Le philosophe Michel Onfray vient (encore !) de publier un livre : La Foudre gouverne le monde (Paris, Albin Michel), le huitième tome de sa série intitulée « Journal hédoniste ». Il y défend notamment un « socialisme libertaire » inspiré de Proudhon, qui ne serait ni le capitalisme prétendument « sauvage », ni le communisme.
Dans le chapitre 6, « D’une infamie langagière », Michel Onfray nous parle (quelle originalité !) du peuple qui « subit la loi (de la mondialisation libérale) violemment », lequel ne connaîtrait aujourd’hui que « paupérisation, précarisation, pauvreté, misères tous azimuts (…) » (p. 106).
Michel Onfray se trompe : si échange il y a, c’est parce que les deux parties y trouvent leurs intérêts respectifs, sans quoi l’échange n’aurait pas lieu. Si quelque chose doit être qualifié de « sauvage », ce serait plutôt le vol ainsi que les excès de fiscalité sur les revenus et le patrimoine, qui nient sans vergogne les droits de propriété de l’individu. L’échange apparaît au contraire comme une forme civilisée et pacificatrice des rapports entre les êtres humains. Ensuite, Michel Onfray se vautre dans le cliché selon lequel le capitalisme libéral serait nécessairement synonyme d’aggravation de la misère et d’accroissement des inégalités. Johan Norberg, parmi bien d’autres, n’a cessé de rappeler depuis la parution de son livre Plaidoyer pour la mondialisation libérale (Plon, 2004) que le capitalisme de laissez-faire est globalement bienfaisant à l’échelle de la planète entière, et ce à de très nombreux plans : grâce à lui, 138 000 personnes de par le monde et par jour parviennent à sortir de l’extrême pauvreté. Celle-ci est d’ailleurs passée de 29,1 % de la population mondiale en 2000 à 8,4 % de cette même population en 2022 – laquelle a cru durant la même période de plus de 1,5 milliard de personnes. Et de 65,19 ans qu’elle était en 1990, l’espérance de vie mondiale est montée à 71,33 ans en 2021.
Voici enfin comment Michel Onfray caricature un peu plus loin dans le même chapitre le capitalisme libéral et ses effets : « Destruction de la Nation, écroulement de l’État, fissures dans la République, il s’agit d’en finir, dit-il, avec un modèle social qu’on présente comme archaïque, dépassé, ringard, afin de promouvoir le modèle anglo-saxon du communautarisme, du marché faisant la loi à l’école, à l’hôpital, à l’armée, dans les librairies, à la télévision, à l’université, dans le sport, le modèle de la compétition devenant celui du pays tout entier » (p. 107). Plusieurs remarques s’imposent : d’abord, le libéralisme n’implique pas « l’écroulement de l’État », mais au contraire son renforcement dans les limites de sa sphère d’intervention légitime que constitue le régalien (justice, police, armée). D’autre part, le libéralisme ne défend aucun « communautarisme à l’anglo-saxonne » mais bien plutôt la capacité des individus à se déterminer eux-mêmes et à interagir librement entre eux, à la fois dans le respect de leurs intérêts respectifs et au bénéfice du plus grand nombre. Enfin, c’est justement parce qu’il n’y a pas assez de liberté et de concurrence aussi bien à l’école qu’à l’hôpital ou dans les universités que nos « services publics » vont mal aujourd’hui et ne satisfont plus les demandes des « usagers ».
10 commentaires
L’accusateur public n’a certainement jamais mis les pieds dans une usine de production.J’ai vu comment l’Espagne est sortie de la précarité ,grâce aux implantations de grosses entreprises internationales
Cépafo.
Si l’État restait à sa place, se contentant d’assurer ses missions régaliennes, sans avoir la main mise sur la redistribution de l’ensemble de la richesse produite par les français pour les « protéger » (asservir), cela éviterait peut-être les débats philosophico-économiques sur son intervention abusive ou son retrait total.
On se prend à craindre que les technocrates n’aient trop bien compris le sens de la servitude volontaire et que les citoyens gâtés demandent à rester liés par une laisse financière toujours plus épaisse… Jusqu’au jour où ils vont devoir payer, mais on vit aujourd’hui dans l’immédiateté. La disparition programmée de l’État nounou sera incompréhensible pour nos assistés qui croient qu’ils suffit de taxer les autres pour remplir les caisses. Ils tenteront alors de prendre par la force ce à quoi on leur a fait croire qu’ils ont droit, le chaos financier renforçant alors le chaos institutionnel… Comme quoi un seul homme, fanatique de lui-même, peut mettre un pays par terre. L’histoire a connu d’autres impérieux mais ils savaient, au moins, s’entourer de Vauban, de Cambacérès et de Portalis pour bâtir notre pays : que restera-t-il de la présidence solitaire actuelle ? Un pays désuni, un déficit abyssal, des institutions affaiblies.
Je n’ai jamais compris la haine du libéralisme de M Onfray. Je crois qu’il a malheureusement des préjugés indélébiles alors que c’est un homme passionnant par ailleurs. En édifiant Proudhon de près on voit qu’il est passe d’un anarchisme stupide a une vision du role de l’état qui est exactement celui du libéralisme. Proudhon passe pour un socialiste alors qu’il est vraiment un liberal avec un capitalisme contrôlé. Dommage que M Onfray se fourvoie. La haine n’est jamais bonne conseillère.
L’art est difficile, la critique est facile! Je suppose que vous ne faites pas parti de l’extreme pauvreté..
Je suppose que vous ne faites pas partie vous non plus de l extrême pauvreté…..🤗🤗🤗
le problème du libéralisme c’est de considérer l’homme comme un individu alors qu’il est un « animal » social qui vit en société. le libéralisme nie le collectif au seul profit de l’individuel.
Vous ressortez le sempiternel vieux poncif libéralisme = individualisme dont nous rebattent les oreilles les vieux etatistes
Argumentez votre propos factuellement…
Cher Monsieur,
Merci pour votre commentaire.
Vous avez raison de dire que le libéralisme est fondé sur l’individualisme. Mais celui-ci n’exclut nullement la vie en société. Sur ce sujet, vous pouvez vous reporter si vous le souhaitez aux livres et articles du philosophe Alain Laurent.
Bien cordialement
M. Creson
Onfray comme d’autres surfe sur une puissante vague en France qui a ses bases dans l’absence de formation économique, et lorsque la discipline est enseignée elle l’est par des intellectuels rêveurs ou malhonnêtes dont les bases reposent sur un collectivisme digne du début du xx siècle. Même Keynes passe pour un ultra libérale à leurs yeux ils ont construit toute leur vie sur ce principe et leurs « fans » se retrouvent principalement dans les couches les plus pauvres et les moins instruits de la société , ceux qui ont une revanche a prendre sur la vie et qui croient que ces solutions populistes vont les aider. Sans parler des intellectuels pour qui être de gauche leur donne l’impression de défendre les malheureux ce qui est évidemment totalement faux.