Jean-Philippe Delsol, avocat, président de l’Iref, essayiste (Civilisation et libre arbitre, DDB, mai 2022) propose de mettre en place un système de retraite par capitalisation qui serait à même d’emporter l’adhésion des Français tout en assurant le niveau de vie des pensionnés.
Une réforme des retraites est nécessaire. M. Macron a pris courageusement le risque de s’y engager. Il veut à juste titre la mener tambour battant pour éviter que s’installent dans la grève et les manifestations les oppositions stériles qui ne manqueront pas de surgir. Malheureusement, il manque à son projet le souffle qui aurait pu sauver à long terme le système des retraites et donner envie aux Français d’y adhérer.
Le rapport du Conseil d’orientation des retraites (Cor) présenté ce 15 septembre 2022 note que si le système de retraite a enregistré des excédents en 2021 et 2022, il devrait être déficitaire en moyenne sur les 25 années suivantes, quels que soient les scénarios économiques retenus. Et s’il prévoit qu’à plus long terme, de 2032 jusqu’à 2070, « malgré le vieillissement progressif de la population française la part des dépenses de retraite dans la richesse nationale serait stable ou en diminution », c’est en misant sur une dégradation du niveau de vie des retraités rapporté à celui de l’ensemble de la population, qui passerait de 101,5 % en 2019 à une fourchette entre 75,5 % et 87,2 %, en 2070. Ce qui est une perspective déprimante pour les jeunes d’aujourd’hui.
Les dépenses publiques de retraite crèvent le plafond
Par ailleurs, ce que le Cor, dont le rapport a été préparé par une armée de fonctionnaires, n’avoue pas, c’est que les régimes de retraite de la fonction publique coûtent une fortune au contribuable. Un certain équilibre des régimes publics n’est obtenu que par un taux de cotisation de l’État employeur sur les salaires des fonctionnaires de 74,3 % (126 % pour les militaires) quand il est de 16,5 % dans le privé. Selon une estimation sérieuse, la “surcotisation” publique, excédant la cotisation de droit commun des employeurs privés de 16,5 %, a été de 45 milliards d’euros en 2020. En sus, l’argent public a contribué la même année pour 70 milliards d’euros à combler les déficits de divers régimes (agricoles, spéciaux) et à couvrir diverses dépenses de solidarité ou des exonérations ciblées de cotisations. Soit des concours publics en faveur des retraites de 115 milliards d’euros pour un total de prestations versées, tous régimes confondus, de 338 milliards d’euros la même année, soit 14,7 % du PIB.
Manifestement, les retraites coûtent donc un « pognon de dingue » au contribuable. La part des dépenses publiques de retraite dans le PIB français est de près du double de la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) : elle est de 4,6 % au Canada, 7 % aux États-Unis, 5,2 % en Australie. Alors que le gouvernement fait face à des dépenses qui explosent avec un « quoi qu’il en coûte » à répétition et qu’il a promis de ne pas augmenter les prélèvements fiscaux, qui sont déjà au sommet, il ne lui restait donc plus qu’à essayer de réduire sensiblement les déséquilibres des retraites pour gagner quelques marges de manœuvre.
Il faut une réforme structurelle, et pas juste jouer sur les paramètres
Mais la réforme annoncée se limiterait à reporter de 62 à 65 ans l’âge d’ouverture des droits à la retraite, à élargir la prise en compte de la pénibilité et à fixer un montant minimal de pension de 1 100 euros par mois. Elle ne fera ainsi que reporter le problème de quelques années alors que la démographie française est sur une pente alarmante. Et en imposant les 65 ans, elle va braquer toute la gauche et le monde syndical.