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Trop d’impôt sur le capital tue le capital et l’impôt

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Un second rapport du Comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital a été publié ce 8 octobre pour poursuivre l’analyse des réformes engagées notamment au titre de la transformation de l’ISF en IFI et de l’instauration du Prélèvement forfaitaire unique et libératoire de 30% -le PFU- sur les revenus du capital mobilier. Ce Comité conclut globalement, et avec prudence bien sûr, que trop d’impôt sur le capital peut aussi tuer le capital et coûter à l’Etat.

La baisse de l’imposition des revenus mobiliers.

En 2018, les taux implicites d’imposition sur le capital (revenus et stocks) étaient en France les plus élevés d’Europe selon les travaux de la Commission européenne (2020). Ils s’élevaient à 55,1 %, contre 33,9 % au Royaume-Uni, 30,6 % en Allemagne, 29,9 % en Italie et 25,9 % en Espagne. Et la part des prélèvements sur le capital (ménages et entreprises) dans le PIB était encore en France de près de 11% tandis qu’elle était à 8,5% en moyenne dans l’UE et de 7% en Allemagne.
Le Comité constate que les réformes de 2018 ont conduit à ramener à des niveaux proches de la moyenne les taux des prélèvements français sur les actifs mobiliers, notamment pour les contribuables les plus aisés : « Avec la mise en place du PFU et la suppression de l’ISF, la France rejoint de fait la situation majoritaire des pays où les revenus de capitaux mobiliers sont imposés à un taux unique (« flat tax ») et où il n’existe pas d’imposition annuelle sur le patrimoine mobilier ». Ce qui a induit des effets bénéfiques.

Stop aux exils fiscaux

Depuis le passage de l’ISF à l’IFI, on observe une baisse du nombre d’expatriations et une hausse du nombre d’impatriations fiscales de ménages français fortunés observe le Comité. Déjà l’annonce faite par M Macron pendant sa campagne présidentielle de supprimer l’ISF avait réduit le nombre de départs à l’étranger de redevables, à moins de 400, soit un niveau inconnu depuis 2005. En 2018, le nombre de départs recensés a encore diminué de plus de moitié, à un peu plus de 150. « Les ménages les plus fortunés, indique le Comité, sont beaucoup plus nombreux que les autres à être restés imposables à l’IFI. S’ils sont par ailleurs les plus susceptibles de partir à l’étranger pour des raisons fiscales, alors la baisse observée du nombre de départs en 2018 devient un fait significatif ». Le nombre de redevables à l’IFI ayant quitté le territoire durant l’année 2018 s’établit à 163 alors qu’il a été de l’ordre de 700 à 900 dans les années noires des mandats Sarkozy et Hollande. D’autant que par ailleurs, la trajectoire des retours de contribuables français fortunés est à la hausse depuis deux ans. Chacune des deux années 2016 et 2017, il avait été enregistré une centaine de retours de contribuables devenus assujettis à l’ISF ou à l’IFI, selon les cas, au 1er janvier de l’année suivante. En 2018, il y a eu près de 250 retours de contribuables devenus assujettis à l’IFI au 1er janvier 2019. Pour la première fois depuis le début des années 2000, le nombre de retours de redevables excède celui du nombre de départs. Certes, ces chiffres peuvent mélanger des choux et des carottes car dans ceux qui partent et qui reviennent, il y a aussi ceux qui le font dans le cadre de leur situation professionnelle, personnelle ou familiale indépendamment de tout mobile fiscal. Mais les chiffres sont néanmoins suffisamment significatifs pour que la conclusion puisse en être tirée que c’est bien l’Effet Laffer qui a fonctionné.

Le remplacement de l’ISF par l’IFI devait coûter 3,2 milliards au budget de l’État. Mais les recettes de l’IFI ont été supérieures aux prévisions. Au lieu de 850 millions de recettes d’IFI attendues en 2018, le produit en a été de 1,2 Md€ en 1918 et de 1,6 Md € en 2019. Certes, c’est moins que ce que rapportait l’ISF (4,1 Md€ en 2017), mais si on prend en compte les avantages indirects (emplois, revenus, investissements…) liés à l’arrêt de l’exil fiscal, voire au retour des exilés fiscaux, c’est un gain annuel de long terme sans doute très supérieur.

La hausse des produits de l’impôt sur les dividendes

L’analyse du rapport fait également ressortir, suite à la baisse du taux d’imposition des dividendes, une forte hausse des dividendes reçus par les ménages en 2018, même si d’autres causes peuvent aussi y avoir contribué. A l’inverse d’ailleurs, il avait été constaté une forte baisse des dividendes versés notamment aux personnes physiques lors de la réforme de 2013 qui avait rehaussé sensiblement les taux d’imposition des dividendes.
En 2013, à comportements inchangés, la suppression du Prélèvement Forfaitaire Libératoire, PFL, et la mise au barème des dividendes aurait dû engendrer un gain de recettes pour les finances publiques autour de 425 millions d’euros. Mais la suppression du PFL a en fait entraîné une contraction de la base fiscale, soit une réduction de 70% des dividendes, conduisant à une perte sèche pour les finances publiques entre 1,1 et 2,1 milliards d’euros.

C’est évidemment l’inverse pour le PFU en 2018. Celui-ci a abaissé le taux marginal supérieur d’imposition des dividendes reçus et rapproché la fiscalité du capital de la France de celles des autres pays industrialisés (telles qu’elles étaient en 2016), notamment de l’Allemagne, du Royaume-Uni et des États-Unis. Cette baisse de la fiscalité a conduit à des hausses sensibles de dividendes versés en 2018 et 2019 pour dépasser les 40 milliards d’euros ( 9 Md€ de plus en 2018 par rapport à 2017, et encore 3 Md€ de plus en 2019) et le niveau atteint en 2012, qui ont généré d’importants revenus fiscaux. Le coût budgétaire du PFU avait été estimé à un montant de 0,8 à 0,9 Md€ (hausse de CSG concomitante comprise) hors effet de comportement. Mais eu égard aux effets de comportement qui ont généré cette hausse des dividendes, les experts du Comité notent qu’en définitive, « on ne peut pas exclure que la perte d’impôt sur le revenu pour l’Etat puisse même être nulle ». D’autant que cette hausse des dividendes ne semble pas avoir eu d’effets sur les politiques d’investissement des entreprises et n’a pas été compensée par une diminution par les chefs d’entreprise de leurs autres revenus d’activité.

Encore un effort, M. Le Président !

Laffer avait raison quand, avant l’élection de Reagan, il avait soutenu qu’au-delà d’un certain niveau d’imposition, excessif et variable selon les pays et les époques, l’augmentation des taux d’imposition réduit le revenu fiscal car il modifie les comportements et pèse sur l’activité économique, et vice-versa. Les réformes de l’ISF et du PFU le démontrent. Malheureusement, la position de la France reste en revanche inchangée sur les actifs immobiliers. L’imposition du capital immobilier locatif reste environ deux fois plus élevée que celle sur le capital mobilier pour les revenus supérieurs. Encore un effort, M. le Président.

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