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La Banque postale reçoit 2 milliards de subventions inutiles

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Bruno Le Maire aurait déjà trouvé 10 milliards d’euros (Md€) d’économies. A vrai dire, il n’y a pas de quoi s’en féliciter. Cette somme ne représente que 1,7 % des dépenses prévues au budget 2023. Il est nécessaire d’aller beaucoup plus loin pour redresser les comptes du pays. Pour aider le ministre, nous avons trouvé près de 2 Md€ supplémentaires à économiser du côté des subventions allouées à la Banque postale.

La Poste rend un service de plus en plus dégradé pour un coût de plus en plus élevé, comme nous l’avons montré dans un article récent. La Cour des comptes a, par ailleurs, constaté, dans un rapport du mois de mars 2023, le coût croissant pour le budget de l’État des missions de service public du groupe.

Une mission d’accessibilité bancaire

L’une de ces missions concerne l’accessibilité bancaire. Confiée à la Banque postale, elle a pour principal objectif de favoriser la pré-bancarisation des populations qui, pour des raisons variées, ne sont pas en capacité d’utiliser des moyens de paiement standard et n’ont pas accès aux offres de bancarisation traditionnelle. Concrètement, il s’agit de :

  • satisfaire, à titre gratuit, les demandes d’ouverture de Livrets A, au contraire des autres établissements bancaires qui ont la liberté commerciale de les refuser ;
  • proposer, gratuitement, des services permettant d’utiliser le livret A comme un quasi-compte courant, ce qui n’est pas autorisé dans les autres banques.

Cette dernière obligation permet aux clients bénéficiaires du dispositif d’effectuer gratuitement des opérations de dépôt et de retrait à partir de 1,5 € (contre 10 € dans les autres banques) ; de disposer d’une carte de retrait utilisable dans les distributeurs automatiques de à billets (DAB) et aux guichets de la Banque postale ; d’être accompagnés au guichet (conseil budgétaire, mise en relation avec des associations venant en aide aux personnes les plus précaires).

Pour mettre en œuvre cette mission d’accessibilité bancaire, le groupe La Poste a signé une convention avec l’État qui lui a alloué, pour la période 2021-2026, 1,77 Md€. Pour la période précédente (2015-2021) la Banque postale avait reçu 1,93 Md€.

 Ces importantes subventions sont-elles utiles ? Pour le groupe La Poste, il va de soi que cette mission est essentielle ; elle fait de lui « un acteur majeur de la lutte contre l’exclusion bancaire » et permet la « bancarisation et l’épargne de l’ensemble de la population ». Il souhaiterait d’ailleurs qu’elle soit davantage reconnue par une augmentation des subventions, car il table sur une hausse des coûts pour les années à venir.

 Pourtant le nombre de clients baisse. Si la Banque postale, sur son site internet, fait état de 1,4 million de bénéficiaires de la mission d’accessibilité bancaire, la Cour des comptes n’en a recensé que 1,04 millions en 2021, contre 1,2 millions en 2017.

 Néanmoins, la Cour estime que cette mission est nécessaire. Tout comme les sénateurs Patrick Chaize, Pierre Louault et Rémi Cardon qui, dans un rapport d’information publié le 31 mars de cette année, estiment qu’il convient de « préserver cette mission de service public dans son périmètre actuel afin de favoriser l’inclusion bancaire, de lutter contre l’exclusion économique et sociale et de pallier les carences de marché ».

 Le marché fait mieux que la Banque postale subventionnée

Là où les sénateurs se trompent lourdement, c’est qu’en la matière on pourrait chercher longtemps en vain où sont les « carences du marché ».

Il nous semble au contraire que le marché offre des solutions qui répondent aux critères d’inclusion bancaire. De nombreux nouveaux acteurs bouleversent la banque traditionnelle, à l’instar de N26, Bunq, Revolut, Kard, Pixpay, Wise, Qonto, Helios, etc. Ces néo-banques multiplient les innovations et les promotions pour attirer les clients, y compris avec des offres entièrement gratuites. Même le groupe La Poste s’y est mis avec Ma French Bank !

Cependant, les néo-banques n’ont, la plupart du temps, pas d’agences physiques. Leurs services ne sont accessibles qu’à distance, à partir d’une application. Même si les détenteurs d’un smartphone sont très nombreux, il faut bien reconnaître qu’une certaine frange de la population reste rétive à ces appareils.

C’est pourquoi la solution proposée par Nickel est particulièrement innovante. Elle s’appuie, en effet, sur un réseau de 6 750 bureaux de tabac. D’ailleurs la Confédération des buralistes en est actionnaire, à hauteur de 5 %, à côté de BNP Paribas (95 %).

En permettant à tout le monde d’avoir accès, en 5 minutes et pour 20 € par an, à un compte courant, une carte Mastercard internationale et un RIB avec les outils pour suivre ses opérations en temps réel, Nickel, créée en 2014, a séduit plus de 3 millions de clients, soit trois fois plus que le nombre de bénéficiaires de la mission d’accessibilité bancaire confiée à la Banque postale.

On soulignera, à juste titre, que l’offre Nickel n’est pas gratuite. Certes, mais le coût reste modeste (1,66 € par mois) et constitue, en quelque sorte, la contrepartie pour disposer d’un réseau physique dans lequel les clients peuvent effectuer des opérations comme le retrait et le dépôt de liquide.

Une enquête récente sur la contribution sociale et économique de Nickel en France a montré que :

  • un tiers des clients étaient en interdit bancaire ou en difficulté avec le système bancaire traditionnel avant de rejoindre Nickel ;
  • 24 % des clients ont pu accéder à un emploi et 18 % à un logement grâce à leur compte Nickel ;
  • Nickel a permis à ses clients de réaliser en moyenne 155 € d’économies par an, ce qui a permis aux plus modestes d’augmenter de 2,5 % leur revenu arbitrable (la différence entre le revenu disponible et les dépenses pré-engagées) ;
  • 81 % des clients en situation de surendettement avant d’ouvrir leur compte ont vu leur situation s’améliorer depuis qu’ils sont chez Nickel ;
  • 75 % des clients arrivent à épargner et 35 % ont commencé à le faire depuis qu’ils ont un compte Nickel ;
  • le revenu moyen d’un client Nickel est de 1 500 € par mois.

C’est ainsi que Nickel n’a pas peur d’affirmer qu’elle « ressemble fort à un service d’intérêt public d’initiative privée ».

Vive la concurrence

Cependant Nickel n’est pas une banque ; elle est seulement, selon la terminologie de la Banque de France, un « établissement de paiement ». Par exemple, elle ne peut pas proposer de solutions d’épargne, ni de crédit. C’est pourquoi les découverts de comptes ne sont pas autorisés.

L’établissement souhaiterait continuer à innover, notamment en proposant une solution d’épargne, sans doute plus souple et moins réglementée que le Livret A. Plutôt que lui mettre des bâtons dans les roues, le Gouvernement devrait se demander si Nickel ne participe pas autant, si ce n’est davantage, à l’accessibilité bancaire que la Banque postale. Et s’interroger sur le bien-fondé des subventions accordées à la filiale de La Poste. Deux milliards d’euros d’économie, par les temps qui courent, c’est bon à prendre !

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7 commentaires

Roven 29 juin 2023 - 5:01

A l’occasion de l’arrivée à échéance du PEL hérité de ma mère à échéance, j’ai transféré chez Fortuneo mon livret A et mon CCP de la Banque Postale qui ne rend pas, et de loin, les mêmes services que les autres banques : incapacité à joindre un conseiller, y compris des réponses évasives sur le site de l’établissement, un site internet d’accès compliqué, des assurances-vie au rendement inférieur aux concurrents, pas moyen d’obtenir le relevé détaillé de clôture du PEL, etc.
Pourquoi devrions nous perpétuellement financer des canards boiteux publics avec nos impôts ? Pour sauvegarder l’emploi de milliers de fonctionnaires dont on espère qu’ils voteront bien, sans doute…
La gestion publique désastreuse et coûteuse est d’autant plus calamiteuse que l’État est de plus en plus interventionniste !

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henriB 29 juin 2023 - 6:21

« une certaine frange de la population reste rétive à ces appareils (les smartphones) » .
Ce qui est cependant une preuve de bon sens !

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VIGNELLO Daniel 29 juin 2023 - 8:59

Comment voulez-vous régler un problème par ceux qui les ont crées ? UN seul mot essentiel : vive la concurrence et cela ne peut se faire que par la suppression du statut public (sauf pour l’Armée qui protège tous) Autre exemple patent la gestion des autoroutes, public, elle était un trou sans fond, privée elle fait baver d’envie nos bobos gauchos !!

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AlainD 29 juin 2023 - 3:50

En somme,la banque postale n’est qu’une sorte d’administration déguisée, par ailleurs quel cerveau a bien pu inventer Ma French bank ? C’est nullissime!

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Ozark 30 juin 2023 - 9:34

Ça serait bien d être plus précis dans le titre. Le montant est délivrée sur une période de 5 ans. Soit 400 millions par an. Est ce trop pour plus d 1 million de pers en difficulté d accès bancaire? Il serait intéressant de voir selon la poste le coût de ces services. Par contre vous devriez vous intéresser au budget de l assemblée et du sénat, qui frise l indécence. Sachant que l excédent budgétaire n est pas reversé aux comptes publics, mais accumuler jusqu’à atteindre plus 2 milliards a l époque de hollande!! A voir aujourd’hui le pactole engrangé..

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lionel2 3 juillet 2023 - 8:02

+1 !!

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lionel2 3 juillet 2023 - 8:10

La Banque postale reçoit 2 milliards de subventions inutiles
Bah, combien de milliers d’associations inutiles reçoivent de subventions ?

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