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Les Français et leur retraite : ils ne sont pas à une contradiction près !

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A l’initiative de Groupama et de Sapiendo se sont tenues, mardi 8 octobre 2024, les Quatrièmes Rencontres sur les retraites. Cette matinée fut l’occasion de présenter les résultats du baromètre 2024 sur les Français et la retraite, réalisé par Odoxa. Un sondage qui nous renseigne sur les contradictions de nos compatriotes en la matière.

 Les Français se disent toujours majoritairement opposés (57% vs 42%) à la réforme des retraites repoussant l’âge légal de départ à 64 ans. Parmi les non-retraités (c’est-à-dire les plus concernés), les opposants sont même 63%.

Les Français sont de plus en plus attachés au système par répartition…

Si opposition il y a, nous dit le sondeur, c’est parce que les Français pensent que cette réforme n’est pas efficace pour rendre pérenne sur le plan financier le système actuel (65% des sondés), et qu’elle ne sera pas la dernière, d’autres réformes étant à craindre pour repousser encore l’âge de départ (82%).

Pourtant, certes à une petite majorité (53% vs 47%), les personnes sondées déclarent avoir confiance dans le système français. Une confiance qui, cependant, n’existe plus si l’on interroge les seuls non-retraités (56% n’ont pas confiance). Ceux-là supposent d’ailleurs que le jour où ils pourront partir à la retraite, les caisses ne leur verseront pas une pension à la hauteur de leurs attentes (63%).

Dans le même temps, les Français disent préférer le système par répartition plutôt qu’un système par capitalisation (60% vs 38%). Ils y sont même de plus en plus attachés puisque la proportion des partisans de la répartition progresse de 5 points depuis 2018.

… tout en préparant leur retraite par capitalisation

C’est sans doute parce qu’ils savent le système actuel menacé que les Français sont de plus en plus nombreux à préparer l’avenir. Ainsi, 64% des non-retraités déclarent avoir mis en place « quelque chose » pour financer leur retraite. Par « quelque chose », il faut comprendre une épargne sous différentes formes (livret, compte d’épargne, PEL, assurance-vie, PER, Préfon, contrat Madelin, etc.), mais aussi l’acquisition de sa résidence principale (26%) ou un investissement locatif.

Soulignons par ailleurs que les jeunes ne sont pas aussi imprévoyants qu’on pourrait le penser : 31% des 18-24 ans, et 37% des 25-34 ans déclarent avoir commencé à préparer leur retraite. Autre information intéressante : près de la moitié (48%) de ceux qui ont commencé à préparer leur retraite l’ont fait avant l’âge de 31 ans.

Financièrement, les Français épargnent aussi de plus en plus en prévision de cette échéance. Les non-retraités affirment ainsi mettre 255 € de côté par mois (hors remboursement de prêts immobiliers). C’est 21 € de plus que l’année dernière (+9%) et 45 € de plus qu’en 2018 (+21%). Cette année-là, Odoxa avait aussi demandé aux retraités combien ils avaient économisé mensuellement (toujours hors remboursement de prêts immobiliers) pour préparer leur retraite. La réponse avait été : 148 €.

Enfin, le sondage révèle que pour neuf Français sur dix (91%), il est utile de se constituer une épargne individuelle pour disposer d’un revenu suffisant une fois à la retraite.

Une grande confusion sur la capitalisation

Si l’on résume, nous avons donc des Français qui plébiscitent la répartition tout en n’ayant qu’une relative confiance dans le système actuel et qui sont opposés à la réforme repoussant l’âge légal de départ à 64 ans pourtant nécessaire étant donnée l’évolution du rapport entre cotisants et retraités. Opposés à la capitalisation, ils se constituent cependant une épargne retraite individuelle qui leur permettra de compléter leur pension car ils estiment qu’elle ne sera pas suffisante pour vivre correctement.

Avouons qu’il y a là de quoi perdre son latin. Mais toutes ces contradictions ne proviennent-elles pas du fait que certains véhiculent des contre-vérités, voire tentent de semer la confusion dans les esprits ?

Par « certains », nous visons ici d’abord le sondeur Odoxa et son client Groupama. Ce dernier a pour objectif de vendre des produits d’épargne retraite. Nous ne lui en faisons pas grief, mais la définition qu’il donne de la capitalisation – chacun épargne pour sa propre retraite – comme alternative à la répartition – les personnes en activité financent les retraités – écarte, volontairement ou non, la capitalisation collective du débat.

Nous visons aussi certains politiciens. Après la présentation du sondage, les 4èmes Rencontres sur les retraites se sont poursuivies par un débat entre Véronique Louwagie, députée (LR) de l’Orne et Rachid Temal, sénateur (PS) du Val d’Oise. Alors que la première a défendu la capitalisation collective comme elle existe pour la fonction publique avec le RAFP, le second a prétendu qu’elle exposait les futurs retraités aux aléas de la bourse, voire à la banqueroute et qu’elle risquait fort de les appauvrir. M. Temal est soit un menteur patenté, soit un ignorant car, en tant que sénateur, il cotise à un système de retraite par capitalisation collective et doit savoir qu’il donne entière satisfaction aux bénéficiaires.

Ce que pourrait être une bonne réforme des retraites

Il nous semble tout de même, à la lecture des résultats du sondage, que les Français sont prêts pour un changement de système si l’on veut bien leur expliquer pourquoi et comment le faire. C’est l’objet de la dernière étude de l’Iref, « Garantir les retraites et augmenter le niveau de vie des salariés et des retraités avec des retraites par capitalisation ».

 

Son auteur, Jean-Philippe Delsol, y montre que les pays qui ont choisi la capitalisation collective versent de meilleures retraites qu’en France pour des cotisations moindres. Par exemple, les retraités néerlandais reçoivent, en moyenne, une pension équivalant à 70,9% de leur dernier salaire brut quand les Français ne perçoivent que 56,5%. Les Néerlandais ont des pensions 25% supérieures à celles des Français, alors même qu’ils y consacrent 33% de ressources en moins (10,3% du PIB aux Pays-Bas contre 13,7% en France).

Adopter la capitalisation collective améliorerait donc le pouvoir d’achat des actifs (moins de cotisations) comme des retraités (pensions plus élevées) et favoriserait le financement des entreprises, ce qui ne pourrait être que favorable à l’économie et à l’emploi.

Bien sûr, le passage d’un système à un autre est délicat. Mais de nombreux pays l’ont fait et l’étude de l’Iref explique comment gérer la transition.

Les Quatrièmes Rencontres sur les retraites ont donc loupé le coche en n’invitant pas le président de l’Iref à exposer ses travaux. Car une présentation claire de la capitalisation collective ne pourrait qu’achever de convaincre les Français que la répartition est à abandonner au plus vite.

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