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Réforme assurance chômage : la France pourrait faire 55 milliards d’économies, voire beaucoup plus

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Selon les dernières données de l’OCDE (2021) les dépenses publiques de chômage sont en France cinq fois supérieures à la moyenne de l’OCDE : en France, 2,788 % du PIB  contre une moyenne européenne 0,578%. Elles sont, par exemple, de 0,12% au Royaume-Uni, 0.582% en Irlande, 0,792% en Allemagne, 0,819% aux Etats-Unis, 0.906% en Italie, 1,528% en Espagne. L’écart de 2,20 % du PIB par rapport à la moyenne représentait 55 Md€ en 2021 !!!

En réalité les dépenses publiques en faveur de l’emploi sont encore plus importantes, soit 183,8 Md€ en 2021 ou 7,332% du PIB si l’on inclut toutes les dépenses annexes : incitations à l’embauche (80,5Md€) et à l’activité (11 Md€), soutien du revenu (61,3 Md€), formation professionnelle (24,4Md€), accompagnement des demandeurs d’emploi (6,3 Md€).

Pourtant en mars 2024, si le taux de chômage français était inférieur (7,3%) à celui de l’Espagne (11,7%), il était supérieur à celui de l’Italie (7,2%), du Royaume-Uni (4,3%), de l’Irlande (4,3%), des Etats-Unis (3,8%), de l’Allemagne (3,2%).

Bien sûr, plus il y a de chômage, plus il coûte cher, mais la France dépense trois fois plus que l’Italie qui a un taux de chômage voisin du sien et 3 à 4 fois plus que l’Irlande, l’Allemagne ou les Etats-Unis dont le taux de chômage est près de deux fois inférieur.

Des allocations généreuses

Certes, la France est généreuse en matière de chômage, mais cela n’explique pas tout.

  • L’accès à l’assurance chômage est conditionné à une durée minimale d’emploi, au cours d’une période de référence, fixée à 6 mois au cours des 24 derniers mois en France. La durée d’emploi requise est aussi de 6 mois au Luxembourg ou aux Pays-Bas, mais, respectivement, au cours des 12 et 9 derniers mois. Elle est de 12 mois en Espagne (sur les 72 derniers mois), en Allemagne (sur les 30 derniers mois) ou en Suisse (sur les 24 derniers mois).
  • La durée d’indemnisation peut actuellement aller jusqu’à 18 mois en France, comme au Portugal. Elle est proche de 20 mois en Espagne, en Allemagne et au Danemark par exemple. En revanche, la durée maximale de versement des allocations est inférieure au Luxembourg (12 mois), en Irlande (9 mois), au Royaume-Uni (6 mois) et en Suède (300 jours ou 450 jours si enfant à charge).
  • L’assurance chômage en France couvre 57 % du salaire journalier de référence dans la limite d’une indemnité de 8359 € au plus. L’indemnité couvre 90 % du salaire de référence au Danemark (mais dans la limite de 2564€), 80 % au Luxembourg, 70 ou 80 % en Suisse, 75 % au Pays-Bas, 75% en Italie avec un taux dégressif au-delà du 6e mois. L’Espagne et la Belgique ont aussi fait le choix d’une allocation dégressive.

L’UNEDIC publie un tableau comparatif :

Il est difficile de comparer ces régimes qui ont tous leurs particularités, mais globalement le régime français est encore avantageux par rapport à la majorité des autres, sans pour autant justifier de l’importance de la dépense publique française en faveur du chômage.

La réforme Attal

Après déjà une réforme en 2023, le gouvernement veut encore restreindre les conditions d’allocation à compter de juillet 2024. La durée d’indemnisation maximale passera de 18 à 15 mois (de 27,5 à 22 pour les séniors de plus de 57 ans contre 55 antérieurement). Il faudra avoir travaillé huit mois pendant les vingt derniers pour avoir le droit de percevoir une allocation, contre actuellement six des vingt-quatre derniers mois. En cas de dégradation du marché de l’emploi, un complément de fin de droit viendra prolonger les droits, mais en cas de baisse du taux de chômage en dessous de 6,5 %, la durée maximale d’indemnisation passera à douze mois (18 mois pour les séniors). En contrepartie, les séniors qui retrouveront du travail disposeront d’un « bonus emploi senior » d’un an comblant le manque à gagner si le salaire repris est inférieur au salaire perdu.

Selon le ministère du Travail, cette réforme réduirait les dépenses publiques de 3,6 Md€ et il en est espéré le retour à l’emploi de 90 000 personnes supplémentaires.

Et si on privatisait l’assurance chômage ?

Le gain attendu est donc important mais reste minuscule par rapport au coût global de l’indemnisation du chômage.

La France traite le chômage en dépensant de l’argent pour soutenir les chômeurs, les entreprises qui embauchent, les petits salaires… En réalité le chômage français est sans doute dû en grande partie au piètre niveau de l’Education nationale qui ne forme plus des jeunes aptes au travail, aux difficultés des chômeurs à accepter un emploi ailleurs eu égard aux difficultés de se loger, aux coûts énormes et à l’importance des procédures de licenciement qui font hésiter à embaucher… Il est dû plus globalement à l’Etat providence qui déresponsabilise les Français et les étrangers qui sont sur son sol.

Le Danemark pourrait être un exemple à suivre. L’assurance chômage n’y est pas obligatoire. Chacun peut s’inscrire auprès d’une des 23 caisses privées agréées par l’État et gérées généralement par des organisations de salariés ou de travailleurs indépendants. Les Danois sont responsabilisés. Les Français pourraient l’être aussi si on les laissait s’assurer librement pour leur chômage auprès de la compagnie ou mutuelle de leur choix, que la concurrence obligerait à baisser leurs tarifs. Ils négocieraient des franchises ou des plafonds pour réduire leurs cotisations, comme ils le font pour leurs assurances voitures. Ils veilleraient à rester le moins longtemps possible au chômage pour réduire leurs cotisations.

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3 commentaires

Jean-Aymar de Sékonla 3 juin 2024 - 6:54

… et n’oublions pas le coût du « chômage caché » par les emplois publics fictifs!

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Razoski 3 juin 2024 - 7:05

Bonjour,

Une autre version sur le sujet:
https://theconversation.com/avec-les-chomeurs-la-france-nest-pas-plus-genereuse-que-ses-voisins-229545
Cela mérite une réflexion profonde et européenne.
Quand on voit que les déménageurs les sociétés de nettoyage et d’autres qui assurent ce type de métiers, font appel à des populations en recherche d’emploi pour envoyer une grosse partie du SMIC qui dans leurs pays représente une richesse.
Ce n’est ni l’immigration ni des mesures protectionnistes qui feront changer tout cela.
Un changement profond de culture de nos sociétés capitalistes avant tout est à amorcer.

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CANEPARO 3 juin 2024 - 8:04

Pour réussir, les politiques de durcissement des conditions pour bénéficier de revenues au chômage doivent être couplées à une politique d’offre d’emploi. Cette dernière ne sera effective qu’avec la baisse drastique des impôts de production et des cotisations patronales et salariales. Mais aussi en rendant plus souple la gestion des ressources humaines dans les entreprises. Le problème du chômage est multi factoriel.

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