De nombreux articles ont été consacrés ces derniers jours au fait qu’après avoir remporté l’élection présidentielle, Donald Trump – avec les républicains majoritaires au Sénat et à la Chambre – aurait les « pleins pouvoirs ».  Ces allégations sont stupéfiantes pour tout juriste qui se respecte et plus encore pour tout constitutionnaliste digne de ce nom. Car il faut surtout rappeler que les États-Unis ne sont pas la France et que le président américain n’est pas le chef de l’État français.
Certes, un président des États-Unis dispose d’importants pouvoirs, lesquels peuvent toutefois varier en fonction du contexte. Mais ce n’est pas parce que Donald Trump aura un Sénat républicain et une Chambre des représentants également républicaine que la fonction législative sera mise au pas. D’ailleurs, on vient d’en avoir une première preuve : c’est le sénateur John Thune qui a été élu chef de la majorité républicaine au Sénat alors que le favori de Donald Trump, le sénateur Rick Scott, a été éliminé dès le premier vote, n’obtenant que 13 voix. De même, ce n’est pas parce que six des neuf juges à la Cour suprême sont de sensibilité conservatrice, avec des variations au demeurant, que Donald Trump pourra interpréter à son aise la Constitution.
Notre maître, Stéphane Rials, écrivait déjà il y a exactement 40 ans que les États-Unis étaient « un régime en droit congressionnel à présidence généralement forte aujourd’hui » (Pouvoirs, n° 29, 1984, p. 45). Il ajoutait que si le Congrès était « incapable d’agir sans doute », il pouvait « tout empêcher » (p. 47). Ces mots n’ont pas vieilli.
Certains journalistes qui n’ont pas ménagé leurs critiques envers le candidat républicain, semblent aujourd’hui trouver des vertus au droit comparé… Ils oublient cependant l’importance des contre-pouvoirs outre-Atlantique, lesquels subsisteront quoi qu’ils en disent : le Congrès, on l’a relevé, quelle que soit la majorité dans les deux chambres ; la fonction judiciaire, si forte ; les médias ; enfin, l’opinion publique. Ils oublient également la prégnance du fédéralisme.
Deux autres points sont totalement mis sous le boisseau par certains journalistes. D’une part, le fait que la Chambre des représentants se renouvelle intégralement tous les deux ans, à mi-mandat présidentiel. D’autre part, le fait que Donald Trump soit, selon le jargon constitutionnel américain, un canard boiteux (lame duck), autrement dit un président qui ne pourra pas se représenter en 2028 et qui, dès lors, perdra progressivement de son influence.
Donald Trump, un président puissant, oui ; doté des « pleins pouvoirs », certainement pas et heureusement comme dans tout régime libéral !
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Les journalistes de nos jours ont perdu toute éthique, alors que la déontologie de la profession impose une rigoureuse conformité avec la réalité, dont ils sont sensés informer les lecteurs!