Détesté officiellement mais adulé en secret, le FMI (Fonds Monétaire International) est considéré ou comme un organisme « ultralibéral » coupable des problèmes économiques des pays en voie de développement ou bien comme un pompier mondial prêt à mettre la main à la poche pour distribuer sans regarder l’argent des contribuables. Le FMI a été fondé en 1944 à l’occasion de la mise en place des Accords de Bretton Woods instaurant une nouvelle organisation monétaire mondiale.
L’organisme survit à la débâcle du système de Bretton Woods en 1971 en continuant à agir comme une administration qui doit se porter au secours des Etats en crise financière. Non seulement le FMI a survécu à la fin des Accords de Bretton Woods mais ses pouvoirs – ainsi que son budget – n’ont cessé de s’agrandir.
« Un plan d’irrigation en période d’inondation »
Environ 2 600 employés bénéficieront bientôt d’un budget s’élevant à presque 1 000 Mds de dollars. Du jamais vu. Une première tranche de 250 milliards de dollars devrait être rapidement disponible grâce aux prêts de plusieurs pays. Le Japon s’est engagé sur 100 milliards de dollars, l’Union européenne sur un montant (presque) équivalent (75 milliards d’euros), la Norvège (jusqu’à 4,5 milliards de dollars) et le Canada (10 milliards de dollars). Pékin pourrait souscrire à un emprunt émis par le Fonds et libellés en droits de tirages spéciaux (DTS : unité de compte du FMI constituée d’un panier de dollars, d’euros, de livres sterling et de yens).
Une seconde tranche de 250 milliards de dollars viendra plus tard. Elle passera par les nouveaux accords d’emprunts (NAE) du FMI. Institués en 1998, en pleine crise asiatique, ces NAE lui permettent d’obtenir des crédits auprès de 26 pays. Parmi eux figurent les pays du G7 mais également l’Arabie saoudite, l’Espagne ou encore les Pays-Bas.
Et les leaders du G20 réunis à Londres au mois de mars sont allés encore plus loin. Ils se sont engagés à soutenir une allocation spéciale de DTS à hauteur de 250 milliards de dollars. Chacun des 186 pays membres (le Kosovo vient d’adhérer) détient une part du capital du Fonds. Ce montant, qui s’apparente à une réserve en devises de chacun des pays membres, permet de calculer sa capacité d’emprunt automatique auprès du FMI. Si un pays n’en a pas l’utilité, il peut la céder à un autre. La décision des leaders du G20, qui reste encore soumise à une approbation de la part des 185 membres, revient, en quelque sorte, à créer de la monnaie et à injecter des liquidités dans le système financier international. Quand les premiers DTS ont été inventés, en 1969, déjà pour soutenir le système monétaire international, Jacques RUEFF avait fait ce commentaire : « C’est un plan d’irrigation en période d’inondation ». En fait, c’est exactement ce qu’il ne faut pas faire. Car grâce à ce système, des pays comme l’Iran, la Syrie, le Zimbabwe, le Soudan, le Venezuela ou la Birmanie pourraient bénéficier automatiquement de plusieurs milliards de dollars sans aucune contrepartie. D’autre part, les banques centrales ont déjà émis tellement de monnaie pour soutenir les banques de second rang que les liquidités monétaires inondent le monde entier.
Le «consensus de Washington» voulant qu’une seule politique macroéconomique soit valable pour l’ensemble des pays en crise, lui aussi, a vécu. Place à la flexibilité et au cas par cas. Crise économique oblige, en mars dernier, le conseil d’administration du Fonds a aussi réformé la panoplie de ses instruments de prêt. Dans un seul but : simplifier et assouplir les conditions de ses prêts pour mettre tout son poids dans l’éradication d’une crise planétaire. Autant dire que le peu de conditions demandées auparavant pour accorder des prêts ne seront pas respectées. L’argent des contribuables sera bel et bien gaspillé.
Finalement, on a assigné un rôle central au FMI dans la surveillance du système monétaire et financier international. Que ce soit en collaboration avec le Conseil de stabilité financière, créé à Londres lors du G20, ou avec l’OCDE. Il aura le rôle de vigie, de détecteur de crise aussi en amont que possible.
Les prêts du passé et du présent : un défi au bon sens
Le FMI pourra-t-il assumer son rôle ? Regardons en détail si les missions du FMI ont eu dans le passé les résultats escomptés, c’est-à-dire le sauvetage financier du pays à court terme et sa mise sur de bons rails à long terme.
Premièrement, les prêts du FMI sont accordés sous conditions, ce qui est une très bonne chose en soi. Mais le problème principal est que les prêts sont accordés aux gouvernements qui sont…responsables de la crise. En effet, en menant de mauvaises politiques économiques et en augmentant inconsidérément les dépenses publiques, ces gouvernements se trouvent dans une situation de quasi-faillite et demande l’aide du FMI. Un exemple parfait d’échec de la mission principale du FMI est la Russie qui a bénéficié de plusieurs milliards de dollars de prêts (environ 50 Mds surtout pour sauver le rouble en 1998) depuis les années 1990 qu’elle a gaspillés et qu’elle n’a jamais remboursés. Or, non seulement ce pays n’a pas suivi les recommandations du FMI mais il se trouve dans une situation économique absolument catastrophique. Le Mexique a obtenu environ 40 Mds de dollars en 1982 lorsqu’il était en faillite après 70 ans de gouvernement socialiste (le PRI – Parti révolutionnaire institutionnel). C’est le même gouvernement qui a reçu le prêt sans pour autant que l’environnement démocratique et économique soit modifié. Les 57 Mds de dollars accordés à la Corée du Sud au milieu des années 1990 ont servi exclusivement à renflouer les banques détenues par des grandes familles et non pas à stimuler l’économie du pays.
Plus récemment, malgré l’intervention du FMI, les monnaies de l’Ukraine et de la Biélorussie ont plongé. Les 7.5 Mds de dollars accordés au Pakistan n’ont pas enrayé l’inflation qui est restée à plus de 20%. De même, les 15.7 Mds de prêts pour la Hongrie du début 2009 n’ont pas été assortis de conditions de réforme de son système de retraite excessivement généreux (pour plus de détails sur les retraites en Hongrie, voir le site de l’IREF).
D’ailleurs, il existe des chiffres qui ne trompent pas : environ 86 pays dans le monde ont reçu des crédits pendant plus de 10 années d’affilée ce qui montre que les prêts à court terme et sous conditions ne fonctionnent pas.
Normalement, pour accorder des prêts, le FMI demande la libéralisation de l’économie et la baisse des dépenses publiques. Faut-il une administration internationale pour appliquer ces mesures de bon sens ?