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Les anticipations rationnelles des contribuables

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Depuis trois ans, au prétexte de crise, le contribuable français croule sous une avalanche d’impôts nouveaux. Maître Jean Philippe Delsol, avocat fiscaliste et administrateur de l’IREF, démontre que non seulement ces politiques sont inefficaces (à cause des anticipations rationnelles des contribuables) mais qu’elles sont aussi nuisibles pour la croissance en bloquant toute innovation.

Le prix Nobel d’économie a été décerné il y a dix jours à deux économistes de la fameuse école de Chicago, Thomas Sargent et Christopher Sims. Ils ont en commun d’être des économètres, usant et abusant de modèles mathématiques nourris de milliers de données statistiques – ce qui ne nous les rend pas sympathiques – et d’avoir développé la théorie des « anticipations rationnelles ». Leur thèse (fort ancienne d’ailleurs) : les individus savent tirer parti des informations qu’ils reçoivent ; or les décisions de politique monétaire et budgétaire sont des signaux auxquels les décideurs vont réagir, et la plupart du temps à l’inverse des objectifs visés par les politiques en question ; celles-ci deviennent donc vaines et contreproductives.

C’est évidemment un pavé dans le jardin des keynésiens et des dirigistes de toutes sortes, même si la théorie elle-même a été jugée insuffisante par les économistes libéraux de l’école autrichienne, qui sans doute débouchent sur la même conclusion (ineptie du dirigisme) mais à partir d’une analyse tout à fait différente (l’incertitude radicale caractéristique des comportements humains empêche toute planification, seules la liberté et les institutions importent).

Les contribuables ne se laissent pas faire

De façon moins savante et sans entrer dans les raffinements de l’analyse, retenons de ces approches que les hommes ne sont pas si bêtes, pas autant que les gouvernants le croient ou le voudraient. Les contribuables non plus. Ils savent anticiper et ne se prêtent pas toujours au jeu que l’Etat keynésien voudrait leur imposer. Les agents économiques se comportent de manière intelligente et adaptent leurs actions au contexte. Les mesures que décrète l’Etat pour gérer l’économie sont prises en compte par chacun pour faire évoluer son propre comportement et ses choix de consommation ou d’épargne, de travail et d’investissement.

Certes l’autorité publique peut prendre les gens par surprise et les empêcher de s’adapter, mais jamais pour longtemps. Si l’Etat institue une tranche d’imposition sur le revenu de 100% ou même moindre mais considérée comme insupportable par les contribuables, ceux-ci la paieront la première année parce qu’ils auront été pris par surprise, mais ils ne se laisseront pas faire au-delà. L’année suivante, ils travailleront au noir, ne déclareront pas leurs plus-values, arrêteront de travailler ou s’abstiendront de toute activité supplémentaire, ou encore ils partiront à l’étranger … Les citoyens ne se laissent pas faire : la décision finale de l’efficacité des politiques économiques leur revient au travers de leur propre comportement.

Mais les interventions politiques freinent la croissance

Est-ce à dire que l’on ne doit pas s’inquiéter des interventions multiples de l’Etat ? Bien que les contribuables aient des parades efficaces, les initiatives fiscales et monétaires perturbent leur vie quotidienne et obscurcissent leur horizon. Faute de voir loin, ils vivent au jour le jour.

L’homme, et particulièrement l’entrepreneur, se situe dans la durée. Pour construire des projets, il a besoin de faire des hypothèses qui sont fonction de l’environnement dans lequel il évolue. Et bien sûr si cet environnement, notamment sur le plan fiscal et juridique, est mouvant, il lui sera plus difficile de planifier son action. Chaque entrepreneur est un innovateur, il tente de réaliser des gains dans le futur. Il collecte des informations sur les attentes ou les besoins qu’il espère pouvoir satisfaire ou mieux satisfaire. Il spécule ainsi en permanence sur l’avenir et au travers de cette spéculation, il arrive à créer de nouveaux produits ou services pour la plus grande satisfaction des consommateurs, et pour son propre profit s’il réussit, ou à ses frais et au risque de sa propre faillite s’il échoue, c’est-à-dire s’il a mal anticipé.

Le comportement de chacun est donc, d’une part, d’autant plus rationnel que l’information est connue, ce qui suppose un environnement stable, et d’autre part très réactif aux décisions publiques de telle façon que celles-ci s’avèrent souvent infiniment moins efficaces que prévu. Ainsi par exemple, lorsque le gouvernement augmente la masse monétaire, accroît les dépenses publiques et le déficit pour relancer l’économie, les gens anticipent de l’inflation et font pression pour des augmentations de salaire qui viennent contrecarrer les effets des mesures de relance et contribuent elles-mêmes à soutenir l’inflation. Plus encore, un excès de dépense publique est annonciateur d’augmentations d’impôts que les contribuables anticipent en constituant une épargne de précaution dont les effets pèsent négativement sur l’incitation à consommer qu’étaient censées produire ces dépenses publiques.

Stabiliser les politiques de stabilisation

« Seules des politiques stables et connues des citoyens sont probablement capables de produire des résultats favorables de manière durable », écrit Sargent. Pour que les acteurs de l’économie soient le plus efficaces possibles, les règles du jeu doivent être claires et fixes, de telle façon qu’ils puissent anticiper le mieux possible. Et c’est probablement l’incertitude fiscale permanente plus encore que le niveau exorbitant de la pression fiscale qui nuit à l’activité en France. Ces derniers temps, les lois de finances se sont succédées de mois en mois, prenant effectivement les contribuables par surprise pour imposer les plus-values, les boissons sucrées ou non, les hauts revenus, les banques, l’énergie, les voitures, les télécoms, les forêts, les trains…

Face à la crise, comment garder l’illusion que les Etats puissent sauver le monde en le soumettant au choc permanent d’une fiscalité aléatoire et imprévisible ? Aujourd’hui la rationalité pousse les gens à faire le dos rond, en attendant que prenne fin l’avalanche de sommets, de réglementations et de montages hasardeux. Dans ces conditions, la reprise économique peut se faire attendre, et l’endettement s’aggravera sans doute.

Pendant ce temps, il existe des pays heureux qui ne sont pas endettés et qui ont rompu avec les politiques « actives ». Mais du fait de la mondialisation pourront-ils tenir assez longtemps ? Pour que revienne la confiance au niveau mondial, il est grand temps que les économies malades de l’Etat en soient libérées.

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10 commentaires

Anonyme 1 novembre 2011 - 1:10

CSG a 20%
Dans cette optique de stabilité ne faudrait il pas simplifier au maximum l’impôt en prélevant une CSG de 20% sur tous les revenus (fusion de l’IR et de la CSG mais cote CSG) ? On saurait que l’état prend systématiquement « 20% » et cela simplifierait les calculs de rentabilité.

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Anonyme 1 novembre 2011 - 7:06

Dangereux
La CSG pèse sur les coûts du travail qui sont trop élevés en France : 10 points de plus qu’en Allemagne. Résultat, les entreprises et les emplois quittent la France. Petit rappel, la France est le pays de l’OCDE qui a perdu le plus d’emplois industriels après la Grèce.

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Anonyme 1 novembre 2011 - 9:42

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Anonyme 1 novembre 2011 - 4:39

Bonne Analyse
A cela, nous pourrions ajouter que le délire législatif qui affecte le France depuis 4 ans ont des conséquences tout aussi néfastes sur l’économie réelle. Il semble bien que ce quinquennat « Sarkozy » s’est fixé pour objectif le record de lois votés sans se préoccuper d’efficacité. Le seul objectif pourrait bien être d’apparaître comme réformateur.

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Anonyme 1 novembre 2011 - 8:45

article très pertinent sur la précarité des actes étatiques
cet article est très pertinent , car il dénonce que l’État intervient sans cesse pour changer les règles du jeu avec l’insuccès que l’on sait : les dirigeants à vrai dire , ne cherchent que le confort de la place quel qu’en soit le prix à payer

C’est ainsi que l’URSS est morte de la bouffonnerie alliée à la cruauté de ses dirigeants

La population soviétique a riposté en ne faisant plus d’enfants….et en noyant son chagrin dans l’alcool.

En France grâce à l’avortement , DES femmes ne veulent pas d’avenir par la procréation : Ségolène Royal s’est trompée , les françaises « européennes  » font la grève de la grossesse , la grève du ventre….

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Anonyme 3 novembre 2011 - 6:41

Entièrement d’accord!
Une fiscalité simple et stable serait la bienvenue dans notre beau pays. Et le prélèvement de l’impôt à la source et non un an après permettrait au citoyen de se libérer l’esprit et d’anticiper encore mieux. On peut toujours rêver…

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Anonyme 4 novembre 2011 - 1:39

Prélèvements hallucinants
Nos compatriotes continuent d’être « écrasés » par de nouveaux prélèvements alors que nous sommes déjà les champions …..???!.

Rien, strictement rien n’a été fait pour réduire massivement les dépenses publiques….?

Je rappelle la dette de la FRANCE de 1700 milliards d’euros à ce jour…!

Pour rembourser cette dette sur 30 ans….- capital + intérêts à 4% l’an – (taux irréaliste sur une telle période) la charge annuelle représente 92,5 milliards d’euros…! (74,48 milliards d’euros sur 50 ans).

Sachant que le déficit budgétaire ANNUEL de la FRANCE est de 80 milliards environ en 2011 – SANS les intérêts de la dette – il faudrait que l’état réduise immédiatement ses dépenses publiques ANNUELLES de 80 + 92,5 =

172,50 milliards d’euros…..!!!!!! ET NE SURTOUT PAS AUGMENTER LES PRÉLÈVEMENTS…!

Nous savons que la croissance sera nulle ou très faible pendant des années ( de 0,50 à 1 % l’an maximum) je voudrais que l’on m’explique pourquoi la majorité des commentateurs considèrent que tout est réglé…???????

Thierry FOURGEAUD Consultant à 44100 – NANTES

le 4 Novembre 2011

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Anonyme 7 novembre 2011 - 4:49

derniére decade economique 2000-2010
Entiérement d’accord avec vous, il faut savoir qu’en cette derniére décade le P.I.B a augmenté de 25%, le prélévement obligatoire de 24 % (donc à l’équilibre, mais les DEPENSES PUBLIQUES de 32%.La dette de la France de 1976 à 2007 était de 1200milliards et en 4 ans du Président actuel elle a augmentée de 469 milliards, et il a outrecuidance d’imposer la régle d’or pour 2013 à son successeur?

Notre dernier budget en équilibre date de 1975.

P.E.G.

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Anonyme 5 novembre 2011 - 4:35

prelevements obligatoires
État doit assurer ses fonctions régaliennes avec moins de 40/100 de prélèvements .Ce devrait être la seule règle d,OR! Les citoyens savent mieux gérer que les politiques dont le seul souci est la réélection!Les vrais impécunieux seront aidés par un public responsable sans assistance débilitante

Tixier.georges @orange.fr!

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Anonyme 11 novembre 2011 - 3:49

Merci à tous
Merci à tous pour ces commentaires encourageants pour continuer à écrire et diffuser. Nous sommes nombreux a penser qu’il faut des lois plus stables et un Etat plus économe.

Jean-Philippe DELSOL

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