Elu depuis plus de 27 ans député de la Marne, Charles de Courson était un parlementaire centriste mais reconnu par tous pour sa compétence fiscale, sa probité et son élégance qui soutenaient son indépendance. Il semble qu’il se dévoie désormais.
Selon Le Figaro du 24 décembre, il estime que le prélèvement sur les hauts revenus « ne pose pas de problème, puisque cela consiste à s’assurer que tout le monde paye au moins 20 % de son revenu ». L’imposition exceptionnelle des bénéfices des très grandes entreprises, n’en poserait pas plus car ce serait selon lui une mesure d’égalité entre les petites et très grandes entreprises.
Outre le fait que l’égalité n’est pas en principe dans l’inégalité d’imposition des uns et des autres, le soutien de M de Courson à des mesures de rétroactivité fiscales ne peut tenir qu’à son ambiguïté depuis que, député peut-être de ne pas être ministre, il soutient trop souvent l’opposition de LFI au Président de la République. Pour le moins, il se renie joliment.
Dans une proposition de loi organique enregistrée à l’Assemblée nationale le 7 novembre 2017 Monsieur Charles de Courson visait « à limiter en droit le recours à la loi rétroactive » notamment pour les lois de finances. Son article premier posait le principe de la non-rétroactivité des dispositions relatives aux prélèvements obligatoires tout en reconnaissant que le Conseil constitutionnel le limitait déjà de mieux en mieux.
Dans son rapport sur cette proposition de loi, le 31 mars 2021, M. Charles de Courson rappelait en effet ceci: « Outre le respect du principe de non-rétroactivité des sanctions fiscales plus sévères, les dispositions fiscales rétroactives doivent également être justifiées par un motif d’intérêt général dont le Conseil constitutionnel assure le contrôle depuis la fin des années 1980. Ce motif d’intérêt général doit présenter un caractère « suffisant », ce qui n’est pas le cas d’un motif « purement financier » tel que l’augmentation des recettes fiscales perçues par l’État » (Cf. décisions du Conseil constitutionnel des 29 décembre 1988, n°88-250 DC, 29 décembre 1998 n° 98-404 DC, 28 décembre 1995, n° 95-369 DC).
Et dans son intervention devant la Commission des lois constitutionnelles à cette même date du 31 mars 2021 il complétait son propos en considérant que « la rétroactivité fragilise la confiance des contribuables envers l’État. Elle nuit d’ailleurs à la crédibilité des règles fiscales instaurant de nouveaux régimes fiscaux spéciaux, dans la mesure où l’instabilité de ces dispositifs peut dissuader les investisseurs d’y recourir ». Et il citait « le grand juriste Paul Roubier, qui considérait, au milieu du XXe siècle, que « le principe de la non-rétroactivité des lois est entré dans le patrimoine commun des peuples civilisés ». Il posait donc la question « de savoir si nous sommes civilisés ou partiellement civilisés ».
Nous pensions que M de Courson était civilisé. Il faut craindre qu’il ne le soit désormais que partiellement.