Certes, la politique fiscale du gouvernement est plus qu’ambiguë. Plus d’une dizaine de nouvelles taxes et les coûts de mise en œuvre de la retenue à la source renchérissent la charge que supportent les contribuables. L’exonération partielle de taxe d’habitation relève de l’arbitraire fiscal. Bien sûr, les déclarations fiscales sont toujours plus complexes et ceux qui déclarent l’IFI ne le démentiront pas. Mais l’annonce par Emmanuel Macron au magazine Forbes de la suppression de l’exit tax en 2019 est tout à la fois juste et bonne. Cette taxe qui impose les plus-values latentes des résidents français qui partent se domicilier ailleurs frappe indûment des revenus non encore réalisés.
La décision de supprimer cette taxe est d’abord juste parce que rien ne justifie qu’on entrave la liberté de chacun de nous d’aller et venir, de changer de domicile, de quitter la France. L’argument qui évoque le fait que ceux qui partent ont profité des bienfaits de l’Etat (instruction publique, sécurité sociale, environnement…) est infondé dans la mesure où ceux qui sont appelés à payer l’exit tax sont significativement plus riches que les autres et ont donc contribué plus largement que la moyenne aux dépenses sociales prélevées en France de manière progressive pour une grande partie. Sur la base de ce raisonnement, il faudrait plutôt leur rendre de l’argent qu’ils ont versé en surabondance.
Pourquoi avons-nous légitimement trouvé juste de favoriser la libre circulation à travers l’Europe et voudrions-nous l’entraver avec le monde ? D’ailleurs, sous la pression de Cour de justice européenne, la France a dû modifier sa copie pour ne taxer immédiatement que les contribuables qui « s’exilaient » en dehors de l’Union européenne ; pour ceux qui transféraient leur domicile dans celle-ci, elle a dû accepter de leur accorder un sursis d’imposition.
Cette mesure de suppression de l’exit tax est également bonne en ce sens qu’elle sera favorable à l’économie. Censée limiter les exils fiscaux, cette taxe n’a fait que les favoriser car nombreux sont ceux qui ont raisonné en considérant que si la France était capable d’instituer une telle mesure, elle pourrait faire pire encore demain, et qu’il valait donc mieux ne pas remettre la décision de partir. Cette mesure n’a rapporté « que » 10 millions d’euros par an environ depuis 2011, indépendamment des impositions en sursis qui sont exonérées après 15 ans. Les départs à l’étranger ont augmenté : selon un rapport de Bercy remis aux parlementaires, plus de 4 326 contribuables ayant des revenus supérieurs à 100 000€ ont quitté la France en 2015, soit trois fois plus qu’en 2010 ; de 2012 à 2015 il y en a eu 15 000. Les départs de redevables assujettis à l’ISF sont autour de 800 par an, plutôt en hausse. M. Macron a souligné à juste titre qu’en pénalisant la sortie, la France inquiétait les entrepreneurs étrangers souhaitant venir y développer des affaires, car ils pouvaient légitimement craindre
de ne plus pouvoir sortir sans frais excessifs. On n’attire pas les investisseurs en leur proposant de devenir prisonniers du territoire dans lequel ils auront investi. Une économie ne peut pas être ouverte et fermée à la fois et le choix de la liberté est celui qui a enrichi les nations depuis deux siècles.
Le parti Les Républicains s’enferme dans une posture protectionniste qui sera dommageable pour notre pays. Il a entièrement tort de critiquer la proposition de l’actuel président de la République pour la simple raison que cette mesure a été instituée par son prédécesseur. M. Sarkozy a commis une grave erreur en pensant qu’une telle taxe serait efficace. Les Républicains commettront la même erreur en s’y accrochant. La dernière élection présidentielle a pourtant montré à la droite française à quelles impasses menaient de telles illusions. La droite française serait-elle encore la plus bête du monde comme le disait Guy Mollet ?