Dans une longue interview accordée au Figaro Magazine, le président de l’IREF tire la sonnette d’alarme: les impôts et taxes vont continuer de grimper tant que l’État ne stoppera pas avec énergie la dérive des dépenses publiques.
LE FIGARO MAGAZINE. – Les Français doivent-ils s’attendre à voir leurs impôts augmenter?
Jean-Pihilippe DELSOL. – On ne connaît pas encore précisément les intentions du gouvernement en matière fiscale. Mais l’idée qui prédomine, malgré la promesse de ne pas augmenter les impôts d’Emmanuel Macron, est que les Français, ou plutôt certaines catégories d’entre eux, vont être mis à contribution. Des augmentations semblent déjà arrêtées. Et les propriétaires ont déjà pu constater la hausse de leur taxe foncière.
Certaines communes ont-elles abusé, en appliquant des hausses trop importantes des impôts fonciers?
Même si les communes ont été privées de l’une de leurs principales ressources avec la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale, il est difficile de justifier l’augmentation de la taxe foncière dans des proportions aussi considérables. La base de la taxe foncière, décidée par la loi de finances, a été augmentée de 7,1 % cette année. Soit une progression sensiblement supérieure à l’inflation, aux alentours de 5 %. En prime, certaines collectivités locales ont beaucoup augmenté leur taux de calcul de la taxe foncière, comme à Paris (+ 51,9 % cette année), à Grenoble (+ 25 %), à Metz (+ 14,3 %), à Lyon (+ 9 %)…
Mais ce n’est pas tout: certaines municipalités, situées dans les zones sujettes à une forte pression immobilière, ont obtenu de pouvoir surtaxer les résidences secondaires, qui restent, elles, toujours assujetties à la taxe d’habitation. Celle-ci pourra ainsi être augmentée de 5 à 60 % par rapport à son niveau normal. La mesure s’appliquera à compter de 2024, dans près de 4 000 communes, contre environ 1 200 initialement. Et ces mêmes communes pourront par ailleurs augmenter la taxe sur les locaux vacants. Les propriétaires ne sont pas au bout de leur peine. Ils vont trinquer en 2023, et plus encore en 2024.
Les propriétaires immobiliers sont-ils maltraités en France?
Le gouvernement semble estimer que les propriétaires sont plus riches que la moyenne des Français et qu’ils peuvent payer pour ceux qui ne le peuvent pas. C’est une manière de satisfaire le profond désir d’égalitarisme qui anime nos concitoyens, ainsi que Tocqueville l’exprimait déjà il y a presque deux siècles. Or, les propriétaires immobiliers ne sont pas nécessairement riches. Pour une large partie d’entre eux, ils appartiennent aux classes moyennes.
On retrouve notamment parmi eux un certain nombre de retraités ayant économisé toute leur vie pour acheter leur maison principale, ou acquérir un bien modeste qu’ils mettent en location afin de disposer de revenus complémentaires. Ils n’ont pas forcément fait une bonne affaire car le patrimoine, dans notre pays, est largement surtaxé. Comment justifier que les prélèvements sur la propriété des ménages y atteignent 4,5 % du PIB, contre seulement 1 % en Allemagne? Quant aux prélèvements sur les revenus du capital des ménages, ils s’élèvent à 1,85 % du PIB en France, contre moins de 0,7 % outre-Rhin.
D’autres alourdissements de la fiscalité sont-ils à redouter?
Il faut s’attendre à la disparition de certaines niches fiscales, comme le dispositif Pinel. Ou encore à la fin du bouclier énergétique. N’oublions pas non plus les hausses latentes d’impôts liées à l’immobilisme ou à l’insuffisance de revalorisation des barèmes d’imposition. Elles sont loin d’être négligeables, en particulier pour les Français assujettis à  l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ; ou ceux qui doivent payer des droits de donation ou de succession. En matière d’IFI, un contribuable devient imposable à compter d’un montant de 1.300 000 euros d’actifs immobiliers.
Mais ce barème n’a pas bougé depuis 1982! Or, depuis, un appartement à Paris peut avoir vu sa valeur multipliée par 2, 3 ou 4 selon les cas… Ainsi, même des propriétaires relativement modestes et ne disposant pas d’un appartement luxueux peuvent devenir redevables de l’IFI. La même injustice s’applique en matière de droits de donation et de succession: les seuils d’imposition sont restés identiques depuis 2012 alors que chaque année, l’inflation fait grimper la valeur des actifs. Quand la hausse des prix se limitait à 1,5 ou 2 %, cela allait encore. Mais à 5 % d’inflation, c’est une autre affaire.
Quid du projet gouvernemental de baisser les droits de succession?
Il ne s’agit pas d’un projet, mais d’une promesse. Emmanuel Macron, durant sa campagne pour l’élection présidentielle, avait pris l’engagement d’alléger les droits de donation et de succession. Il devait également favoriser les donations aux neveux et nièces, et aux enfants d’un autre mariage. Il devait enfin augmenter l’abattement sur les successions en ligne directe (parents à enfants) de 100 000 euros, aujourd’hui, à 150 000 euros. Il n’a pas tenu ces promesses. Tout comme Bruno Le Maire, qui avait promis de supprimer totalement la CVAE pour les entreprises en 2024. Ces revirements engagent la crédibilité de nos dirigeants.
Les entreprises ont-elles été trahies?
En 2023, le gouvernement a supprimé la moitié de la CVAE payée par les entreprises. En 2024, cette contribution calculée non pas sur les résultats mais sur la valeur ajoutée des entreprises devait totalement disparaître. Et voilà que le gouvernement annonce finalement la disparition de la deuxième moitié de la CVAE en quatre tranches, de 2024 à  2027. On peut y voir une hausse d’impôt par défaut. Les entreprises espéraient une baisse de 8 milliards d’euros du fait de la disparition de la CVAE ; elles devront patienter, malgré les promesses qui engageaient le gouvernement.
Et peut-être doivent-elles s’attendre à un certain nombre de coups de rabot, comme ceux envisagés sur les aides à l’apprentissage, le crédit impôt-recherche, ou encore certaines réductions de cotisations sociales au-delà 1,6 fois le Smic… Enfin, les redevances des concessionnaires aéroportuaires ou autoroutiers seront augmentées. Inévitablement, cette décision sera répercutée sur le prix des péages et des billets d’avion. Et ce sont les usagers qui en feront les frais.
La France est vice-championne du monde des prélèvements obligatoires. Comment sortir de cette spirale infernale?
Il faudrait pour cela beaucoup de courage à ceux qui nous gouvernent, pour s’attaquer à la dérive des dépenses publiques. C’est le cœur du problème. Notre pays est de très loin le plus dispendieux en matière de dépenses sociales, y consacrant année après année 33 % de son PIB, contre 23 % (dix points de moins!), en moyenne, dans les pays de l’OCDE. La France consacre 2 points de plus de PIB (soit 50 à 60 milliards d’euros) pour les retraites que les autres pays d’Europe ; et 1,5 point de plus en en matière sociomédicale.
Tout cela est anormal. Il est injustifiable de demander des efforts aux contribuables, alors que l’État n’en fait aucun, de son côté, pour réduire ses dépenses. Lors du vote du budget, à l’automne 2022, le gouvernement avait dit: «Nous n’augmenterons plus les dépenses publiques.» Mais il n’a eu de cesse de distribuer des primes, aides et subventions aux Français.
Le contexte ne justifiait-il pas ces coups de pouce de l’État?
L’inflation et la guerre en Ukraine ont été de merveilleuses excuses pour dépenser plus. Tout comme le Covid. Nous ne sortons pas de la politique du «quoi qu’il en coûte», dont le coût pour l’État s’est élevé, en 2020 et 2021, entre 170 et 200 milliards d’euros. En 2020, les dépenses publiques ont grimpé jusqu’à 60 % du PIB, du fait de la crise du Covid. En 2022, elles représentaient encore 57,5 % du PIB alors que le «quoiqu’il en coûte» n’était plus justifié. Depuis deux ans, les dépenses publiques n’ont baissé que de 55 milliards d’euros.
C’est très insuffisant par rapport aux hausses des années 2020/2021. On a profité du contexte pour conserver des niveaux de dépenses publiques extraordinairement anormaux. Mais le Covid, l’inflation ou la guerre en Ukraine ne peuvent être des excuses. Ce ne sont que des prétextes à un manque de courage. Cette passivité est dangereuse pour la France. L’augmentation continue des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires conduit à l’affaissement de la France. Mais nos gouvernants préfèrent se voiler la face: ils vivent des promesses démagogiques qu’ils n’ont de cesse de faire aux citoyens.
7 commentaires
Qu’attend le peuple pour exiger la suppression du statut public sauf pour l’Armée. Le statut public n’est pas le service au public
Il n’y a pas que sur les promesses fiscales que le Président n’a pas tenu les engagements pris ou déclarés . Globalement sa politique depuis son élection en 2017 aura été un échec et rien n’indique qu’il veuille choisir une autre voie. Plus que jamais on peut dire que les promesses n’engagent que ceux qui les entendent ce qui fragilise la vie politique et par conséquent l’économie de la Nation
« Il n’a pas tenu ces promesses. »
« un manque de courage. »
La messe est dite, cet homme présomptueux ne laissera aucune trace dans l’Histoire, à moins que des événements encore plus graves que les gilets jaunes ou les émeutes récentes ne rappellent à ceux qui nous suivront son bilan catastrophique : prélèvements records, dépenses à la dérive, éducation en berne, hôpitaux débordés, manque de médecins et de médicaments, diplomatie détruisant l’aura de notre pays, défense et sécurité faillibles…
Non, décidément, aucun président n’aura suscité autant d’espoir puis de déception !
La décision de fermer l’économie le 17 mars 2020 revient au premier ministre Édouard Philippe largement pressenti à l’élection présidentielle .
C’est aussi l’homme des 3 CRS sur le gazole qui a déclenché les gilets jaunes et aussi les 80 km/h et ce n’est et ne sera jamais fini. Vive l’ENA ou l’ENSP
Je n’ai pas écrit 3CRS mais 3 cts
Vous aurez rectifié
Ne nous faisons aucune illusion, ce gouvernement est là pour démolir la France et les Français, donc il ne fera RIEN pour améliorer les choses, bien au contraire.
Ce gouvernement n’a aucune compassion pour les Français, il regarde la France se démunir sans aucun regret.