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Macron et les retraités ou la question de confiance

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À de multiples reprises, des retraités ont reproché au Président Macron d’avoir amputé leur pouvoir d’achat avec la dernière hausse (1,70% du salaire brut, 1,85% du salaire net!) de la CSG. Rien de plus aisé pour le Président que de leur répondre que cette hausse faisait bien partie de son programme et qu’en conséquence elle se situait -sans surprise- dans le droit fil de son élection. Il est vrai que tous s’acharnent là sur un grief qui n’offre politiquement plus guère de prise à la contestation, compte tenu de la passivité accommodante du juge constitutionnel sur cette rupture flagrante de l’égalité entre contribuables. D’ailleurs, l’argumentation présidentielle est à ce point rôdée que l’on peut se demander si cette hausse de la CSG n’a pas été conçue comme une sorte de leurre destiné à protéger la Présidence de questions bien plus embarrassantes.

En effet, du point de vue de la défense des retraités, il y a beaucoup mieux à faire pour ébranler les lignes présidentielles qui ne sont pas – loin s’en faut – invulnérables. Il suffit d’amener le Président Macron sur un terrain où il sera très certainement beaucoup moins à l’aise. Car tout le monde ou presque a visionné les vidéos collectées et abondamment diffusées sur You Tube par le Huffington Post (article des 26 et 28 août 2017 dans lesquelles à plusieurs reprises le candidat assurait fièrement au corps électoral des retraités (17 millions quand même!) qu’à l’inverse de ses concurrents, lui seul se faisait fort de sauvegarder le pouvoir d’achat de leurs pensions. Mieux, à peine élu, le Président réitère formellement son engagement de campagne. Or le 26 août 2018, à peine plus de 15 mois après son élection, le Chef de l’État laisse courageusement à son Premier Ministre le soin d’annoncer dans le Journal du Dimanche qu’en 2019 et en 2020 les pensions de base ne seront majorées que de 0,30%, donc très en dessous de l’inflation prévisible qui risque de « tangenter » les 2% par an. Si bien que juste après avoir vu leur pouvoir d’achat écorné par la hausse de CSG précitée, les retraités se voient saignés une nouvelle fois par le gel prolongé de leurs pensions de base. Et pour eux, ce gel, en réalité à durée indéterminée, est encore plus pénalisant sur la pension de base que la majoration de CSG, puisqu’il risque d’amputer définitivement leur pouvoir d’achat de l’équivalent (ou presque) de deux majorations successives de CSG – car 2*( 2,00% – 0,30%)= 3,40%. En plus, il s’annonce lourd de menaces pour les années suivantes, sans compter les risques de contagion sur les autres pensions. Comme pour faire bonne mesure, le Président avait en outre assuré les retraités qu’ils n’avaient rien à craindre de la réforme à venir, on voit aujourd’hui qu’il a joué sur les mots et que, se reniant une nouvelle fois, il n’a pas hésité à ruiner brutalement d’un revers de main l’équilibre fragile des retraites en cours.

Et là, le Président ne peut plus se réfugier derrière son programme: la désindexation ne s’y trouvait pas, à l’inverse du maintien du pouvoir d’achat qui en constituait même l’une des principales promesses. Or une fois élu (grâce notamment aux voix des retraités!), le Président a donc cru pouvoir se dédire à peu de frais, en prenant cet électorat en traître, comptant sans doute sur le fait -jusqu’à la surprise des gilets jaunes- que de toute manière la plupart des vieux se taisent et ne se déplacent plus guère. Mais, n’en déplaise au Chef de l’État, son comportement s’apparente étroitement à celui des politiciens sans scrupule pour lesquels le nouvel ordre « En marche » n’avait pas de mots assez durs. Les retraités sont donc fondés à faire expressément grief de ses mensonges au Président Macron en lui rappelant qu’il a lourdement failli à son engagement électoral quant à la garantie du pouvoir d’achat des retraites et qu’il les a sciemment trompés quant au maintien du statu quo pour les retraites en cours.

D’ailleurs, puisqu’il s’agit en réalité non pas de contester, mais de rétablir le programme présidentiel, les retraités ne doivent pas hésiter à porter à l’ordre du jour du grand débat national qui s’ouvre la condamnation formelle de ces mensonges éhontés, qui offraient un bel exemple de « fake news » avant l’heure. Dans le cadre du grand débat en cours, les retraités sont en droit de sommer fermement le Président de répondre clairement au plus tard au soir du 15 avril prochain à ce qui est pour eux une véritable question de confiance : renonce-t-il ou non au gel indigne des retraites qu’excluait explicitement son propre programme ? On saura alors:

– dans l’affirmative, que le pays a à sa tête un homme politique honnête, non pas infaillible, mais capable de reconnaître et de corriger ses erreurs et de tenir ses engagements, en rétablissant rétroactivement, définitivement et sans délai l’indexation des pensions de base sur les prix ;

– dans la négative, que le pays a élu une fois de plus l’un de ces innombrables politiciens grâce auxquels, on vient juste de l’apprendre, trente-sept pour cent des Français affirment ne plus avoir aucune confiance dans la politique et trente-deux autres pour cent assurent même en éprouver du dégoût.

Car cette fois, le Président ne pourra pas se défausser : son silence vaudrait aveu de tromperie et les « rentiers » sauraient alors parfaitement à quoi s’en tenir. Donc d’une manière ou d’une autre et pour peu qu’ils se donnent la peine de poser la bonne question lors du débat qui vient de s’ouvrir, les retraités auront cette fois les bonnes cartes en main pour maintenir ou retirer leur confiance lors de la prochaine échéance électorale de mai 2019, au lieu de devoir, comme au printemps 2017, glisser dans l’urne les bulletins pipés d’un indigne jeu de bonneteau.

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4 commentaires

madiran 22 janvier 2019 - 10:00

excellent article
Un excellent article, qui m'a envoyé en dépression. Comment s'en sortir ….une bonne guerre…

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VAILLANT 22 janvier 2019 - 11:28

La riposte des retraités "BENEVOLES" dans les associations loi 1901
Macron,
Pour nous, les retraités "bénévoles" d'associations loi 1901, le MAINTIEN dans nos activités de BENEVOLES (Comités directeurs, animateurs sportifs, culturels, organisateurs facilitateurs d'évènementiels, de compétitions)… passera désormais par la RE-indexation de nos pensions au coût de la vie !!!
A bon entendeur – Salut !!
Un retraité "BENEVOLE" dans 2 associations sportives et une culturelle !!!!!!

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Alain D 22 janvier 2019 - 9:06

La csg pour tous ou pour aucun
On ne peut que s'étonner de l'absence de réaction de la part du Conseil Constitutionnel au regard de cette flagrante inégalité de traitement devant l'impôt. Il serait peut être bénéfique de réveiller un peu ces notables.

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Barbier 23 janvier 2019 - 10:19

Article de Thierry Benne
Excellent article de Thierry Benne !
Pertinent comme toujours.
Nous allons l'epingler sur notre mur Facebook de notre Association de Défense de Retraités A3dr.
Les articles de l'IREF de Me Delsol et Thierry Benne sont dans les dossiers que nous avons remis à Matignon lors des 2 réunions que nous avons eu au sujet des Retraités.
Un montage Vidéo des interviews de E Macron avant son élection confirme totalement l'article de Thierry Benne .
Nous avons engagé une action pour la reindexation des retraites à la fois avec les organismes paritaires qui gèrent les Retraites complémentaires et la CNAV qui gère la retraite de base .
Quand nous allons dans le détail, nous nous rendons compte que les dés sont pipés..
Nous pourrons communiquer un dossier complet à l'IREF.
Merci encore
François Barbier
A3dr.org

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