Depuis longtemps les syndicats français cherchent à faire la loi en France. La Constitution de 1958 leur en a fixé l’horizon en proclamant que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Puis M. Gérard Larcher leur en a offert les moyens en faisant  voter la loi du 31 janvier 2007 sur le dialogue social transposée notamment ainsi à l’article 1 du Code du travail :
Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l’emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l’objet d’une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l’ouverture éventuelle d’une telle négociation.
A cet effet, le Gouvernement leur communique un document d’orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options.
Lorsqu’elles font connaître leur intention d’engager une telle négociation, les organisations indiquent également au Gouvernement le délai qu’elles estiment nécessaire pour conduire la négociation.
Est ainsi instituée une obligation de négociation collective préalable à toute loi sociale. Depuis lors, les syndicats se considèrent comme législateurs aux côtés du législateur sinon à sa place. Mais le poison était déjà dans le préambule de la Constituions de 1946 qui a transformé le droit de travailler sans discrimination en droit « au » travail en affirmant que « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». La relation entre le salarié et l’employeur s’est fondu alors dans des négociations collectives dont les syndicats ont revendiqué le monopole ( Cf. Jacques Garello). Ainsi a été légitimée la démocratie sociale qui substitue la dictature des syndicats à la liberté des contrats.
Une puissance syndicale inversement proportionnelle à sa représentativité
Une telle substitution est d’autant plus inadmissible que les syndicats dits représentatifs par les vertus de la loi ne représentent pas grand monde. Dans sa dernière étude, datée du 21 décembre 2021, la direction de l’Animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), explique qu’en 2019, « 10,3 % des salariés déclarent adhérer à un syndicat, 11,0 % des hommes et 9,5 % des femmes, en France (hors Mayotte) ». Il y aurait 18,4 % de syndiqués dans la fonction publique et 7,8 % dans le secteur privé. Entre l’âge de 40 et de 49 ans, le pourcentage moyen est de 12,6 % et à partir de 50 ans, il remonte à 14,7 %. Chez les plus jeunes, les moins de 30 ans sont seulement 2,7 % à adhérer à un syndicat. C’est dire que l’avenir syndical est sombre en France. Les salariés se détournent des syndicats, qui s’occupent moins de leur sort que de politique et d’idéologie. Trop d’organisations syndicales œuvrent à l’encontre des entreprises avec l’argent des contribuables et des employeurs qui les financent pour l’essentiel, puisque les cotisations ne représentent sans doute pas plus de 10% de leurs ressources et que ces cotisations donnent droit au bénéfice des cotisants à un crédit d’impôt de 66%. Par comparaison les cotisations comptent pour 80% des ressources des syndicats en Europe du nord où le taux de syndicalisation est très élevé : 49% en Autriche, 67,5% au Danemark, 60% en Finlande, 50% en Norvège, 65,5% en Suède… Mais les syndicats nordiques rendent des services, eux !
La démocratie sociale est une démocratie dévoyée
A l’instar des démocraties dites populaires, la notion même de démocratie sociale est dangereuse parce qu’elle est floue et sans limite, et qu’elle accorde des droits excessifs à des minorités agissantes qui dénaturent ainsi la démocratie plus qu’ils ne la consolident.
Ainsi, les syndicats, qui ne représentent en France qu’à peine plus de 5 % des électeurs, s’arrogent indument le droit d’imposer leurs positions, archaïques d’ailleurs, par la rue quand ils n’y arrivent pas par la négociation. Ou ils utilisent des procédés déloyaux comme ceux qui consistent à faire faire la grève à de très petits groupes de salariés « clés » dans leur secteur pour bloquer tout un pays. Ainsi quand une partie des aiguilleurs des voies ferrées – 3000 emplois sur les 270 296 employés de la SNCF en 2021 – se mettent en grève, ils interrompent tout le trafic ferroviaire et bloquent la France.
La démocratie repose sur la règle de la majorité dans le respect des droits de tous. Il est souhaitable qu’elle recherche les consensus et le dialogue préalablement à toutes décisions difficiles, mais il ne faut pas qu’elle tombe pour autant sous la tyrannie des minorités. Elle ne remet pas le pouvoir directement entre les mains du peuple, mais elle lui permet d’élire régulièrement des représentants pour décider en son nom. En transportant le pouvoir dans les mains des syndicats comme de quelconque convention citoyenne et autre Conseil national de la refondation (CNR), la République affaiblit la démocratie plus qu’elle ne la renforce ou la renouvelle. Les représentants du peuple y perdent leur crédibilité et leur légitimité abandonnées à ces comités populaires dont l’histoire a montré l’habituel dévoiement.
Il est utile qu’il y ait des contre-pouvoirs dans les entreprises comme ailleurs, mais pour autant qu’ils soient contributifs. Il est temps de limiter le pouvoir destructeur des syndicats en cantonnant leur action au monde de l’entreprise et sans entraver le travail de ceux qui ne partagent pas leurs opinions.
13 commentaires
Le vrai problème de la France c’est certainement cette « . La Constitution de 1958 leur en a fixé l’horizon en proclamant que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Cela ne peut fonctionner qu’un temps et reste qui que l’on dise une belle réussite communiste.
Quand un État décide de la politique économique d’un pays, c’est forcément un pays communiste d’ailleurs le montant de la dette de la France suffit à le confirmer.
En parfait accord ! Bien à vous. Merci.
Alors il faut descendre dans la rue pour expliquer à ceux qui sont descendus dans la rue que la rue n’est pas une tribune autoritaire ni représentative mais qu’elle appartient à tout le monde y compris à ceux qui vont descendre dans la rue pour expliq…..
En principe, l’existence de syndicats est utile au bien commun, ce sont des corps intermédiaires, et il en est trop peu en France, où le pouvoir central est omniprésent. A ce titre, il est bon qu’ils soient subventionnés par les finances publiques, c’est à dire les impôts que nous payons. Mais il faudrait que les subventions qu’ils reçoivent soient limitées aux adhésions qu’ils touchent; ainsi ils seraient forcés de chercher davantage de représentativité, et on verrait quelles sont les véritables forces syndicales en présence. De plus, limiter les droits de grève serait une bonne chose, la non-violence et la recherche du bien commun étant toujours les critères à appliquer.
Supprimez les subventions aux syndicats et le problème sera vite réglé. Un syndicat politisé devient un parti politique, ni plus, ni moins. De plus ces syndicats sont systématiquement destructeurs. Je n’ai jamais vu un syndicat politisé avoir des vues positives ou constructives, particulièrement à gauche, même si cela existe à droite également. Le représentant syndical, en France, n’étant plus vraiment salarié, mais plutôt rentier, n’a aucun intérêt à faire dans le positivisme. Il faut qu’il crée son indispensabilité, d’où les revendications incessantes et très souvent males fondées, comme dans la fonction publique d’ailleurs.
Bien d’accord ! Il faudrait supprimer les subventions aux syndicats, rendre l’adhésion des salariés à un syndicat obligatoire : nous gagnerions en représentativité, la majorité silencieuse étant enfin représentée, et nous responsabiliserions des gens qui vivent au chaud sur la bête…
Les syndicats devraient être financés que par les adhésions des syndiquées et non pas par nos impôts !
J’ai travaillé plusieurs années à la DRH d’un groupe de 9 500 salariés en France. Une équipe dédiée de 16 personnes avait en charge la gestion des relations au quotidien avec les instances représentatives du personnel. On imagine le coût de cette équipe pour l’entreprise. Des salariés payés à temps plein pour ne faire que de la représentation syndicale. Un autre coût pour l’entreprise.
Pas une semaine sans une réunion avec les instances. En 10 ans, la CGT n’a jamais signé un seul accord d’entreprise, affichant une obstruction systématique. Parler de négociation dans un tel contexte est tout simplement du non-sens.
Demander que les syndicats ne vivent que des adhésions est le même non sens que demander aux partis politiques de ne vivre que de leurs adhésions.
Les syndicats comme les partis ne tirent leur légitimité que des voix obtenues lors des scrutins.
Je ne suis pas du tout persuadé que dans les cortèges de manifestations que dans les meetings politiques tous les gens présents soient encartés.
Effectivement, si toutes les décisions prises par ceux que nous avons élus vous plaisent alors vous êtes libre d’aller manifester votre soutien.
Puisque vous parlez de contrats, celui passé par le peuple avec lui même par le biais de ses élus n’en est il pas un ?
Si vous supprimez les subventions pour tous les syndicats, seul le « marché » parlera et de nombreuses organisations fermeront. Un grand bonheur pour la France ! car ces gens là n’apportent rien sauf les grèves !
Retraité du BTP, ex responsable d’un service levages spéciaux dans les grands travaux, offshore, grands ouvrages, ponts etc…je fais partie de ceux qui ont subi les nuisances de ces syndicats extrémistes, véritables destructeurs d’entreprises.
J’ai hélas des exemples dramatiques et assisté à la disparition d’entreprises performantes! Comment est-il supportable qu’une minorité non représentative puisse bloquer une entreprise, voir le pays?
A 82 ans, je n’ai toujours pas compris que cette calamité n’ait pas pu être balayée?
Cher BUCK, pour balayer il faut savoir ce qu’est un balai et surtout savoir (ou vouloir) s’en servir. De puis l’avènement de Giscard en 19774, période que vous avez bien connue, comme moi, le courage est le grand défaut de TOUS nos politiciens. Aujourd’hui c’est l’enlisement total avant la faillite… affaire à suivre…