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Vincent Bolloré face au Sénat, l’entreprise face au politique : un fossé qui ne se comble pas

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Le 19 janvier, la commission d’enquête du Sénat a interrogé l’homme d’affaire Vincent Bolloré au sujet de son empire médiatique. Le but de cette commission est d’évaluer l’impact de la presse dans notre pays, les phénomènes de concentration qui se développent, d’en comprendre les raisons et d’en analyser les conséquences. Celles-ci affectent le secteur économique mais aussi et surtout l’exercice de la démocratie, le pluralisme, la liberté et l’indépendance des médias. Tout un programme donc, auquel s’est appliqué à répondre le 14ème homme le plus riche de France.

Le rapporteur David Assouline (PS) s’inquiète de la « concentration » médiatique opérée par Vincent Bolloré ; il l’accuse en outre d’interventionnisme et d’avoir un management plus directif que celui des autres capitaines d’industrie ayant investi dans les médias. Vincent Bolloré ayant démontré point par point que ces assertions n’étaient pas fondées, qu’est-ce qui dérange vraiment ce sénateur socialiste ?

Peut-être tout simplement ce qu’a rappelé l’industriel : depuis son arrivé dans le groupe familial, le chiffre d’affaires est passé de 20 millions d’euros à 20 milliards, et le nombre d’employés de 800 à 80 000 personnes. C’est-à-dire en fait, un succès fulgurant basé sur le travail et sur une dynastie familiale, deux bêtes noires de la gauche française.

L’ambition naturelle des entreprises : le développement et le profit

La stratégie médiatique de Vincent Bolloré semble tout-à-fait cohérente : face au soft power américain, à tous les contenus qui viennent des Etats-Unis et qui sont toujours à peu près les mêmes, il souhaite exploiter tout ce que le vivier de la culture française peut offrir et exporter. Un chemin qu’il a entamé depuis vingt ans dans les medias. Il espère apporter grâce aux contenus européens une autre vision, non seulement à conserver pour le respect de notre passé mais surtout à exporter. Les adversaires internationaux du groupe Vivendi (qui pèse 15 milliards de capitalisation boursière) sont les GAFA, Netflix, Sony, Disney, Apple et Amazon. Ils bougent beaucoup plus vite et sont beaucoup plus gros que lui. Sur le marché intérieur, on est également loin d’une menace hégémonique : Canal est le 5ème acteur du marché avec 6,3%. En ce qui concerne l’information, il n’y a que CNEWS qui perce vraiment, avec 1M en audience moyenne. Europe 1 est à la 8ème place. Le groupe n’est même pas présent dans la presse nationale payante et dans la presse du dimanche le groupe Lagardère est 7ème. Quant à l’édition, Editis est le 19ème acteur. Lorsqu’il analyse son action sur le marché français, Vincent Bolloré explique : « Notre intérêt n’est pas politique, pas idéologique, c’est un intérêt purement économique ; depuis 20 ans le groupe s’est construit uniquement là-dessus, et d’ailleurs le secteur de l’information est tout petit ».

Lorsque les sénateurs ont demandé à Vincent Bolloré quel était son intérêt dans la constitution d’un empire médiatique, le milliardaire a répondu qu’il s’agissait du deuxième secteur le plus rentable dans le monde après le luxe. Une réponse qui ne devrait normalement étonner personne, le profit étant le but d’une entreprise ; mais peut-être que les subventions attribuées à tout-va à des projets idéologiques font oublier aux hommes politiques la réalité du travail, de la méritocratie et de l’effort.

L’effort, encore une chose que les politiques ont dû mal à comprendre. En particulier lorsque c’est pour rester rentable, faire des économies et développer une entreprise. Lorsque Vincent Bolloré applique ces pratiques vertueuses, il est aussitôt accusé d’interventionnisme : pour sauver Canal +, il fut obligé de faire des économies (I Télé a englouti 400M€ au cours de son existence). Il n’a pas détruit, il a construit pour que les 8000 personnes de Canal continuent à travailler.

« Dans mon ADN, la seule chose qu’on peut dire à part le fait que je suis démocrate-chrétien, c’est la liberté »

Le groupe Vivendi-Canal est le seul groupe médiatique français qui s’est vraiment développé à l’international. La question qui anime son dirigeant est de savoir si le groupe est capable de faire rayonner la culture française et européenne dans le monde. « Moi je crois que le rayonnement, l’aide au créateur, le soutien aux journalistes, le soutien aux dirigeants, c’est compatible avec la réussite économique, et je crois que l’inverse n’est pas compatible. » L’essentiel du groupe Vivendi-Canal concerne le cinéma, le sport et les séries, et ce qui l’intéresse, c’est l’international : plus de la moitié des 20M d’abonnés sont d’ailleurs à l’étranger. Le sujet politique n’est donc pas essentiel à Canal. A ce titre, CNEWS n’est pas une chaîne d’opinion, c’est une chaîne de débat, où prime la liberté de l’information.

Pour Vincent Bolloré, le danger ce sont les GAFAM et leur énorme poids, ainsi que la diffusion de leurs contenus par des tuyaux non contrôlés et non contrôlables. La concentration des médias pose certes problème, mais la taille des concurrents également. Il est d’ailleurs étonnant que la commission sénatoriale ne comprenne pas cela : si l’Union européenne a vu le jour, c’est pour que les Etats pèsent davantage face aux Etats-Unis et à la Russie. Dès lors, pourquoi la guerre d’influence que se livrent les deux bords de l’Atlantique ne nécessiterait-elle pas la même stratégie ?

L’audition de Vincent Bolloré au Sénat aura eu le mérite de faire résonner entre ses murs une ambition et une vision qui se font de plus en plus rare :

« Nous avons un trésor, le trésor c’est notre Histoire. Pardon je n’ai pas le droit de dire Clovis ou Charlemagne, c’est très mal vu aujourd’hui. On a des sites magnifiques qu’on peut filmer, et je pense que c’est ce trésor qui doit être mis en avant, qui peut être exporté. Quand on fait Versailles et Clovis, c’est plus intéressant que Superman 2, 3, 4. Nos aïeux nous ont laissé ça. Si on favorise les groupes français, en tous cas, si on ne les empêche pas de vivre, et qu’on ne favorise pas des étrangers qui eux ont une arrière-pensée complètement différente (normaliser, donc la culture française ne s’en sortira pas), les talents et les résultats se conjuguent. »

Ce sont ces groupes qui font et feront demain la richesse de la France. Alors, lorsqu’un sénateur socialiste déclare à un homme d’affaires d’une telle envergure que « sur vos antennes, ce qu’il se passe ce ne sont pas des valeurs de la République, et donc ce n’est pas une question simple de pluralisme », comment ne pas ressentir une lassitude, un découragement ? Nos élus sont-ils à ce point déconnectés des vrais enjeux contemporains ? Ils veulent lutter contre les GAFA, mais ils veulent aussi empêcher de poursuivre sa dynamique la seule entreprise française susceptible de les concurrencer aujourd’hui dans le domaine de la communication. L’idéologie tue la raison.

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10 commentaires

Moran 28 janvier 2022 - 6:36

Pourquoi en France quand quelqu’un réussit, il doit s’en excuser et pire, faire amende honorable?
P.S. SVP est-il possible de diffuser des textes en caractères foncés, plus lisibles? Merci

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BYL 28 janvier 2022 - 7:28

Les politiques s’étonnent du poids de la réussite; Seraient ils conscients de leur « arrieregardisme »? Nos assemblées sont elles inquiètes de leur perte de valeur, leur perte de consistance face à leurs électeurs? Avec le président Macron, ils ont investi en bande l’assemblée nationale. Les conseils de défense les mettent hors jeu.

Ils n’ont pas la capacité de percevoir l’action de Mr BOLLORÉ. Le meilleure placement est bien le travail. A eux, nos politiques à nous emmener et nous maintenir sur ce chemin. Les politiques subissent et étalent la société?
Bonne chance à tous les travailleurs durables. L’effort doit être permanent!! DB

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en fait 28 janvier 2022 - 7:56

Oui, l’idéologie tue les pauvres, mais favorise très au delà du raisonnable les démagogues, . .. …., .
– d’un côté à Paris, David Assouline maitrise d’histoire, Capes, Ligue communiste révolutionnaire, Trotskiste, contre la loi Devaquet, UNEF- ID ? bien au chaud au Sénat, très bien « payé » par les lourds impôts des autres, . .. ….,
– de l’autre  » un provincial » Véritable entrepreneur, V.B. multiplie par 100 le nombre des salariés, récolte par la qualité de ses prestations quasi 4 milliards € de TVA, doit avoir une masse salariale autour de 7.2 milliards € , des I.S pour 600 à 800 millions €; et cela tous les ans, Oui il faut faire des efforts tous les ans. Il doit en outre affronter la très douce concurrence internationale. Mais, il a en plus crime de lèse bêtise, l’outrecuidance d’évoquer l’Histoire de France.
donc pour toutes ces raisons, cela va de soit, il a tord.
Oui tout va très bien.

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COMMENCHAL 28 janvier 2022 - 10:07

Et comme par hasard, c’est un membre du PS qui s’attaque au groupe Canal et plus précisément à la stratégie de son dirigeant. Sommes nous en économie planifiée par un parti ou une idéologie ou sommes nous dans une économie libérale à l’image du président et du gouvernement? N’est-ce pas plutôt une mise en cause politique par rapport à la mise à disposition pour le grand public d’une parole que les bien-pensants et la doxa du politiquement correct vilipendent et censurent ? Ceci notamment avec l’arrivée de Monsieur Zemmour sur C News. Et quelques autres personnalités dérangeantes. C’est ça le pluralisme, M. Assouline. Pluralisme qu’on ne trouve pas sur les organes de France Télévisions, et sur les autres chaînes d’info. Il est important que toutes les opinions puissent s’exprimer. Bien sûr, ça dérange, ça interpelle, ça ne veut pas dire qu’on adhère à tout. Ca oblige aussi les autres médias à revoir leur copie, peut-être ??

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montesquieu 28 janvier 2022 - 10:31

Nous sommes en France. Réussir est un péché « républicain ». Et si le coupable se permet en outre de ne pas s’aligner sur les médias de « GÔCHE », il doit être inquiété!

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Christian André Legros 28 janvier 2022 - 11:46

ça me dérange que le Sénat s’autorise à passer un industriel sur le grill. D’une part, ça ressemble à une violation du principe de séparation des pouvoirs, et d’autre part, à une infraction et un entrisme dans le domaine d’une entreprise privée.

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Obeguyx 28 janvier 2022 - 3:51

Un sénateur PS qui s’en prend à un homme indépendant et responsable de ses actes et qui plus est a réussi (je voudrais bien connaître l’embryon de réussite dudit sénateur). Je ris en pensant au SENAT, la seule EPHAD de France qui n’a eu aucun mort du Covid et qui n’a pas été « enfermée et isolée », une véritable secte qui cultive l’entre-soi à déraison et qui se permet absolument toutes les frasques possibles et imaginables avec un gros goinfre à sa tête (j’ai personnellement été témoin il y a quelques années de ses étonnantes capacités stomacales). Et je ne parle pas du scandale (en attente) à propos de la gestion financière et de ses dérives de la dite institution..

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JEAN-MARC CHANUSSOT 28 janvier 2022 - 11:13

Nous connaissons bien David Assouline, qui est le frère d’armes de Anne Hidalgo, de tous ces « éléphants » aux pieds d’argile et qui sont arrivés au pouvoir par inadvertance, portés par le plus grand brigand de l’histoire du siècle dernier. Ce bonimenteur ne connait absolument rien à l’économie, au risque pris par les entrepreneurs car biberonné par l’argent public toute sa « carrière ». Il reste quelques Français encore prêts à voter pour lui, mais ils ont de plus en plus vieux.

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AlainD 29 janvier 2022 - 10:46

Si vraiment la liberté est dans son adn pourquoi a t il cru bon de supprimer les guignols de l’info que je trouvais très drôles. Je note que personne avant lui ne s’était permis de le faire, qu’aurait il dit des Nuls ? Je ne suis pas certain que l’on rigole beaucoup chez lui…

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Astérix 30 janvier 2022 - 11:40

Si vous réussissez en France, vous voués aux gémonies !
Le problème de la presse et de l’audiovisuel c’est qu’elles sont soliaocommunistes mais financés par le secteur privé ????
Allez comprendre ???

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