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L’agitation de Trump pourra affaiblir l’Amérique autant que l’Europe. Sauf sursaut de celle-ci.

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Trump
Le 24 février dernier, les États-Unis ont voté, avec la Russie, la Corée du Nord, nombre d’affidés africains de Moscou et la Hongrie, contre une résolution demandant le retrait de la Russie du territoire ukrainien.

Le 28 février, Trump a mis en scène son altercation avec Volodimir Zelenski dans le Bureau ovale et décidé d’une « pause » dans l’envoi de matériel militaire et de renseignements américains à l’Ukraine. C’est donc un ultimatum lancé au président ukrainien pour accepter un cessez-le-feu aux conditions américaines. Si l’Ukraine possède encore des armes pour se battre quelques semaines ou mois, cette décision l’affaiblit considérablement et offre la victoire sur un plateau à la Russie qui pourtant peine à gagner du terrain en Ukraine.

Cet abandon américain sera aussi une défaite de l’Occident qui ouvrira la route à d’autres invasions de la Russie dans les pays Baltes, en Géorgie, en Moldavie… comme de la Chine à Taiwan ou ailleurs. L’Amérique, qui a garanti l’Ukraine contre toute agression russe par le mémorandum de Budapest de 1994, renie sa parole. Elle perd ainsi sa crédibilité et fait peser une menace sur tous ses alliés. Cet abandon a l’odeur de celui de Munich en 1938 quand la France et l’Angleterre ont mis le feu au monde en conférant à l’Allemagne le droit d’envahir le territoire tchèque des Sudètes.

Certes, rien n’est jamais définitif avec Trump. Tour à tour il a, vendredi 7 mars, menacé la Russie de sanctions supplémentaires et de nouveaux droits de douane, avant de louer Vladimir Poutine pour sa « générosité ».

L’Amérique s’est rebellée contre les excès du wokisme en s’abandonnant à un populisme primaire. Elle n’en ressortira pas grandie. D’autant qu’en augmentant sans préavis et significativement les droits de douane, elle risque de relancer l’inflation aux Etats-Unis et de mettre dans l’embarras nombre de ses propres industries. Certes, à peine avait-il édicté des droits de douane contre le Mexique et le Canada, que Trump en a remis l’application. Mais cette versatilité ne fait que créer de l’incertitude nuisible à l’économie.

 L’Europe s’éveille

L’Europe a perçu le danger mais peine à réagir. Elle s’agite. Ses dirigeants organisent des sommets successifs à Londres, à Bruxelles, à Paris. M. Macron dit avec force aux Français que « la Russie est devenue une menace pour l’Europe et pour la France » et dénonce ses attaques sur les réseaux sociaux ou autrement. Les avions russes s’en prennent désormais aux armements français et anglais dans les airs. Une très large majorité de pays européens se disent prêts à renforcer leur défense. Mais avec quels moyens ?

Emmanuel Macron a annoncé des « investissements supplémentaires » de défense, mais sans augmenter les impôts. François Bayrou a affirmé qu’il voulait maintenir notre modèle social. Ils cherchent des solutions innovantes qui se résument à un grand emprunt… européen. Ursula von der Leyen l’a intégré dans son plan de 800 milliards d’euros en faveur de la défense européenne partagé ce 8 mars par le Conseil européen qui est également convenu d’exonérer les dépenses militaires nouvelles des règles européennes de limitation des déficits (à 3% du budget et 60% du PIB…) ouvrant encore les vannes à des déficits mis à la charge des générations futures.

L’idée d’un grand emprunt cache l’impuissance européenne, pour le moins celle de la France dont le déficit public s’est aggravé et atteint près de 175 milliards d’euros, soit 6 % du PIB en 2024 après 5,5% en 2023 et 4,7% en 2022. La dette publique s’élève désormais à  3 300 milliards d’euros soit 113,8 % du PIB contre 81,6 % en moyenne pour l’Union européenne. Selon la Cour des comptes, sans effort substantiel le ratio d’endettement pourrait dépasser 125% du PIB en 2029. Les agences de notation s’en inquiètent et Standard § Poor’s vient de donner une « perspective négative » à la note de la France.

Dans cette situation tout emprunt massif nouveau affaiblira notre pays. Que cet emprunt soit obtenu via l’Europe ne changera rien au fait qu’il devra être remboursé par les Français pour leur part.

Un vrai effort de guerre

Les procédures européennes sont lentes et longues. Le fait que la Commission veuille aujourd’hui réaffecter à l’armement des enveloppes déjà existantes, notamment des fonds d’aide aux régions les plus défavorisées de l’UE, prouve son incapacité à dépenser ses propres fonds. La volonté de multiplier les emprunts européens n’a qu’un seul but consistant à renforcer la centralisation européenne et à obliger les Etats à augmenter à terme les ressources fiscales de l’Europe pour rembourser les emprunts qu’elle aura souscrits.

Certains pays européens ont encore des capacités d’emprunt. La France n’en a plus. Un véritable effort de guerre consisterait à réduire nos dépenses publiques, et notamment sociales (33% du PIB), pour affecter nos ressources à notre réarmement. Certains l’ont compris mais si timidement ! Comme M. Lecornu qui propose de recentrer l’Etat sur ses missions en cessant de financer les plans vélos !

Donald Trump a raison de considérer que les Etats-Unis ne devraient pas venir au secours des pays qui ne dépensent pas assez pour leur propre défense : « S’ils ne paient pas, je ne vais pas les défendre ». Il nous rend service en nous rappelant à nos responsabilités. Il peut permettre à l’Europe de prendre en main son destin et, ainsi, de se faire respecter dans le monde, et d’abord des Russes, des Chinois mais aussi désormais des Américains qui lorgnent le Panama, le Canada, le Groenland…

Alors que les Etats-Unis pourraient perdre de leur puissance dans la confusion de leurs dirigeants, l’Europe pourrait saisir l’occasion pour retrouver la sienne. Car rien n’est jamais définitif dans l’histoire du monde. Le déclin des nations s’accompagne, selon Toynbee, de la « Némésis de la créativité » selon laquelle faute de pouvoir relever ses défis, le peuple tombe dans « l’idolâtrie d’une personnalité éphémère ». Mais on peut espérer avec l’historien anglais Gibbon que la division de l’Europe en dizaines de nations souveraines multipliera « les chances de talents » et favorisera le renouveau incessant de l’Europe dans ce que Pareto appellera plus tard la « circulation des élites ». A condition bien sûr que l’Europe ne tombe pas dans la tentation impériale et centralisatrice, sache redonner à ses citoyens la maîtrise de leur vie et se concentre sur ses dépenses régaliennes et notamment de défense à l’heure où elle est attaquée par ceux qui font fi de la liberté.

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13 commentaires

patrick ricaud 10 mars 2025 - 9:14 am

bonjour
non la Russie ne pêne pas en Ukraine elle veut simplement prendre les régions russophone avec le moins de perte possible
p.ricaud

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Nicolas Lecaussin 10 mars 2025 - 11:08 am

La Russie n’a même pas réussi à prendre Pokrovsk qui devait tomber fin août ! Il s’agit d’une petite localité d’environ 7000 habitants !

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Boisgontier 10 mars 2025 - 6:52 pm

les régions russophones! Il faut quand même se rappeler que la Russie a procédé régulièrement à des transferts de population pour modifier les proportions d’autochtones et de Russes afin, par la suite, d’affirmer que les régions ainsi repeuplées sont “russes” et prétendre à une “juste reprise en mains” dr ces régions. A titre d’exemple, l’Allemagne avait l’intention au début de la première guerre mondiale, si elle avait été victorieuse, de se saisir de 9 départements du Nord de la France et d’en chasser les Français pour les remplacer par des Allemands. Aurions-nous alors validé ces départements repeuplés comme départements allemands??

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Boutté 11 mars 2025 - 1:15 pm

Comparaison sans fondement : le territoire appelé Ukraine ne s’individualise qu’en ce siècle après avoir appartenu à tous ses voisins. On peut apprécier cette intention saluée par la Pologne, un de ses Maîtres parmi tant d’autres mais nous n’en sommes qu’au moment du baptême et l’enfant reste en péril .

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Nicolas Lecaussin 11 mars 2025 - 3:16 pm

Si elle appartenu, elle a retrouvé son indépendance. La Russie avait bien appartenu au royaume de Kiev…

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Boisgontier 10 mars 2025 - 9:20 am

L’Europe se trouve depuis un certain temps dans une situation similaire à celle des états allemands à l’époque napoléonienne. Une myriade d’états indépendants, de niveaux économique, politique et militaire extrêmement divers et pour beaucoup jouissant d’une excellente culture. Jaloux de leur indépendance, ces états n’ont pas réalisé à temps que seule l’union de leurs forces pouvait les protéger de la puissance napoléonienne. Il a fallu, pour cela, attendre Bismarck et Guillaume II. Pendant la Première Guerre Mondiale, il a fallu attendre 1918 pour que les alliés se résolvent à nommer un chef en la personne de Foch. l’Europe n’a pas d’autre choix que de s’unir et réussir le tour de force de conserver à la fois ses particularismes et trouver le moyen de nommer des personnes compétentes à sa tête au moins dans les domaines militaire, économique et politique.

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Marly 10 mars 2025 - 9:39 am

Quel est le projet de l’UE à ce jour capable de fédérer l’enthousiasme de ses citoyens ? Une question abyssale.

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Yves Heulenote- Poh 10 mars 2025 - 10:12 am

Désolé mais je ne peux partager pleinement votre point de vue . Vous semblez considérer que la construction d’une Défense européenne est possible alors qu’il faudrait pour y parvenir une unité inexistante , des moyens homogènes dans chacun des Etats membres et une même vision politique de l’état de Guerre instrumentalisé lamentablement par Macron , qui lui ne cherche qu’à exister.
En dehors de cela , croyez vous que les 27 Etats membres soient aussi fous que la France de vouloir accroître encore leur endettement ? Macron s’en moque , il n’est pas français , il est européen et en plus n’a pas d’enfant.
Quant au commandement de cette Force Armée , dans quelle langue et par qui ?

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Nicolas Lecaussin 10 mars 2025 - 11:04 am

Lors de la dernière réunion, tous les 27 pays ont été d’accord pour augmenter leurs dépenses militaires.
Cordialement,

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Boisgontier 10 mars 2025 - 7:04 pm

Difficile de discuter avec des personnes qui ne connaissent pas suffisamment l’histoire, n’ont pas suffisamment de psychologie, refusent d’ouvrir les yeux sur la réalité …

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C.Geoffroy 10 mars 2025 - 1:17 pm

Quelle que soit la valeur des arguments exposés, cet article me gêne un peu par son ton alarmiste, aux effets comme le discours du Président contre-productifs : on a tendance à se détourner de ce qui empêche de penser dans le calme, sereinement…
Bien cordialement

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palef 10 mars 2025 - 1:45 pm

Une source de revenus importants et d’économie facile, se trouve dans la suppression des gaspillages liés à la décarbonation. Bizarre que personne n’ose en parler ! Il s’agit quand même de dizaines (centaines ?) de milliards d’euros sacrifiés à un dogme et qui sont dramatiquement indispensables à d’autres causes, dont la Défense.

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LYBD, 12 mars 2025 - 8:17 am

MR Trump agite le bocal. Premier gagnant, c’est l’Europe qui va devoir se réveiller. La commission européenne est un frein et une stratégie perdante (ex: voiture électrique). Pour le reste Trump agite la scène internationale et nous verrons ce qu’il en restera. Pour l’Ukraine l’Europe doit s’engager de suite en faisant cesser un faux marchandage avec Poutine.
La population américaine s’étonne de ce qu’il se passe.( cf Mr Malhuret).

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