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Russie : Emmanuel Macron instrumentalise-t-il les peurs ? 

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Emmanuel Macron est accusé de toutes parts de profiter de la crise ukrainienne pour attiser la peur. Vrai ou faux ?

Pour une grande partie de notre classe politique, la cause semble entendue : Emmanuel Macron profite une nouvelle fois d’évènements, en l’occurrence la guerre en Ukraine et la menace russe supposée, pour instrumentaliser les peurs à son profit.

Sans être exhaustif, de l’extrême droite à l’extrême gauche, les hommes politiques comme les commentateurs analysent de manière proche les dernières déclarations du chef de l’État. Prenons trois exemples :

  • Le 6 mars, sur BFMTV, le coordinateur de La France Insoumise, Manuel Bompard, allègue que le Président de la République « utilise la peur pour imposer aux Français des sacrifices sociaux » ;
  • Le 10 mars, sur CNews, Henri Guaino, l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, constate une « politique de la peur » adoptée à l’Elysée ;
  • Le 11 mars, c’était au tour de Marine Le Pen, également sur BFMTV, de caractériser Emmanuel Macron comme un « professeur de gestion de la peur ».

Mettons de côté une critique aisée qui relèverait que certains de ces personnages ne manquent pas de toupet à reprocher au chef de l’État une instrumentalisation des peurs dont ils sont orfèvres, et demandons-nous plutôt si Emmanuel Macron est ou non coupable de tels faits. La réponse est double : le Président est effectivement coutumier de cette tactique, mais en l’espèce la menace est réelle et il est dans son rôle de la dénoncer.

En premier lieu, l’histoire de la pensée nous démontre que l’État a partie liée avec la peur. C’est pour conjurer la peur de la mort attachée à l’état de nature, autrement dit à l’anarchie, que, au XVIIe siècle, Thomas Hobbes fait de l’État la puissance terrifiante qui éloignera la violence de la guerre civile ou des envahisseurs. Beaucoup plus tard, les libéraux vont mettre en garde à l’unisson contre les abus des hommes de l’État prêts à tout pour renforcer leur pouvoir. Ils constateront que les périodes de crise, avec au premier chef les guerres, sont les plus dangereuses pour les libertés, non seulement car les hommes politiques accroissent leurs attributions pour juguler les crises, mais encore parce que l’État ne revient jamais vraiment dans son lit une fois la crise passée.

En ce sens, le fait qu’Emmanuel Macron ait profité de la crise sanitaire, puis de la crise ukrainienne, pour, suivant les cas, renforcer ou retrouver sa légitimité, ne saurait surprendre et il nécessite la plus grande vigilance des citoyens.

Mais, en second lieu, peut-on sérieusement prétendre que la menace russe ne pèse pas sur le pays ? Nous n’avons pas rêvé quand Vladimir Poutine a brandi à répétition la menace d’utilisation de la force nucléaire, non seulement contre l’Ukraine, mais parfois aussi à l’encontre de tout autre pays, pour ne prendre que quelques exemples les 29 février, 25 septembre ou encore 28 novembre 2024. Nous n’avons pas plus rêvé lorsque le dictateur russe a adopté le 19 novembre de l’année dernière un décret élargissant la possibilité de recourir à l’arme nucléaire. Nous n’avons pas plus rêvé devant les multiples mensonges et manquements à sa parole de la part du pouvoir russe, dans la pure tradition soviétique, que ce soit à propos de la Géorgie, de la Crimée ou encore de l’Ukraine.

Dès lors, Emmanuel Macron, en sa qualité de chef des armées, était dans son rôle lorsqu’il a dénoncé les agissements d’une des plus grandes puissances militaires au monde, située à seulement 2.400 kilomètres de nos frontières et détentrice d’un nombre considérable de têtes nucléaires. Toute autre position eût été contraire aux attributions constitutionnelles du chef de l’État.

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15 commentaires

Rob 15 mars 2025 - 9:00 am

On ne peut que partager votre article sur le danger pour les libertés et la démocratie de l’exploitation des peurs par Macron ainsi que la nécessaire défense contre les volontés impérialistes de la dictature de Poutine.
Oui Macron a raison de pousser au réarmement face aux agissements russes. Mais qui a détruit systématiquement depuis 10 ans l’industrie française ? Qui a réduit le budget des armées ? Qui a poussé et accompagné l’avachissement du pays dans tous les domaines ?

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Jean-Aymar de Sékonla 15 mars 2025 - 9:08 am

Mais enfin, laissez le donc faire la seule chose qu’il croit savoir faire! (mal)… le théâtre et la com.

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Roven 15 mars 2025 - 9:42 am

Dès le début Macron s’est fait élire sans programme, uniquement sur la peur que représenterait l’extrême droite, et il a continué sa trajectoire purement narcissique sur cette base, laissant entendre qu’il protège les français, alors qu’il ne s’occupe que de sa précieuse personne, non du pays dont tous les services et le budget sont à terre…

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BERNARD SORET 15 mars 2025 - 9:57 am

Rien ne favorise autant l’exercice du pouvoir que l’ignorance et son corollaire la peur. (André Georget)

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Stioui 15 mars 2025 - 10:52 am

« La peur. Histoire d’une idée politique. »
Remarquable ouvrage de Corey Robin, paru il y a vingt ans.
Je l’ai fait lire à des générations d’étudiants.
De Hobbes à Arrendt, en passant par Montesquieu ou Tocqueville, tout y est, y compris l’actualité de l’époque.
Je suis étonné qu’aucun commentateur n’y fasse référence…

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Duhamel 15 mars 2025 - 10:59 am

La guerre a commmencé il y a 3 ans et c’est au bout de 3 ans qu’il réalise que l’on doit se réarmer par prudence ???? Macron et les autres réagissent beaucoup plus vite quand il s’agit de Pognon . On a les mêmes qu’en 1938

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Mijuna 15 mars 2025 - 1:07 pm

C’est sa façon de se mettre en valeur : souvenons nous de la guerre contre le covid

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Hela Pernollet 15 mars 2025 - 1:15 pm

l’utilisation de la peur est une tactique bien connue depuis longtemps; encore bien avant l’histoire fausse du covid etc .
En tout cas ça marche, à nos petits ”cons” en haut, il ne reste que ça pour se faire valoir! C’est bien triste . l’arme nucléaire n’est qu’un moyen de menace en paroles !

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LYBD 15 mars 2025 - 1:16 pm

Je n’accuserai pas Mr Macron de profiter d’une situation de la crise militaire. les situations servent à avancer.
Pour son cas, si il parle bien, il a abimé la France pour une période durable et de concurrence internationale exacerbée.
Il veut vraiment finir son CDI pour trouver une nouvelle place. Il peut même retourner chez son banquier.
Il souhaite chapeauter la nouvelle armée européenne. A cela il s’impose mais son crédit est insuffisant. Pour le moins il devrait s’attacher à redresser la France. QUE NENNI A PRIORI.
Il change de maison au Touquet et c’est bien.

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NOEL 15 mars 2025 - 1:30 pm

Nous sommes largement plus menacés par l’importation migratoire que par la Russie .

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n'ont pas encqu'une entreprise c'est comme un bateau , sauver le bateau c'est sauver les marins , 15 mars 2025 - 2:01 pm

Le président MAcron veut jouer au CHEF et il va ( en parole ) prendre des décisions . Des décisions qui auraient dues être prises en 2022 il y a 3 ans !!!!! Contre Poutine il veut jouer les gros bras !!!!!!!
Et avec l’Algerie Mr Macron ,c’est vous qui êtes ridiculisé , comment voulez vous alors qu’un Poutine vous écoute !!!!!

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Boutté 16 mars 2025 - 8:32 am

Les Français auraient nommé Chef des Armées quelqu’un qui n’a jamais porté l’uniforme ? Comment se peut-il ?

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BOUTE 16 mars 2025 - 9:02 am

La réponse à cette question se trouve dans la description de la personnalité du président toxique faite dans le livre éponyme paru le mois dernier chez Robert Laffont

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gillet 16 mars 2025 - 9:06 am

C’est le moment pour Macron de retrouver un peut de crédibilité,le 11 mars il a mouillé sa chemise devant les chefs d’état major des pays qui veulent prendre leurs responsabilités.

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MIMOSAS 16 mars 2025 - 10:43 am

Le souci n’est pas tant qu’il dénonce ce risque, le souci est qu’il le fasse ad nauseam. Avec son ton insupportable. Et pile au moment où on n’a jamais été aussi près de la paix.
Et qu’il passe sous silence le vrai danger, « vrai » car déjà sur notre sol et déjà à l’attaque : l’islamisme. Celui-là, non seulement il ne le combat pas, mais il le réfute. Il s’aplatit carrément devant le président algérien.
Et désormais son garde des sceaux veut nous fait croire que la Russie est responsable de l’assassinat de Samuel Paty. Lunaire.
Et scandaleux.
Qu’il prenne le même ton martial pour dire qu’il va combattre l’islamisme partout, et qu’il le fasse. Il avait dit que 100% des OQTF serait exécutées ? Mais voilà, peur des émeutes, peur de perdre la face, il préfère agiter un risque lointain, certes à surveiller, que s’attaquer au vrai risque existentiel de notre pays.
2 poids, 2 mesures.
Pathétique.

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