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Réforme de la fonction publique :

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C’est à peu près au même moment que l’on découvre le rapport de Bercy (IGF) sur le temps de travail et le projet de loi pour la restructuration de la fonction publique. Simple coïncidence ? Probablement pas, mais le plus important ce sont les actes qui vont suivre. Va-t-on assister à une vraie réforme de la fonction publique française qui en a tellement besoin ?

Le temps de travail des fonctionnaires : un scandale (moins de 35 heures en France contre 41 heures en Allemagne !)

« Je souhaiterais que dans la fonction publique d’Etat et la fonction publique territoriale, les fonctionnaires fassent 35 heures, comme les Français » affirme le ministre Gérard Darmanin. C’est très bien, mais il ne suffit pas de le souhaiter ! Car le rapport sur le temps de travail est clair et sévère : au moins 310 000 fonctionnaires d’Etat travaillent moins que les 1607 heures légales par an. C’est particulièrement le cas à l‘Education, la Justice et l’Intérieur. Mais on a oublié de le dire, face à ces chiffres scandaleux : ce n’est pas la première fois que le temps de travail des fonctionnaires est pointé du doigt. En octobre 2015, un rapport de la Cour des comptes observait déjà que plus de 80 % des collectivités locales n’appliquaient pas les 35 heures. Et que nous étions dans un contexte de hausse massive des effectifs globaux : + 23 % entre 2008 et 2015. En juin 2018, une note de la Cour des comptes pointe encore une augmentation (+ 25 %) du coût moyen/emploi dans la gendarmerie et la police et un recul de la durée moyenne du travail. A-t-on oublié les fameuses primes « de présence » distribuées par certaines collectivités locales ? Un incroyable privilège accordé rien que pour faire venir les agents au travail dans le temps normal de présence ! Par comparaison, le temps de travail des fonctionnaires en Allemagne est de 41heures/semaine, en Suède de 40 heures/semaine.

Tout cela va-t-il changer grâce à la réforme proposée par le gouvernement ? Pas sûr. On risque même de rendre la situation pire. Tout d’abord, alors que l’on sait très bien que nous avons beaucoup plus de fonctionnaires que les autres pays en moyenne et que leur nombre ne cesse d’augmenter (+ 17 % depuis 20 ans dans les trois fonctions publiques), il n’y a eu aucune annonce significative sur ce sujet. M. Darmanin souhaite le « recours accru aux contractuel ». Pourquoi pas, mais la logique voudrait que cela soit une conséquence d’une réduction du nombre de fonctionnaires et de la délégation au privé des fonctions de l’Etat. Car proposer des CDD de 6 ans (dans le privé c’est illégal, on ne peut pas dépasser 18 mois sauf cas particuliers ou contrats spécifiques) n’est pas une grande avancée. Les contractuels ont toujours existé (environ 20 % de la fonction publique) sans que cela entraîne beaucoup d’économies, ni d’effectifs, ni de masse salariale. De plus, ces nouveaux fonctionnaires en CDD bénéficieront des avantages retraites du statut, d’une indemnité de départ correspondant à 24 mois de salaire (!) et, le comble, à des allocations chômage alors que les fonctionnaires n’y cotisent pas ! C’est encore le privé qui va régler la note.

Le même projet envisage une « refonte du traitement des fonctionnaires » après… la réforme des retraites de 2020. Il s’agit du renforcement du « critère de l’engagement professionnel et du mérite », un autre serpent de mer qu’avait mis en place Nicolas Sarkozy avec les résultats que l’on connaît. En outre, comment introduire une rémunération au mérite alors que les fonctionnaires ne respectent même pas – et cela en toute impunité – le temps de travail légal ?

Il faut laisser les syndicats vivre des cotisations, il faut ouvrir l’administration à la concurrence

Enfin, toujours dans les grandes propositions de ce projet de loi, figure une réforme des instances de représentation du personnel en une instance unique dénommée CSA (comité social d’administration). Il est très louable d’essayer de réduire la capacité de nuisance des syndicats mais pourquoi créer une instance centralisée ? Il aurait mieux valu leur couper les vivres (l’argent public) pour les obliger à vivre de leurs cotisations, et interdire les emplois fictifs (syndicalistes payés par l’administration et travaillant au service du syndicat). C’est le cas à l’étranger. Vive les syndicats … à condition qu’ils soient indépendants et autonomes financièrement.

La France compte 93 fonctionnaires pour 1 000 habitants ; l’Allemagne, seulement 57, avec plus de 60 % des employés de sa fonction publique sous statut privé. En France, la fonction publique c’est 21 % de la population active, en Allemagne, c’est la moitié (10, 6 %). L’administration publique (tous étages confondus) coûte à chaque Français 1 861 euros de plus qu’à un Allemand. Il faudrait une grande réforme pour changer tout cela et on ne peut pas la faire sans supprimer le statut de fonctionnaire, sauf pour les missions régaliennes de l’Etat. Introduire de la flexibilité est une bonne chose mais ça ne marchera pas dans un corps sclérosé : il faut aussi assouplir les statuts et les corps, ouvrir à la concurrence les administrations et les services publics. Donnons ainsi la possibilité à ceux qui travaillent dans le public de travailler plus et gagner plus, comme dans le privé. Au lieu de faire des réformettes, changeons l’Etat et la fonction publique française dans l’intérêt de tous.

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2 commentaires

orilou88 2 avril 2019 - 12:46

diminution du nombre de fonctionnaires
Remplacer certains fonctionnaires par des contractuels ne diminuera pas le nombre de personnes chargées d'accomplir une tâche non plus que la charge financière. Or, il est clair que bon nombre de fonctionnaires ne travaillent pas le nombre d'heures pour lesquelles ils sont payés. Sans compter avec ceux payés à ne rien faire… car en attente d'affectation ! SUPPRIMER LES POSTES INUTILES ET LES FONCTIONNAIRES CORRESPONDANTS.

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AlainD 10 septembre 2019 - 5:12

Le chengement n'est probablement pas pour demain hélas !
Si Macron est un maître dans l'art de l'enfumage et du jeu de bonneteau, je ne crois pas qu'il ait les épaules pour s'opposer aux puissants syndicats de fonctionnaires, lesquels fonctionnaires constituent le plus gros de la masse des syndiqués. Il lui a été infiniment plus aisé d'encadrer le secteur privé, même s'il a supprimé certaines cotisations salariales (je m'interroge sur les finances du régime général de l'assurance maladie) que vont devenir demain les régimes de retraite du privé (ARRCO & AGIRC) et le régime général régulièrement ponctionné pour assurer la retraite des fonctionnaires. La notion d'égalité semble bien n'exister que dans la devise de la France, quant à la fraternité…

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