En matière de sécurité, la comparaison avec l’Allemagne n’est pas à l’avantage de la France. Une tribune de Pierre Buigues, professeur à l’université de Toulouse, dans le Figaro Vox présentait, l’année dernière, des chiffres issus d’Eurostat et du Conseil de l’Europe. Citons-en quelques-uns :
- vols qualifiés pour 100 000 habitants : 150 en France / 50 en Allemagne ;
- vols de voiture pour 100 000 habitants : 250 en France / 160 en Allemagne ;
- homicides pour 1 million d’habitants : 12,9 en France / 8,7 en Allemagne (un taux français sous-évalué car les « agressions menant à la mort » ne sont pas comptabilisées comme des homicides alors que c’est le cas en Allemagne).
Cela alors que les deux pays comptent approximativement la même proportion de policiers (3 pour 1 000 habitants en Allemagne et 3,3 en France), et qu’ils ont un niveau identique de leurs dépenses consacrées aux missions de sécurité (1,7 %).
Comment, dans ce cas, expliquer un tel écart entre les taux de délinquance des deux pays ? Un article de la revue Études du mois de mai 2024 insiste beaucoup sur la différence de culture et de pratique des deux polices que nous ne détaillerons pas ici. Il apporte aussi des explications relatives à l’organisation, ainsi qu’au recrutement et à la formation des agents.
Alors que la police française est centralisée dans les mains d’un seul ministère, l’allemande est essentiellement affaire des Länder (même s’il existe deux polices fédérales aux effectifs réduits). C’est sans doute cette organisation décentralisée qui rend la police allemande plus efficace. Elle permet, en outre, de fragmenter les « enjeux de police » : un « scandale policier survenant en Saxe sera traité par le gouvernement et le parlement du Land, mais ne sera pas enjeu de passions à l’échelle du pays tout entier, amenuisant de fait la politisation de l’institution policière ». De fait, le pouvoir d’influence des syndicats de police est, lui aussi, morcelé.
Ensuite, en Allemagne, les jeunes souhaitant entrer dans la police postuleront dans leur Land de résidence ou celui de leur choix. Ainsi connaissent-ils « le paysage social du pays dans lequel ils aspirent à être affectés, à la différence du système français où 80 % des recrues sont destinées à l’Île-de-France alors que seulement 20 % des élèves gardiens de la paix en viennent ». Par ailleurs, en France, les jeunes candidats au métier de policier reçoivent une formation de douze mois (ramenée à dix mois en année olympique ou en années post-attentats pour « mettre au plus vite du bleu dans la rue »). En Allemagne, la formation policière dure trois ans.
Peut-être avons-nous là quelques pistes pour améliorer le fonctionnement de la police française.