Il n’est pas certain que ce soit un autre Eric-Emmanuel Schmitt que l’on découvre à la fin de son pèlerinage en Israël. Il est frappant de voir comme le début de son journal de voyage révèle un égocentrisme sans limite, une faiblesse charnelle . Le lecteur est vite irrité par cette répétition du « je » si méfiant vis-à -vis des services cultuels, si soucieux de mettre l’humain avant le divin, si sceptique quant à la véracité des lieux honorés, si érotique de voir dans la grotte de Nazareth rien d’autre qu’ « un vagin désiré, recherché.. ». Et pourtant un miracle commence à  sourdre dans le plus grand des secrets. Sans doute émane-t-il des vergers ratissés par Charles de Foucauld le jardinier, de la cellule ascétique de St Jérôme le traducteur, de la végétation luxuriante de Capharnaüm avant de se cogner contre la laideur du mur de Jérusalem ou de ressentir la chaleur du Saint-Sépulcre ou celle d’une apparition divine en pleine nuit! Ce qui importe c’est la réflexion qu’engendrent ces découvertes, c’est la distinction entre les interprétations historique, allégorique et spirituelle, c’est l’envol de la pensée après tant de temps et d’espaces parcourus. La confiance en l’Esprit finit par l’emporter sur la Lettre.
La rencontre avec « l’Incompréhensible »advient. Selon l’auteur «  L’Invisible se révèle plus reconnaissable que lorsqu’Il s’est rendu visible ». Précieux guide à emporter pour un voyage en Terre Sainte ou tout simplement, comme le conseille le pape François dans la postface, pour laisser entrer Dieu en nous ! Mais la prégnance de l’immanence chez l’auteur demeure et le danger est grand. Car l’enfer n’est-il pas pavé des meilleures intentions et la fragilité des sensations erratique ?