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Quand l’entreprise se mêle de la manière dont ses salariés viennent au travail

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Les entreprises françaises connaissent une mauvaise passe. Les défaillances sont au plus haut, les annonces de licenciements se multiplient, des fermetures d’établissements sont annoncées. Les causes en sont multiples : le contexte politique français, la fiscalité exorbitante, la conjoncture économique. Et bien sûr la réglementation envahissante, la plus perverse étant sans doute celle qui contraint les entreprises à s’occuper de ce qui ne devrait pas les regarder.

A cet égard, les obligations des entreprises relatives à la mobilité dite « durable » de leurs salariés sont révélatrices du néo-paternalisme que l’État tente d’imposer.

Élaborer un plan de mobilité employeur

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) publiée au Journal officiel du 18 août 2015 oblige toutes les entreprises regroupant plus de 100 personnes sur un seul site à mettre en place un plan de mobilité à partir du 1er janvier 2018.

La loi d’orientation des mobilités (LOM) publiée au Journal officiel le 26 décembre 2019 assouplit et étend tout à la fois la mesure puisqu’elle instaure l’obligation de traiter des déplacements domicile-travail dans le cadre des négociations annuelles obligatoires (NAO) pour les entreprises de plus de 50 salariés à compter du 1er janvier 2020. Si les négociations échouent, l’employeur est tenu de réaliser un plan de mobilité (PDME).

 Ce PDME a pour objectif d’optimiser et d’augmenter l’efficacité des déplacements liés à l’activité de l’entreprise, en particulier ceux de son personnel, dans une perspective de diminution des émissions de gaz à effet de serre, des émissions de polluants atmosphériques et de la congestion des infrastructures et des moyens de transports (bouchons, etc.). Il doit encourager et faciliter l’usage des transports en commun, du covoiturage, des mobilités actives (marche, vélo, etc.) ; et sensibiliser le personnel aux enjeux de l’amélioration de la qualité de l’air.

Le plan de mobilité employeur doit évaluer l’offre de transport existante et projetée ; analyser les déplacements entre le domicile et le travail et les déplacements professionnels ; contenir un programme d’actions adapté à la situation de l’établissement, un plan de financement et un calendrier de réalisation des actions ; préciser la manière dont son suivi et ses mises à jour seront assurées.

Le PDME doit être transmis à l’autorité organisatrice de la mobilité (AOM) territorialement compétente, c’est-à-dire l’agglomération dans laquelle est située l’entreprise.

Financer des services en tout genre

De multiples organismes ont publié des guides pour expliquer aux employeurs tout l’intérêt qu’ils pouvaient avoir à mettre en place un PDME et leur donner des exemples de bonnes pratiques.

Il leur est, par exemple, recommandé :

  • d’autoriser deux jours de télétravail par semaine ;
  • d’aménager les horaires de travail pour éviter les heures de pointe ;
  • de faire appel à une « asso vélo » pour des séances de coaching ou de « remise en selle » ;
  • de distribuer des kits de sécurité pour les salariés venant à vélo ;
  • de fournir du matériel de gonflage et de dépannage ;
  • de proposer un service gratuit d’entretien de vélos personnels ;
  • de prendre en charge les abonnements aux services de parkings pour vélo en gare pour les salariés prenant le train ;
  • d’installer des vestiaires avec douches pour ceux qui viennent à vélo ;
  • de développer un service de covoiturage en interne ;
  • de mettre en place une navette d’entreprise ;
  • d’offrir le taxi en cas d’empêchement exceptionnel (par exemple, intempéries pour les cyclistes ou défaut du conducteur en cas de covoiturage) ;

Rappelons que les employeurs participent déjà aux déplacements domicile-travail de leurs salariés puisqu’ils ont l’obligation de rembourser les frais d’abonnement aux transports publics de personnes ou services publics de location vélos à hauteur de 50% du montant de l’abonnement. Cette prise en charge est exonérée de cotisations et de contributions sociales. Elle n’est pas soumise à l’impôt sur le revenu pour le salarié.

Par ailleurs, les entreprises d’au moins 11 salariés sont assujetties au versement mobilité (VM), basé sur la masse salariale, recouvré par l’Urssaf pour alimenter le budget de l’autorité organisatrice de la mobilité (AOM) dans le ressort territorial duquel se trouve l’entreprise. Ce VM permet de financer les transports en commun.

Les employeurs sont aussi encouragés à verser un forfait mobilité durable (FMD) à leurs salariés afin « d’encourager l’utilisation de mobilités moins polluantes ». Peut ainsi être prise en charge l’intégralité ou une partie des frais liés à l’utilisation de certains moyens de déplacement (au choix de l’employeur : vélo personnel et moyen de déplacement motorisé tel que trottinette électrique, gyropode, mono-roue, hoverboard, etc. ; covoiturage ; auto-partage ; etc.) pour leurs trajets domicile-travail. Le FMD bénéficie d’une exonération de cotisations sociales dans la limite de 600€ par an et par salarié (et jusqu’à 900€ pour ceux qui bénéficient déjà de la prise en charge de leur abonnement de transport en commun). Le salarié est exonéré d’impôt sur le revenu dans la même limite.

Ajoutons que l’entreprise a la possibilité de prendre en charge tout ou partie des frais de carburant d’un véhicule et des frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou hydrogène engagés par ses salariés. Elle prend la forme d’une prime carburant, exonérée de cotisations sociales dans la limite de 300 € par an et par salarié.

Si l’entreprise dispose d’un parking, elle doit désormais aménager des espaces réservés aux bornes de recharge pour les véhicules électriques. Pour les bâtiments existants, depuis le 1er janvier 2025, si le parking a au moins 10 places, il convient d’installer un point de recharge (dont le dimensionnement permet l’accès aux personnes à mobilité réduite). Un point de recharge est ensuite requis toutes les 20 places supplémentaires. Pour les bâtiments neufs ou en construction, les parkings de plus de 10 places doivent comporter au moins une place sur cinq prééquipée à la recharge électrique.

Enfin, si l’entreprise est propriétaire ou locataire unique d’un bâtiment existant à usage de bureau dont la capacité de stationnement automobile est supérieure ou égale à 10 places, elle a l’obligation de réserver un espace sécurisé pour les vélos. Pour les bâtiments neufs, l’espace vélo est obligatoire quel que soit la taille du parking.

Des mesures perverses

Toutes ces dispositions sont d’une grande perversité. D’abord, elles coûtent cher et mobilisent des ressources humaines précieuses qui ne sont pas au service du développement de l’activité de l’entreprise.

Par ailleurs, elles contraignent l’employeur à se mêler de la vie privée de ses salariés. Selon son lieu de résidence et le moyen de transport qu’il choisit pour venir au travail, le déplacement du salarié peut ainsi coûter plus ou moins cher à l’employeur. Le risque est alors, lorsqu’il recrute, de choisir un collaborateur en prenant en compte ces paramètres.

Il pourrait alors tomber sous le coup des mesures anti-discriminations. Le Code du travail est très clair à ce sujet : « Les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi, ne peuvent avoir comme finalité que d’apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles » (articles L. 1221-6 et suivants). Par conséquent, le lieu de résidence du candidat et le moyen de transport qu’il compte utiliser pour venir au travail (article L. 1132-1) ne doivent pas entrer en ligne de compte.

Encore une injonction contradictoire qui ne peut qu’être préjudiciable aux entreprises. Supprimons d’urgence le plan de mobilité employeur et toutes contraintes qui vont avec !

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17 commentaires

Jean-Aymar de Sékonla 24 janvier 2025 - 9:39 am

Si après cela on n’a pas compris que la France est dans les mains d’imbéciles instruits, et que c’est cela qu’il faut changer, il n’y a plus d’espoir!
Les Gens de l’AOM me copieront 100 fois:
1- La France n’est que pour 0,85% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
2- La France n’est que pour 0,85% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
3- La France n’est que pour 0,85% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

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BERNARD HENOU 24 janvier 2025 - 12:19 pm

100 fois, ce n’est pas assez, je dirais 1000 fois

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Michele Goudeau 25 janvier 2025 - 8:13 am

Il s’agit d’une idéologie dont on leur a bourré le crâne : il faudrait changer les têtes mal-pensantes

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Thoma 24 janvier 2025 - 10:46 am

Avec toutes ces contraintes et ce mille feuilles administratifs abusif je comprend maintenant pourquoi de plus en plus d’entreprises mettent la clef sous le paillasson.

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BERNARD HENOU 24 janvier 2025 - 12:17 pm

Une entreprise doit produire des biens ou des services, toute action qui alourdit les charges inutiles de l’entreprise la condamne à perdre des marchés. ce n’est pas son rôle de payer le trajet de ses employés de payer des tickets repas de ses employés, de ne plus pouvoir choisir ses employés selon leur compétence mais selon leur genre ou leur couleur. Ce n’est pas les employés ou l’administration qui créent les emplois mais les chefs d’entreprise

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Astié J.P. 26 janvier 2025 - 2:45 pm

+10000

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Andy Vaujambon 24 janvier 2025 - 12:30 pm

On se demande ce que Trump ou Milei feraient de ça…

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Virgile 24 janvier 2025 - 12:52 pm

Est ce que les français sont débiles pour se livrer à de telles stupidités?

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sadoul 27 janvier 2025 - 3:28 pm

Bonjour
Sans doute que oui

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MOUQUET 24 janvier 2025 - 1:40 pm

Là dessous oil y a le travail de sape des syndicats, on le sait bien qu’ils cassent l’outil de travail, alors arrêtons..

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jacques lemiere 24 janvier 2025 - 1:46 pm

Etat contrôlant l’énergie… possibilité d’état qui devient totalitaire et utilitariste…

mais bon… comment vont il empêcher la montée des partis qui disent non …on arrête ça..

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Guillot 26 janvier 2025 - 9:42 am

Voilà un machin cet AOM à supprimer dare-dare

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F G 26 janvier 2025 - 1:31 pm

Néo-maternalisme !!

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Lombled 26 janvier 2025 - 5:59 pm

La France est sous l’emprise d’une idéologie polico-écolo-socialo-islamiste et va droit dans le mur. Çà remplace le communisme qui a échoué à conquérir le monde, alors on est passé à faire peur au citoyen lamda.

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sadoul 27 janvier 2025 - 3:28 pm

C’est exact

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Albatros 27 janvier 2025 - 12:48 pm

Encore une des nombreuses séquelles des conneries militantes écologistes depuis le Grenelle. Cette LTECV issus d’une “convention citoyenne” non-démocratique devrait être purement et simplement abrogée.
Question : ce texte a-t-il été sérieusement attaqué pour son caractère anticonstitutionnel ?

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AlainD 28 janvier 2025 - 11:31 am

Nous vivons dans un monde qui ressemble de plus en plus à 1984 de George Orwell. Mais pourquoi acceptons nous d’appliquer les décisions de quelques imbéciles… Si demain j’avais la possibilité de créer une entreprise ce n’est certes pas en France que je m’établirais. Les obsédés du dérèglement climatique et leurs utopies sont en train de mettre ce pays en faillite.

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