Le populisme italien inspire une réflexion sur la démocratie en Europe : les gouvernants ont-ils mené la politique appropriée ou ont-ils abusé des peuples infantilisés par l’Etat Providence ? La démocratie vaut mieux que cela, comme les Suisses l’ont récemment montré.
La démocratie tourne folle ; elle s’affole, se méprend, s’inquiète, s’éprend de ses adversaires. En Italie la quasi-totalité des électeurs se sont prononcés en faveur d’un clown, d’un ancien communiste et d’un abuseur de jeunes filles mineures. Le tout sous le regard du président de la République, lui aussi un ancien communiste. Le communisme n’a pas encore vécu ; il a fait des ravages à Chypre d’où enfin il a été délogé, mais au prix d’une aide de quelques milliards que devront payer les contribuables européens.
Les médias s’émeuvent et concluent à la hâte que la faute en revient à l’Europe qui a été trop favorable à la rigueur alors que c’est juste le contraire. Certes, Monti a échoué lamentablement dans l’arène politique, mais c’est seulement parce que ça n’était pas son terrain de jeu, ce qu’il a eu le tort de méconnaitre. La politique politicienne est si diabolique !
La démocratie trompeuse
Ils n’ont pas été trop rigoureux. Ils l’ont été mal et trop peu. Ils n’ont pas été fidèles à leur parole. Ils ont perdu le sens commun.
Même la chancelière Merkel s’oublie en reniant la droite chrétienne qui l’a élue, en acceptant désormais de reconnaître le mariage homosexuel pour faire comme tout le monde. Elle maintient une politique affichée de rigueur que le président de la BCE encourage, mais celle-ci poursuit une politique de laxisme monétaire en utilisant des moyens différents de ceux de la FED mais tout aussi nuisibles. Car la création monétaire qui entretient des deux cotés de l’Atlantique un faux semblant de sortie de crise accumule en réalité des pétards susceptibles d’exploser au premier retour de feu. A bafouer le bon sens, celui-ci se venge toujours un jour. La bulle monétaire qui s’enfle éclatera au moment que personne n’attendra et se propagera en inflation et autre nuisance. Elle s’associe à l’amplification perpétuée des déficits budgétaires, malgré des discours contraires, pour continuer de contenter les peuples drogués de pain et de jeux.
L’infantilisation des masses
Car c’est de sa propre corruption que la démocratie souffre au point de risquer de vaciller. Elle entretient les masses dans l’enfantillage. Elle décide pour elles en même temps qu’elle élève de plus en plus d’interdits. Au moment même où l’Union Européenne condamne Microsoft à une amende record de 561 millions d’euros pour ne pas avoir incité ses clients, –libres-, à ne pas acquérir ses propres logiciels en même temps que son système d’exploitation, le gouvernement français s’apprête à obliger employeurs et employés à cotiser à des Mutuelles qu’ils ne pourront pas choisir. Le Gouvernement décide quand la concurrence est bonne !
Dans leur récent ouvrage, Patrice Huerre et Mathieu Laine (La France adolescente, JC Lattès) soutiennent que « la France est une adolescente en crise », rebelle et paresseuse, autodestructrice. En fait, c’est une démocratie dévoyée, particulièrement en France, qui empêche ses enfants de grandir en leur refusant d’user de leur propre liberté. Ce sont les prémisses d’un nouveau totalitarisme que prévenait déjà Emmanuel Kant en 1796 : « Un gouvernement qui serait fondé sur le principe de la bienveillance envers le peuple, comme celui d’un père envers ses enfants, c’est-à-dire un gouvernement paternaliste (…) où les sujets sont forcés de se conduire d’une manière simplement passive, à la manière d’enfants mineurs, incapables de distinguer ce qui leur est utile ou nuisible et qui doivent attendre simplement du jugement d’un chef d’Etat la manière dont ils doivent être heureux et simplement de sa bonté qu’également il le veuille, est le plus grand despotisme qu’on puisse concevoir (c’est-à-dire une constitution qui supprime toute liberté pour les sujets qui ainsi ne possèdent aucun droit) »
Le référendum suisse n’a pas interdit les hautes rémunérations
La démocratie a pourtant ses vertus et reste un rempart contre le despotisme lorsqu’elle fonctionne vraiment. Le gouvernement français a soutenu le projet européen de limitation des rémunérations des dirigeants. Mais il s’est réjouit à tort et trop vite du résultat de la votation suisse du 3 mars. Pour l’essentiel, le peuple suisse, à 67,9%, n’a pas interdit les hautes rémunérations, comme le voudrait le gouvernement français obsédé d’égalité, mais il a demandé, suite à l’initiative d’un ancien patron, Thomas Minder, et obtenu que, dans les sociétés cotées, c’est-à-dire celles dont les actions peuvent librement être détenues par chacun, les rémunérations des dirigeants et des membres du conseil d’administration soient soumises au vote préalable des actionnaires, sans que ceux-ci puissent se faire représenter de manière « aveugle ». Le peuple suisse a réintroduit dans la vie des affaires un principe sain et normal tendant à restituer aux propriétaires de l’entreprise le pouvoir sur les décisions importantes. C’est la règle, renforcée par les Suisses, du « say on pay » déjà adoptée par de nombreux pays anglo-saxons. Ce référendum montre très bien qu’il existe bien d’autres alternatives à une taxe exceptionnelle à 75 %.
De même, le vote suisse a prouvé que les masses peuvent se prononcer contre les experts et les politiques (le Conseil fédéral et le Parlement étaient opposés à l’initiative « Minder ») sans pour autant tomber dans le populisme, celui des accusations grotesques contre les « riches et méchants patrons ».
La démocratie n’est pas si bête quand elle peut s’exprimer. Mais les gouvernements socialistes ou socialisants ne veulent pas de cette démocratie libre qui pourrait les empêcher de décider pour les autres et de garder le pouvoir d’une soi-disant élite sur un peuple soi-disant incapable. La demande d’examen, -700.000 signatures-, du texte sur le mariage pour tous a été rejetée par un M. Delevoye, sur les recommandations de l’Elysée, pour les mêmes raisons, de peur que le peuple à la fin s’oppose à ce projet de loi.
C’est au contraire en rendant le pouvoir au peuple, en lui permettant plus facilement de s’exprimer, comme les Suisses, que nos vieux pays continueront de grandir plutôt que de retourner en enfance au risque de s’y perdre.