les personnes qui laissent des petits ou gros héritages ont tous économisés se sont certainement privez de Vacances aux bout du monde Travaillée toute leur vie ils avaient une bonne hygienne de vie pour ne pas tomber malade ils ont saisie
de bonne opérations qui leur ont permie d’engrenger des bien de l’argent en ce privent et maintenant les vautours voudraient leur prendre leur aquits alors que eux a part faire des folie des voyage d’agrément ont dilapidé tous leur avoir
L’imbicilité des égalitaristes est sans limite.
Nous héritons de nos parents :
1- Notre aspect physique, donc il faudrait mutiler et défigurer ceux qui ont la chance d’être beaux et bien bâtis.
2- Notre intelligence, donc il faudrait lobotomiser les doués et surdoués.
3- Les réseaux de nos parents, donc il faudrait changer le nom des heritiers pour les rendre anonymes.
4- etc.
L’inégalité est ce qui fait la richesse de la nature humaine. L’uniformité engendrée par l’égalitarisme est le berceau de l’ennui et du désespoir, l’inégalité est synonyme d’espérance. Toute ideologie egalitariste est injuste et INHUMAINE.
L’impôt sur les successions ne devrait pas exister ! vous payer l’impôt toute votre vie, pourquoi vous en faire payer lors de votre mort ? Encore une idée des idéologues gauchistes qui sont totalement obsédés par cet égalitarisme qui tue !!
Contre l’impôt sur la mort, mais le vol du mort par l’état charognard.
Deux cas:
1/ je travaille, j’économise, j’achète un bien, j’épargne pour ma retraite et je ne peux disposer de mes biens pour des héritiers sans une imposition exorbitante. Pourtour je l’ai réalisé avec de l’argent sur lequel j’ai déjà payé l’impôt…
2/ je gagne, je dépense TOUT, je ne laisse rien, rien pour de potentiels héritiers, mais rien à l’état…
En fait il ne faut rien laisser,
Cela me rappelle quand de grands penseurs voulaient faire payer un loyer fictif au propriétaire (qui avait économiser pour acheter), parce ce n’était pas juste par rapport au locataire (qui avait peut être choisi de ne pas économiser et de tout dépenser)
De toute façon on devrait décerner un prix au meilleur Taxeur (député, sénateur etc..)
Mettre en place un système de patrimoine de départ minimum ! Ben voyons !!
Et puis quoi encore ?
Il faut travailler pour avoir quelque chose !
L’impôt sur la mort ne devrait pas exister il est largement payé tout au long de la vie.
Oui en fait il ne faut rien laisser.
Marre de ces soi disant égalitarismes gauchistes !
A quand la taxe sur l’air que l’on respire ?
et bien oui ! les droits de successions sont bien trop élevés, car on économise toute une vie, pour la retraite, ou bien pour nos petits, et l’état se « GAVE » pour redistribuer n’importe comment et à n’importe qui !
J’en fait les frais en ce moment – et on s’étonne que les français partent s’installer à l’étranger:20 ans de moins je pars, mais trop tard pour moi.
Vos rubriques sont très bien.
Cordialement
FB
OUI! Francoise Baud.
Les français aisés jeunes et cultivés quittent le pays pour s’installer à l’étranger.
L’Etat, avec ce type de mesures fiscales, ACCELERE le « Grand Remplacement » dénoncé par le Z.
Ainsi il y a de la place pour de nouveaux arrivants.
Les romains, quand ils ont envahi la gaule, apportaient les routes, l’agriculture, l’écriture, l’architecture, l’expérience des grands travaux, un art et un confort de vivre…
Bref, une CIVILISATION de PROGRES avec un BILAN GAGNANT pour les FUTURES GENERATIONS.
Ils étaient « une chance pour la Gaule » 🙂 🙂 🙂
A contrario, que peuvent nous apporter les arabo-musulmans et les africains en venant en France?
En tout cas, 60 ans après leur « libération arrachée au méchant colonisateur européen et blanc » je ne constate rien de bien tangible dans leurs pays d’origine…
… à part le CHAOS, les CONFLITS ETHNIQUES et RELIGIEUX c’est plutôt négatif.
En 2022, la démocratie a parlé!
Les français ont voulu cette situation!
Pourquoi se plaignent ils?
On se prive toute la vie pour laisser quelque chose à ses proches, et une bande de voleurs sans scrupule, voudrait le spolier au motif que ceux qui ont été cigale n’ont rien à laisser à leur enfants….Défendre une telle idée est une honte absolue…rappelons que les biens acquis l’ont été après s’être acquitté de l’impôts sur le revenus déjà confiscatoire. un impôts sur les revenus, tous les revenus, est logique. les impôts sur le capital, sont une honte
Quand une fratrie a hérité d’un bien immobilier avec un droit de succession de 20%, lors du décès du père, ce même bien est à nouveau taxé à 45% lors du décès de l’un d’entre eux sans héritier, soit 65% au total.
Lorsque ce bien est vendu pour payer les droits, les acquéreurs s’endettent pour 30 ans surtout pour payer l’Etat et les Banques…on parle de redistribution alors que c’est de la spoliation!
Le patrimoine minimum de départ serait il juste ? Ce n’est pas sûr, il y aura toujours des cigales et des fourmis, les premières auront assez vite dilapidé le leur et na manqueront pas de crier haut et fort qu’il est injuste que les fourmis se soient enrichies. L’argument n’est pas neuf, il y a toujours ceux qui réclament votre montre pour vous donner l’heure…
Au nom d’une prétendue EGALITE de CHANCES, si dépouiller « les riches » pour habiller les « pauvres » supprimait la pauvreté, cela se saurait. Sans compter que ces « riches » dépensent et font fonctionner LA « consommation » si chère à nos gouvernants. Un « riche » qui quitte notre pays pour des cieux plus cléments fait travailler des gens ailleurs qu’en France. Au fait, à partir de quand est-on riche ? Apparemment, pour ce faire, il suffit d’avoir travaillé dur et économisé pour acheter son logement pendant que d’autres gaspillent. Donner la même sommes à chaque membre d’une fraterie ne signifie pas qu’ils en feront le même usage. Un encouragement à la paresse.
Taxer l’héritage est déjà scandaleux.
Au nom de quoi devrait-on réaliser une équité du patrimoine ? Le nivellement par le bas ?