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Le mythe de la justice sociale

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Comme on le sait, Friedrich Hayek a écrit un livre remarquable, Droit, législation et liberté, et le titre du deuxième volume est Le mirage de la justice sociale. Friedrich Hayek explique de manière convaincante que l’expression « justice sociale » n’a pas de sens. Ainsi, il écrit dans la préface de ce volume :

« Démontrer qu’une expression universellement employée, et incorporant pour bien des gens une croyance quasi-religieuse, n’a absolument aucun contenu et ne sert qu’à insinuer qu’il nous faut consentir à ce que réclame un certain groupe, voilà qui est beaucoup plus difficile que de prouver qu’une conception est fausse. »

Friedrich Hayek réussit brillamment à démontrer de manière très rigoureuse l’inanité du concept de « justice sociale » et on peut penser que tout a été écrit par Friedrich Hayek et qu’il ne faut pas essayer de débattre de la justice sociale.

Nous ne critiquerons certainement pas ce qui a été écrit par lui, ni n’essaierons de résumer son livre. Mais nous pensons que ce sujet est si complexe et si important qu’il est peut-être possible d’ajouter quelques remarques à ce qui a été définitivement écrit par Friedrich Hayek.

Justice sociale, éthique universelle et éthique personnelle

Il est évident qu’il n’y a pas une seule définition de la « justice sociale ». Ce terme est très utilisé — en particulier en ce qui concerne les politiques publiques — mais souvent avec des significations implicites divergentes. Cependant, une chose est certaine : lorsqu’on parle de « justice sociale », tout le monde l’interprète à juste titre comme un concept éthique. Par conséquent, afin de mieux comprendre sa signification, il peut être utile de commencer par une approche plus générale, à savoir examiner ce que l’on entend exactement par « éthique ». De ce point de vue, il semble tout à fait justifié de faire une distinction fondamentale entre deux types d’éthique qu’il nous semble utile de qualifier d’ « éthique universelle » et d’ « éthique personnelle ».

L’éthique universelle n’est malheureusement pas universellement reconnue à notre époque et peut-être devrions-nous l’appeler « éthique universalisable ». Elle peut être définie comme un ensemble de principes moraux qui sont potentiellement acceptables pour tous les individus du monde sans qu’il puisse y avoir de contradictions et de conflits entre les actions des uns et des autres. Il semble donc qu’une seule définition de l’éthique universelle soit possible, à savoir le respect des droits légitimes des individus, c’est-à-dire leurs droits sur leur propre personne et les droits de propriété qu’ils ont légitimement obtenus.

En ce qui concerne l’éthique personnelle, elle consiste pour chacun, par exemple, à choisir avec qui on veut être altruiste et comment on veut se comporter envers les autres. Dans la mesure où il n’est évidemment pas possible d’être altruiste avec tous les gens du monde, chacun doit choisir avec qui il veut être altruiste et sous quelles formes. Par conséquent chacun choisit simultanément d’exclure d’autres personnes de ses activités altruistes (ou « égalitaires »). Ainsi, si un individu préfère aider ses enfants plutôt que d’aider une personne qui vit misérablement parce qu’elle ne veut pas travailler et/ou parce qu’elle préfère vivre aux dépens des autres, pourquoi une politique visant à réduire les « inégalités » exigerait-elle que cet individu fasse les choix qu’il ne souhaite pas ? Cette politique crée de nouvelles inégalités entre ceux qui considèrent que cette politique est respectueuse de leur moralité personnelle et ceux qui n’en sont pas d’accord.

Cette distinction entre éthique universelle et éthique personnelle permet de comprendre ce que l’on entend par « justice sociale ». En fait, il existe deux définitions très différentes de la « justice sociale ». La première concerne l’éthique universelle, à savoir le respect des droits individuels. D’autre part, l’éthique personnelle inspire la seconde définition de la « justice sociale » : elle consiste à comparer la situation réelle des individus et à décider subjectivement que les différences sont justes ou non. Cette deuxième définition est la plus largement acceptée et, généralement, lorsqu’on parle de « justice sociale », les gens se soucient principalement des revenus monétaires des individus et éventuellement de la valeur monétaire de leurs patrimoines. Selon un jugement personnel — plus ou moins partagé par un grand nombre de personnes — on considère que les différences entre les revenus ou patrimoines individuels doivent être plus ou moins diminuées. Maintenant, certaines caractéristiques des deux définitions doivent être clarifiées afin d’avoir une analyse rigoureuse de ce problème.

Considérons d’abord la première définition de la justice sociale qui est en fait une simple application de l’éthique universelle. Nous venons de mentionner qu’elle signifie que les droits individuels sont respectés par tous. Mais il ne suffit pas de se soucier du respect des droits, car les droits individuels doivent être fondés sur l’éthique pour qu’une situation respectueuse des droits soit justifiée sur le plan éthique. En fait, supposons qu’il existe une société dans laquelle la plupart des biens ont été obtenus au moyen de vols ; il est évident que, dans un tel cas, il n’y a aucune justification au respect des droits de propriété ! Cela signifie qu’il est important de déterminer dans quels cas les droits de propriété sont légitimes.

Le principe de base de l’éthique consiste à affirmer que les individus sont libres, ce qui signifie qu’ils ne sont pas soumis à la contrainte d’autres personnes, c’est-à-dire qu’ils sont propriétaires d’eux-mêmes. Mais on n’est pas son propre propriétaire si jamais on n’est pas propriétaire des biens et des services qu’on crée en utilisant son esprit et ses activités physiques. Il faut donc considérer que les droits de propriété légitimes sont ceux qui sont obtenus par des actes de création (et, évidemment, par l’échange de biens et de services qui ont été créés par les partenaires dans l’échange).

Ainsi, la première définition de la justice sociale peut potentiellement être acceptée par tous les individus dans le monde entier (du moins si les gens s’accordent sur la légitimité des droits de propriété).

De l’immoralité des politiques de redistribution

Mais, en ce qui concerne la deuxième définition de la justice sociale — à savoir une comparaison du niveau de vie des individus dans une société — chaque individu a une définition différente de ce qu’il considère comme socialement juste. Il y a donc un problème très important, à savoir la cohérence entre ces différentes opinions. Comme, très probablement, tous les individus ont des opinions différentes sur la « solidarité », il ne peut y avoir de critère « universel » de ce qui est considéré comme « justice sociale », c’est-à-dire la répartition équitable des ressources. On suppose alors que la justice sociale dans la répartition des revenus ou des patrimoines peut être définie par une majorité de voix dans un système démocratique. De nos jours, lorsqu’on parle de justice sociale, on entend implicitement par là la solidarité ou plutôt les activités de redistribution (politique sociale), ce qui renvoie au deuxième sens de la justice sociale. On suppose implicitement que la justice sociale implique une réduction des inégalités. Dans le terme « égalité » ou « inégalité », il y a un jugement de valeur implicite. C’est pourquoi on considère la réduction des inégalités comme une politique moralement justifiée.

Les libéraux sont souvent critiques à l’égard des politiques égalitaires, de sorte qu’on prétend souvent qu’ils favorisent l’égoïsme et que le libéralisme doit être remis en question pour des raisons éthiques. Mais les êtres humains se caractérisent par leur diversité et c’est pourquoi il faut, d’une part, parler de diversité plutôt que d’inégalité et, d’autre part, être respectueux de cette diversité inhérente à la nature humaine. Le terme d’inégalité serait justifié si le sort de tous les individus — et en particulier leur niveau de vie — était déterminé par une autorité centrale possédant toutes les ressources et capable de les « distribuer » plus ou moins « également ». Mais ce n’est pas le cas — heureusement — dans une société libre et c’est pourquoi l’expression « redistribution des revenus » est totalement trompeuse.

Cependant, contrairement à ce que l’on prétend souvent, le libéralisme ne soutient pas la liberté de chacun de faire quoi que ce soit, mais la liberté d’agir dans le respect des droits légitimes d’autrui. Cette liberté d’agir implique la liberté de mettre en œuvre sa propre éthique personnelle, mais seulement si elle est légitime et si elle est respectueuse de l’éthique universelle. C’est le cas si une personne qui détient des droits de propriété légitimes sur certaines ressources utilise une partie de ces ressources pour aider une autre personne ; ses actes sont alors conformes à sa morale personnelle sans porter atteinte à la morale universelle. Ce comportement est totalement moral et respectable. Mais quelqu’un qui vole des biens à une personne pour donner son butin à une autre personne — parce que sa morale personnelle l’incite à aider cette dernière — viole les droits de propriété de la première personne et donc la morale universelle.

Or, c’est exactement la même chose qui existe avec les « politiques d’inégalités » : les hommes d’État (politiciens et bureaucrates) prélèvent, grâce à la contrainte, des ressources auprès de certaines personnes (appelées citoyens) pour les donner à d’autres. Ce faisant, ils portent atteinte à l’éthique universelle et nous devons donc accepter l’idée qu’une politique visant à réduire les « inégalités » est en principe immorale. Si les hommes d’État utilisent leur monopole de la contrainte légale de telle sorte que cette contrainte soit légale, elle est cependant immorale puisqu’elle constitue une atteinte aux droits de propriété légitimes (et c’est pourquoi il faut considérer comme un devoir moral de réduire les impôts autant que possible). Il se peut qu’en agissant ainsi certains hommes d’État tentent de mettre en œuvre leur propre moralité personnelle, mais de toute façon ils portent atteinte à la morale universelle. D’autre part, il est bien connu que, ce faisant, ils poursuivent souvent des objectifs personnels : ainsi, pour être élus ou réélus, ils transfèrent des ressources à un grand nombre d’électeurs aux dépens d’une minorité. C’est pour cette raison que l’impôt progressif – immoral et inégal par nature – existe. Et le fait que les hommes d’État soient élus par une majorité d’électeurs ne leur donne pas de légitimité puisqu’on peut toujours trouver une majorité pour violer les droits légitimes d’une minorité dans la mesure où l’exercice de la contrainte légale est possible.

De plus, l’égalité est définie arbitrairement à partir d’un seul critère, à savoir le revenu à un moment donné. Or les objectifs des individus sont variés (ils ne concernent pas seulement les revenus monétaires), leur âge est différent et donc leur expérience et leur capital (qui sont des sources de leurs revenus). Imaginons que tous les individus soient identiques, il y aurait cependant une inégalité des revenus en fonction de l’âge de chacun.

Bien sûr, certains sont victimes de handicaps physiques ou mentaux et l’histoire de l’humanité montre que la charité a toujours existé dans de tels cas. Cette charité, décidée personnellement par chaque individu, correspond à une morale personnelle et elle est extrêmement respectable, contrairement à la charité dite publique (qui est d’ailleurs entachée de perspectives électorales et qui conduit donc à de nouvelles inégalités entre ceux qui arrivent ainsi au pouvoir – prétendant prendre en charge la pauvreté – et ceux qui doivent subir des choix publics).

Pourquoi le libéralisme est humaniste et crée une dynamique vertueuse

Soulignons encore une fois qu’il est totalement faux de prétendre que les libéraux prônent l’égoïsme puisqu’ils ne sont pas d’accord avec les politiques égalitaires. Ils sont respectueux de tous les êtres humains — riches ou pauvres, jeunes ou vieux, etc. — et ils respectent une morale profondément universelle mais aussi toutes les morales personnelles tant qu’elles restent compatibles avec la morale universelle. Et c’est pourquoi il n’est pas faux de dire non seulement que le libéralisme est humaniste, mais même que seul le libéralisme est un humanisme. Au fond, les libéraux ont confiance dans les capacités des individus au lieu d’essayer de les manipuler comme on le ferait avec une machine. Ils savent que les individus sont capables de générosité et aussi qu’ils sont capables, si nécessaire, d’inventer des processus pour apporter du secours aux autres. C’est le cas, par exemple, des activités d’assurance qui aident les victimes de certains événements malheureux à bénéficier d’une indemnisation. On pourrait, dans cette perspective, imaginer que, dans une société où il n’y aurait pas de politique égalitariste, les parents obtiennent une assurance avant même la naissance de leurs enfants pour leur permettre de vivre décemment même s’ils souffrent d’un handicap physique ou mental qui les empêcherait d’obtenir ce qui est nécessaire pour leurs besoins.

C’est donc pour des raisons morales qu’il faut se montrer critique à l’égard des politiques égalitaristes. Mais il y a aussi des raisons utilitaires. Ainsi, si un salaire minimum est rendu obligatoire par la loi dans un pays, il est censé permettre à tous les employés de recevoir au moins le même salaire. Mais la conséquence est qu’il exclut certains individus — surtout les plus jeunes — du marché du travail et les empêche d’améliorer leur vie grâce à leurs propres efforts et aux connaissances qu’ils pourraient sinon accumuler. C’est aussi une soi-disant préoccupation d’égalitarisme qui est donnée pour justifier un fort impôt progressif sur le revenu. Mais cette politique « inégale » a pour conséquence de punir et de décourager ceux qui sont les plus innovants, les plus travailleurs, les plus aptes à prendre des risques. Il en résulte l’existence d’obstacles au progrès économique, ce qui est préjudiciable pour tous. Et cette politique pousse également à l’exil certains individus qui en sont particulièrement victimes, ce qui est aussi la création d’une inégalité entre les individus.

C’est donc pour des raisons morales qu’il faut se montrer critique à l’égard des politiques égalitaristes. Mais il y a aussi des raisons utilitaires. Ainsi, si un salaire minimum est rendu obligatoire par la loi dans un pays, il est censé permettre à tous les employés de recevoir au moins le même salaire. Mais la conséquence est qu’il exclut certains individus — surtout les plus jeunes — du marché du travail et les empêche d’améliorer leur vie grâce à leurs propres efforts et aux connaissances qu’ils pourraient sinon accumuler. C’est aussi une soi-disant préoccupation d’égalitarisme qui est donnée pour justifier un fort impôt progressif sur le revenu. Mais cette politique « inégale » a pour conséquence de punir et de décourager ceux qui sont les plus innovants, les plus travailleurs, les plus aptes à prendre des risques. Il en résulte l’existence d’obstacles au progrès économique, ce qui est préjudiciable pour tous. Et cette politique pousse également à l’exil certains individus qui en sont particulièrement victimes, ce qui est aussi la création d’une inégalité entre les individus.

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4 commentaires

REEL 3 janvier 2022 - 10:35

Le mythe de la justice sociale
pour rire un peu ‘je me fou du monde entier quand Frédéric n’est pas là, MERCI pour cette lecture j’y retournerai car hélas nous n’avons pas de bon enseignement et notre LAFONTAINE nous a bien dit qu’il existait cigale et fourmi !!!a l’ère de l’image et du son où on nous culpabilise c’est important de développer le Libéralisme !!! à l’heure où on piétine la démocratie avec le bouleversement de la cellule de base !!!
1) faites fonctionner vos cellules grises nous les gâtés d’après guerre nous avions des Espoirs avec le travail la reconaissance de la VIE progrès c’est quoi ??? le retour à l aprorpriété c’est le vol ? LE MONDE EST TROP GRAND POUR NOUS IL EST IMPORTANT DE SAVOIR RECONNAITRE CE QUI NOUS EST DONNE merci LA FRANCE merci ceux qui savent regarder chez EUX et non vouloir abolir les malheurs !!! ORGUEIL SUPREME
le maître mot c’est AMOUR et de là ne pas vouloir être jaloux de ce qui est mieux compris et gérer merci MARIE CURIEnous ne sommes pas obliger de faire la guerre avec une décou verte !!! nous avions 36000 feux et bien oui nous avons besoin de voitures pour faire vivre nos campagnes !!! oui nous avons besoin des GENS DE LA TERRE pour nous nourrir ! nous avons besoin de médecins pour soigner pourquoi démolir systématiquement ce que nos ancêtres ont été en mesure de nous donnés !!! a bas le numérus clausus !! a bas les 35 heures oui nous avons travaillés 6 JOURS et maintenant nosu en sommes a la péiode de délation !!! et de la chasse a qui veut l’égalité sociale que nous n’aurons jamais car l’être humain est toujours inspiré pour VIVRE et en ce momenjt on en est a la peur d’être de trop sur terre à la peur des responsabilités FAMILIALES vive 2022 avec le bon sens et merci a vous de mobiliser les ignares la FRANCE c’est la FRANCE et elle n’a pas dit son dernier mot !!!
mon copain Astérix et bien tu as été avant nos rois qui ont été comme ils ont été NE JUGEONS PAS LE PASSE

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Obeguyx 3 janvier 2022 - 10:56

Le mythe de la justice sociale
A mon très humble avis, c’est le mot « social » décliné à toutes les sauces qui est le problème. Tout comme le mot « pédagogie ». Ces mots (et quelques autres) ne sont employés que pour sortir d’une impasse idéologique ou dialectique. Je remarque que certains philosophes évitent de plus en plus à employer le mot « pédagogie » et se reprennent souvent pour préciser leur pensée. Ils commencent à comprendre (c’est pas trop tôt et il n’est jamais trop tard, ma mère, normalienne, m’en avait avertit dès 1966) que ces mots sont des fourre tout qui ne servent qu’à abêtir et rendre serviles les populations. On pourrait citer aussi le mot « santé » (qui fout désormais la trouille). Tiens à ce propos, il est midi, je vais prendre l’apéro et « SANTE » !!!

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AlainD 4 janvier 2022 - 2:42

Le mythe de la justice sociale
C’est vrai Obeguyx que des mots et expressions sont galvaudés par bon nombre d’ignorants qui manquant de vocabulaire se jettent sur ce qu’ils pensent être d’actualité.
Social, pédagogie… Puis l’évolution du langage de quelques snobs qui transforment les aveugles en non-voyants, je passe sur la déclinaison. .. Avez-vous remarqué les comiques qui nous avancent des « quelques encablures » dont ils ignorent totalement la mesure ?
Je ne ferai pas plus long car tous ces peigne-culs qui pensent avoir inventé l’eau tiède me fatiguent…

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Astérix 9 janvier 2022 - 8:33

Le mythe de la justice sociale
Écoutez bien les politiques et les journaleux et vous constaterez qu’ils se trompent déjà sur la définition du mot libéralisme…!?
Tout est à refaire dans ce Pays !!

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