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Printemps arabe : Cinq ans plus tard, toujours l’oppression économique

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A l’origine du printemps arabe il y a eu l’oppression économique empêchant les entrepreneurs de faire leur travail. Cinq ans plus tard cependant, le bilan est plus que très décevant. La raison tient à une erreur de diagnostic sur les causes de ces révolutions.

Le 14 janvier 2011 le dictateur tunisien Ben Ali prenait la fuite face à une révolution populaire. Le « printemps arabe » allait souffler sur le monde arabo-musulman.
Les analystes à l’époque ont été séduits par le leurre de la « démocratisation ». Ces pays étant essentiellement des dictatures politiques, les révolutions furent perçues comme « démocratiques ». Sauf qu’une fois les élections mises en place, les populations s’empressaient de voter pour des partis islamistes pas exactement pro-démocratiques. Le grand spécialiste de l’Islam Bernard Lewis rappelle que l’Islam n’a pas de tradition de séparation entre le religieux et le politique. En outre, comme le faisait très justement noter à l’époque Timur Kuran, politilogue turco-américain spécialiste du monde arabo-musulman, les dictatures avaient éradiqué les organisations de la société civile, verrouillé l’information et étouffé le débat critique, fondements d’une culture démocratique. Enfin la nature ethnique voire tribale de certains de ces pays ne pouvait que conduire au conflit. Les perspectives de la démocratisation dans un tel contexte s’avéraient ainsi plutôt mauvaises.

En réalité, la raison de ces révolutions était moins politique qu’économique. L’étincelle de ces révolutions a été l’immolation du jeune tunisien Mohammed Bouazizi en décembre 2010. Ce n’était pas un activiste politique, mais un jeune entrepreneur du secteur informel à qui la police avait confisqué sa charrette, sa balance et ses fruits et légumes, c’est à dire son capital et ses marchandises. Ce drame dépeint en réalité le tableau de l’oppression économique, c’est à dire réglementaire et fiscale, dont souffrait et souffrent encore ces nations. Comme Habib Sayah, un jeune analyste tunisien avait pu le faire remarquer, le geste de désespoir de Bouazizi (et de centaines d’autres) s’inscrivait dans une logique de libération économique : c’était une bataille pour le « laissez faire, laissez passer ».

La dictature politique se doublait donc d’une dictature économique qui instaurait ce que l’économiste péruvien Hernando de Soto a pu qualifier d’« apartheid économique » : il n’était possible de faire des affaires que si l’on faisait partie des réseaux et cercles du pouvoir politique. Ce système de copinage générant l’exclusion de la majorité de la population de la prospérité, nécessitait l’oppression politique pour écraser les revendications. Il nécessitait aussi l’engraissage d’une énorme bureaucratie aux intérêts opposés à la liberté. Voilà pourquoi ouvrir une simple boulangerie en Egypte prenait plus de 500 jours ou que même un petit entrepreneur devait passer par 56 agences publiques pour obtenir des autorisations.

Cette incompréhension des causes véritables du printemps arabe a empêché de mettre en place des réformes sérieuses allant dans le sens d’une libération économique. Les scores de l’Égypte ou la Tunisie en matière de liberté économique sont plus bas aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Les conservatismes perdurent donc. En Tunisie en janvier 2014, une proposition d’amendement à la nouvelle constitution, insistant sur le droit à l’initiative économique (allant dans le sens d’une plus grande liberté économique) avait été rejetée par l’assemblée constituante. Visiblement, les vieilles structures marxisto-bureaucratico-syndicalistes ont la vie dure.

Loin d’être une lutte pour la survie de la « classe possédante », le combat pour la libération économique, qui est celui de l’IREF, est d’abord celui contre la pauvreté, et en faveur de l’épanouissement et du développement des masses. C’est un combat pour qu’il y ait plus de riches et de moins en moins de pauvres – non par la redistribution donc, mais par la libération du fabuleux potentiel humain à créer de la valeur. Ceux qui se battent contre les inégalités devraient d’ailleurs commencer par celles qui comptent vraiment et qui sont véritablement structurelles : celles qui sont générées par l’oppression réglementaire et fiscale d’États dysfonctionnels et corrompus.

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