Face à la crise, le gouvernement français a proposé deux mesures fiscales pour soulager les entreprises et les revenus modestes : la suppression partielle de la taxe professionnelle et l’exonération d’impôt sur le revenu des personnes physiques qui en sont redevables au titre de la première tranche. Il s’agit d’une erreur de casting.
Certes, le mouvement apparaît généreux, mais chacun sait que les bonnes intentions pavent l’enfer. Les entreprises et les particuliers seront victimes à terme de ces mesures démagogiques. L’impôt sur le revenu qui n’est déjà supporté que par à peine plus de 50% des Français pèsera sur encore un peu moins d’entre eux. Dès lors la pression augmentera encore de la majorité de ceux qui en sont exonérés pour aggraver la charge de ceux qui le paye au risque de les faire fuir. Mais l’enjeu paraît plus important pour les entreprises.
La taxe professionnelle est un impôt perçu au profit des collectivités locales et frappe la valeur locative des immeubles occupés par l’entreprise d’une part et celle des investissements en matériels et installations de l’entreprise d’autre part. C’est cette seconde part qui serait à l’avenir exonérée de l’impôt de façon à ne pas pénaliser l’investissement.
Ces dispositions seraient mises en œuvre à compter de 2010, mais leur contour reste flou. Outre que les immeubles seraient encore taxés, il semble que la taxe minimum fixée à 1,5% de la valeur ajoutée serait maintenue. C’est ainsi que la mesure proposée aurait un coût limité à 8Mi€, en tenant compte par ailleurs de l’augmentation corrélative de l’impôt sur les sociétés liée à la hausse des bénéfices imposables des entreprises par suite de leur réduction de charges à ce titre, alors que la taxe professionnelle rapporte plus de 25 milliards d’euros aux collectivités locales et représente un tiers de leurs recettes.
Il faudra bien trouver des ressources fiscales correspondantes puisque l’Etat français ne sait pas réduire ses charges. Sont évoquées la création d’une taxe carbone ou l’augmentation de l’impôt sur les bénéfices des sociétés.
En réalité, la taxe professionnelle a ses mérites. Elle préserve l’autonomie des collectivités locales et permet aux entreprises de « voter avec leurs pieds », de choisir leur territoire d’implantation en fonction de la fiscalité applicable, donc de négocier. Cette liberté, d’ailleurs très encadrée, des autorités fiscales locales crée la concurrence entre elles et favorise une saine émulation et sans doute leur évite des hausses exagérées qui feraient fuir les contribuables professionnels de leur territoire. La suppression de cette taxe au profit d’un impôt d’Etat contribuera à centraliser encore un peu plus la fiscalité française et à risquer tous les excès.
Bien plus, la taxe professionnelle a les vertus de l’impôt sur le capital : elle favorise les bons et contribue à sortir les mauvais du jeu économique, à l’inverse de l’impôt sur les bénéfices qui fait payer les seuls qui réalisent des profits et en exonère ceux qui font des pertes. Il aurait sans doute mieux valu baisser le taux de l’impôt sur les sociétés qui, à un niveau de près de 34%, est en France parmi les plus élevés d’Europe (après la Belgique, 33,9%, et Malte, 35% sous réserve de très nombreuses réductions possibles).
Le MEDEF milite depuis longtemps pour la suppression de cet impôt, qui, selon les propos de Yvon Jacob, président du Groupe des Fédérations Industrielles « entre dans le calcul des coûts de production des entreprises, les dissuade de réaliser leurs investissements en France, et les rend moins compétitives face à la concurrence étrangère ». Mais ne vaudrait-il pas mieux que les entreprises qui gagnent puissent réinvestir librement leurs bénéfices sans être trop taxées d’abord à l’impôt sur les sociétés plutôt que de vouloir s’exonérer d’une taxe qui a le mérite de soumettre toutes les entreprises à la même aune fiscale sous la réserve de leur libre choix d’implantation ?
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