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Présidence de Jair Bolsonaro : quel bilan ?

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Dimanche 2 octobre 2022 a eu lieu le 1er tour de l’élection présidentielle brésilienne. Ils étaient 11 candidats mais l’attention s’est portée sur deux d’entre-eux : le président sortant Jair Bolsonaro qui a obtenu 43,20 % des suffrages et Luiz Inácio Lula da Silva, 48,43 % des voix. Ce résultat contredit ainsi les sondages qui voyaient Lula l’emporter dès le premier tour. L’ancien président travailliste (à la tête du pays de 2003 à 2011) est mis en cause dans plusieurs affaires judiciaires, notamment pour corruption, blanchiment d’argent, détournement de fonds publics et entrave à l’exercice de la justice. Ces accusations l’ont mené en prison en 2018 avant qu’il soit libéré pour des questions de procédures.

A la même date se sont déroulées les élections parlementaires du Brésil. Le parti libéral de Bolsonaro devient le premier parti à la Chambre des députés avec 99 représentants et 16,54 % des voix, soit 19 députés et près de 2,5 points de plus que la coalition de gauche (80 députés et 13,93%). Il devient également le premier parti au Sénat. Une victoire donc pour Bolsonaro qui obtient de meilleurs résultats qu’en 2018 et élargit son influence. Même s’il n’était pas réélu, le « Bolsonarisme » continuerait d’exercer une influence importante dans la politique brésilienne.

Au second tour de la présidentielle, qui aura lieu le 30 octobre, Lula est donné vainqueur avec 53 % contre 47 % pour Bolsonaro. Mais, là encore, la fiabilité des sondages est discutable et discutée.

Un bilan marqué par la gestion du coronavirus et les « excès » de Bolsonaro

Bien que la désinformation soit forte concernant la gestion de la crise du covid-19 au Brésil, cette dernière relevant en grande partie des gouverneurs et non du gouvernement brésilien et du président, Bolsonaro est fortement critiqué sur ce point, comme Donald Trump. Au 12 octobre 2022, le nombre de décès liés au covid-19 était de 3 232 au Brésil par million d’habitants contre 3 218 aux Etats-Unis. C’est un nombre très élevé, mais loin derrière ceux du Pérou (6 576), de la Hongrie (4 890), de la Géorgie (4 550) ou encore de la République Tchèque (3 863).

Jair Bolsonaro a été accusé de ne pas vouloir faire vacciner sa population contre le covid-19, mais les chiffres montrent qu’à tout le moins, elle ne l’a pas écouté. Au 11 octobre 2022, 81,1 % de la population brésilienne avait un schéma vaccinal complet contre 78,8 % pour la France. Si Bolsonaro s’est opposé au vaccin, cela n’a pas empêché sa femme d’être vaccinée.

Tout comme l’ancien président américain, il est aussi contesté pour ses propos parfois outranciers et lunaires. Il avait déclaré, en 2021, que le vaccin produit par Pfizer pourrait transformer des gens en « crocodile », faire pousser de la barbe au menton des femmes et donner « des accents efféminés » aux hommes !

Côté économie, si le PIB a décru en 2020 en raison de la pandémie de covid-19, la croissance était de 4,6 % en 2021. Elle est de 2,4 % pour les six premiers mois de 2022. Parallèlement, le PIB (réel)/habitant s’est globalement maintenu : 8582 $ en 2018, 8622 $ en 2019, 8228 $ en 2020 et 8551 $ en 2021.

Les dépenses publiques ont diminué légèrement entre 2018 et 2021, malgré une forte augmentation en 2020, covid oblige. Ainsi, le taux de dépenses publiques par rapport au PIB est passé de 37,70 % à 35,94 %. Nous sommes loin des 59,20 % français. Néanmoins, pour rattraper son retard dans les sondages, Jair Bolsonaro a avancé des propositions populistes. Il proposait notamment de modifier les règles de dépenses publiques après les élections d’octobre afin de faire de la place pour davantage investir dans les infrastructures. En avril dernier, il a évoqué la possibilité d’élever le plafond des dépenses, mesure centrale dans les finances publiques du Brésil. Approuvé par le Congrès brésilien en 2016, modifiant ainsi la Constitution, ce plafond doit limiter la croissance du budget fédéral au rythme de l’inflation. Toutefois, Jair Bolsonaro affirme dans son programme économique qu’il baissera les impôts, simplifiera le système fiscal et continuera les privatisations et les ouvertures à la concurrence. Le président Bolsonaro est celui de la diminution de la dette: alors qu’elle ne cessait de croître pour atteindre 98,68 % du PIB en 2020, pour la première fois depuis 2013, elle est retombée à de 93,01% en 2021. La dette (qui a augmenté de plus de 30 points depuis 2013 !) sera un gros défi pour le futur président.

La politique de Bolsonaro, vu comme le président des riches, a en réalité bénéficié à la partie la plus pauvre du Brésil. En effet, selon les statistiques de la Banque Mondiale, la part de la population vivant avec moins de 1.90 $ par jour — ce que l’on appelle la grande pauvreté — a drastiquement diminué, passant de 5,3 % en 2018 à 1,9 % en 2020. La criminalité, qui touche en priorité les populations pauvres, est également en chute libre. Le nombre d’homicides intentionnels pour 100 000 habitants est ainsi passé de 31 en 2017 à 22 en 2020.

Le point noir, pour nous occidentaux et Européen, c’est la « neutralité » de Bolsonaro par rapport au conflit ukrainien et l’agression néo-soviétique de Poutine. Ce n’est guère mieux, si ce n’est pire, du côté du socialiste Lula qui considère que Volodymyr Zelensky et l’OTAN sont aussi  responsables de la guerre que Vladimir Poutine.

Une légère avancée pour les libertés économiques

Comme nous venons de le montrer, la politique économique mise en place par Jair Bolsonaro a eu quelques effets positifs. La crise et la pandémie du covid-19 ont, comme dans tous les pays, impacté fortement le Brésil. Pour approfondir cette analyse du bilan du président membre du Parti Libéral, nous pouvons consulter l’évolution de l’indice de liberté économique calculé par l’Heritage Foundation. Dans le cas du Brésil des années 2018 à 2022 nous remarquons que l’indice global des libertés a légèrement augmenté, de 51.4 en 2018 à 53.3 en 2022. A titre de comparaison au niveau régional, le Brésil fait mieux que l’Argentine (50.1 en 2022) mais demeure loin, très loin derrière le Chili (74.4).

Si l’on regarde de plus près chacun des indicateurs qui composent cet indice, on note une amélioration de la majorité d’entre-eux.

Evolution des indicateurs[1] de l’indice de liberté économique sur la période 2018-2022Source : https://www.heritage.org/index/heatmap

L’évolution de l’indice de liberté économique est donc globalement positif, avec une amélioration de 7 indicateurs contre seulement 4 indiquant une dégradation. Pour autant, on est en droit d’être quelque peu déçus sachant que cette évolution est l’œuvre d’un gouvernement qui se revendique libéral et dont le président s’affiche comme un lecteur assidu de Frédéric Bastiat et de Ludwig von Mises. Un vrai gouvernement libéral n’aurait pas laissé se détériorer le droit de propriété et n’aurait pas alourdi (ne serait-ce que de façon minime) la charge fiscale sur les contribuables.

Le bilan de la présidence de Jair Bolsonaro est donc en demi-teinte mais globalement positif. Un Brésil qui élirait Bolsonaro le 30 octobre prochain serait un Brésil qui choisirait de continuer son chemin vers une économie plus libre pour un développement plus rapide. En outre, le Parlement étant plus favorable à ce programme aujourd’hui qu’en 2018, les réformes devraient s’accélérer. Les avantages de la politique « bolsonarienne » semblent l’emporter sur les inconvénients, en tête desquels on trouve la personnalité de M. Bolsonaro. Si « Bolsomito », ainsi que l’appellent ses partisans, perd, cela ne sera pas à cause de son bilan économique mais de sa personnalité trop clivante.

[1] Un score plus élevé signale une meilleure performance dans le domaine

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4 commentaires

Boisgontier 27 octobre 2022 - 12:03

Vois passee un peu trop sous silence la destruction systématique de la forêt et la volonté de réduire au maximum les tribus indiennes à néant alors qu’elles représentent la population d’origine! C’est comme si les immigrants en France se débarrassaient des Français sous prétexte qu’ils sont devenus majoritaires.

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Obeguyx 27 octobre 2022 - 5:22

Monsieur BOISGONTIER, il faut arrêter de lire les torchons des gauchos et des écolos et revenir à plus de simplicité. Le Brésil est un Etat souverain (au grand dam des démocrates américains) et il faut leur laisser le temps de retrouver un équilibre économique. C’est pourquoi l’article d’Aymeric est particulièrement bien construit et permet d’espérer. Si vous voulez parler encore des Indiens, parlons des Apaches et des Sioux et d’autres encore … Soyons sérieux, diantre.

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Paton 30 octobre 2022 - 7:03

Comment peut-on passer sous silence la déforestation galopante au Brésil ??
L’avenir de ce poumon vert est plus important que vos pourcentages ridicules. Soyez plus réaliste dans vos articles, en y’a marre des articles qui ne vont pas au fond des choses …
Faites votre vrai métier de journaliste une bonne foi, engagez-vous un peu plus et arrêtez de faire du 20h!!!

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Nicolas Lecaussin 30 octobre 2022 - 4:01

La déforestation au Brésil sous les gouvernements Lula, 20.000 km2 par an ; sous Bolsonaro, 11.000 km2.

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