Depuis neuf ans, le Forum économique de Delphes réunit, pendant quatre jours, des dizaines d’experts et de politiques pour débattre de thèmes politiques, économiques et fiscaux. Cette année, la fondation Tholos, créée en 1985 à la demande de Ronald Reagan, a été l’un des partenaires du Forum et a organisé deux tables rondes. Faut-il préciser que la fondation est fidèle aux principes chers à Reagan, la liberté, la propriété et le libre- échange ? Son nom – Tholos – est celui de l’ancienne agora athénienne, où le Sénat rencontrait des membres éminents de la communauté. À l’instar des conversations qui ont eu lieu dans ce lieu antique, le travail de cette fondation est axé sur l’animation des rencontres, la création de coalitions et la coopération entre les groupes et think tanks qui dans le monde partagent les mêmes idées. Comme l’IREF, qui en fait partie, Tholos milite pour les droits de propriété, la baisse des impôts et des dépenses publiques ainsi que pour la suppression des réglementations et des obstacles qui empêchent le libre-échange. Ses publications les plus connues sont l’Indice des barrières au commerce international ou International Trade Barrier Index (TBI) ainsi que l’Indice international des droits de propriété ou International Property Rights Index.
Les tables rondes organisées par Tholos ont réuni des dizaines de personnes autour de thèmes comme le retard compétitif de l’Europe et ses causes, ou les politiques en faveur de l’innovation. Pratiquement tous les intervenants ont été d’accord pour dire que l’Europe et ses membres peuvent mieux faire. L’ambassadeur du Japon en Grèce par exemple a affirmé que le libre-échange est l’une des meilleures façons, pour deux pays, de collaborer. Pour la députée grecque Anna Mani Papadimitriou, l’Etat doit faire plus de benchmarking pour pouvoir réformer et laisser le secteur privé se développer. George Xirogiannis, directeur de la fédération des entreprises grecques, a été beaucoup plus sévère dans son constat : depuis 2019, plus de 5000 pages de réglementations ont été votées et ce n’est donc pas un hasard si le Portugal, un pays comparable au sien, a 3 000 PME de plus. Même constat de la part de Fred de Fossard (Legatum Institut – Royaume-Uni) : les hausses de taxes et d’impôts ainsi que la multiplication des réglementations vertes ont pénalisé l’économie britannique et ses entreprises. Pourquoi n’avons-nous pas créé des GAFAM européens ? C’est une question que chaque leader politique devrait se poser avant de prendre une décision économique et fiscale.
Ceux qui font les réglementations oublient que les entrepreneurs existent et qu’ils prennent des risques
Le député européen Manolis Kefalogiannis espère une Europe plus compétitive avec moins de normes. Nous aussi ! Les élections européennes approchent, c’est donc le moment de voter pour des programmes en faveur des libertés et des entreprises. Ramunas Macius (Japan Tobacco International) dénonce les barrières que posent les législateurs à l’innovation, y compris dans le son domaine. C’est d’ailleurs la conclusion à laquelle arrive aussi l’IREF dans ses travaux : la dernière étude que nous avons réalisée montre que les politiques françaises de lutte contre le tabagisme sont un échec car le nombre de fumeurs stagne. Taxer les cigarettes et réglementer ne sert à rien. Il vaut mieux persuader et encourager d’autres options comme la cigarette électronique et le tabac à chauffer. Christopher Lingle, de l’American Institute for Economic Research, a rappelé une chose essentielle : quand les politiques réglementent, cela part souvent d’une bonne intention. Ils oublient seulement que les entrepreneurs existent et qu’ils prennent des risques. Ce sont les entrepreneurs qui ont affaire au marché et qui doivent réussir sous peine de disparaître. Ce sont les entrepreneurs qui connaissent ce marché, mieux que quiconque, bien mieux que l’Etat qui n’a donc pas à le réglementer. Pourquoi ne pas privatiser la régulation de l’économie ?
Le célèbre essayiste Johan Norberg, que l’IREF cite souvent et qui vient de publier The Capitalist Manifesto. Why the Global Free Market Will Save the World, a évoqué la Grèce antique et les trois raisons de sa prospérité : c’était l’époque des marchands et du libre-échange, c’était un pays décentralisé avec des villes petites et indépendantes, la religion n’étouffait pas la société. Bel exemple pour nous…
Les droits de propriété font partie des droits de l’homme
Enfin, Lorenzo Montanari, un membre de la fondation Tholos, a présenté l’Indice international des droits de propriété (2023) qui analyse 125 pays représentant 93,4% de la population mondiale et 97,5% du PIB mondial. A partir de données sur l’environnement juridique, le degré de la corruption et du droit dans les Etats ainsi que la protection des brevets, cet indice révèle que, après quatre années de recul consécutif, on assiste à un léger retour du respect de la propriété. C’est une bonne nouvelle, mais il reste un long chemin à parcourir car les droits de propriété, physique ou intellectuelle, sont essentiels au développement. C’est grâce à eux qu’on peut stimuler la création, l’innovation et sa diffusion.
Les commentateurs de l’indice insistent sur le fait que les droits de propriété font partie des droits de l’homme, et c’est un point d’éthique fondamental qui partout devrait être assez solidement établi pour rendre ces droits inaliénables. Les meilleurs élèves de cet indice sont la Finlande, Singapour, les Pays-Bas, et la Nouvelle Zélande. La France est 20e.
Il a également présenté l’Indice des barrières au commerce international évalue plusieurs types d’obstacles : les barrières tarifaires (tarifs douaniers), les barrières non tarifaires (subventions à l’exportation, quotas, mesures sanitaires et phytosanitaires, mesures anti-dumping, etc.), les restrictions sur le commerce des services (commerce de détail, télécom, finance, transport, construction, etc.). Un indice qui permet aussi d’évaluer tout ce qui favorise le commerce international comme les accords, les droits de propriété, ou ce qui relève de la logistique. Dans le classement 2023, la France se classe 27ème sur 88 pays, devant la Suisse (36ème) ou l’Italie (49ème), mais derrière l’Allemagne (11ème) ou l’Espagne (14ème). En tête : Singapour, la Nouvelle Zélande, le Japon, le Canada et Hong Kong. Selon le rapport de la fondation, les réglementations imposées par 88 pays affectent 76 % de la population mondiale et 96 % du PIB mondial. Il reste beaucoup à faire pour que le libre-échange soit adopté par tous.
Moins de taxes et de réglementations, cela signifie aussi faire confiance à l’individu, lui laisser la possibilité de créer et d’innover. Les règles doivent être simples et efficaces et les taxes réduites au minimum. C’est le meilleur moyen de rendre le monde prospère. Espérons que ce sera le cas au XXIe siècle.