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Crises des marchés vs Crises des Etats

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Cet article de Jean-Philippe Delsol, administrateur de l’IREF, a été publié par le quotidien The Wall Street Journal dans son édition du 12/08 :
Market Crises Versus Sovereign Crises

Les marchés ont toujours bon dos. S’ils vont bien, ils sont profiteurs. S’ils vont mal, ils sont les fauteurs de troubles. Dans tous les cas, ils sont coupables. Pourtant, ce sont les Etats qui sont à l’origine de leurs propres malheurs pour avoir cru longtemps que leur crédit était sans limites.

Les subprimes dont la défaillance a causé la crise de 2008 étaient des prêts peu ou prou garantis par l’Etat américain. La Grèce est tombée pour avoir multiplié les dépenses publiques. Elle a embauché à tour de bras des fonctionnaires : 800 000 sur une population active de 5 millions de personnes. Elle a enflé sans mesure son secteur public qui représente 40% de son PIB. Elle a caché son déficit public. Tous les Etats du vieil Occident ont financé par l’emprunt leurs politiques sociales sans fin et sans mesure : l’Italie a une dette publique de 120% de son PIB, l’Irlande de 100%…. La France, 87% de son PIB, c’est-à-dire environ deux fois ses recettes budgétaires annuelles ou encore l’équivalent pour une entreprise d’une dette égale à deux fois son chiffre d’affaires annuel.

Devant le désastre, les Etats ont utilisés des remèdes pire que le mal, empruntant encore à tout va pour relancer l’économie déjà malade de l’excès de sa puissance publique. Les Etats-Unis y ont englouti 1 600 milliards de dollars en vain en deux ans et la France s’est lancée dans un grand emprunt, de 35 milliards d’euros, en même temps qu’elle appelait, paradoxalement, à la maitrise du déficit public.

Cette crise de 2008 a peut-être été le prétexte pour certains Etats à pouvoir à nouveau ouvrir le robinet des dépenses publiques en invoquant les mânes du keynésianisme. En tous cas, celui-ci leur a servi de justification. Mais ce flux immense d’argent avait un coût à la charge des contribuables d’aujourd’hui ou de demain. Lorsque l’Etat dépense, ça n’est jamais qu’avec l’argent des autres. Il n’en a pas d’autre. Et lorsqu’il déverse de l’argent dans l’économie pour soi-disant la soutenir, il empêche les contribuables qu’il ponctionne d’investir à due concurrence. Comme le disait Bastiat, il ne faut «pas juger des choses seulement par ce qu’on voit, mais encore par ce qu’on ne voit pas. » Ce qui se voit, ce sont les emplois ou les investissements immédiatement créés grâce à l’intervention publique. Ce qui ne se voit pas, c’est ce que les particuliers ou les entreprises auraient pu faire avec cet argent s’il avait été laissé entre leurs mains. L’argent englouti dans la grande lessiveuse étatique est dépensé selon des critères moins pertinents et moins efficaces que ceux qu’auraient utilisés les contribuables pour investir le même argent s’il ne leur avait pas été pris. Les Etats l’avaient oublié, mais pas les marchés ni les agences de notation auxquelles les Etats demandaient en 2008 à l’égard des Banques la rigueur qu’ils récusent désormais lorsque ces mêmes agence en font preuve à leur endroit.

Certes, les marchés ont profité de la situation. Ils ont prêté à la Grèce en pensant profiter des taux qui montaient sans prendre le moindre risque dans une dette souveraine libellée en euros. Il s’agissait en quelque sorte de nouveaux subprimes ! Mais la fête est finie. Après que la détermination de l’Allemagne l’ait heureusement emporté pour que les prêteurs de la Grèce soient mis à contribution, et après que les Etats-Unis aient perdu leur note Triple A à défaut d’engagement pour réduire suffisamment les déficits publics des dix prochaines années, les dettes souveraines ne sont plus ce qu’elles étaient. Elles comportent leurs risques, peut-être plus de risques que d’autres eu égard à l’endettement vertigineux et irresponsable de ces emprunteurs publics. Mais ceux-ci ne pourront plus continuer de vivre à crédit. Faute d’argent, les collectivités publiques vont enfin être obligées de faire des économies. Il faut espérer que les marchés auront un peu de mémoire et ne leur prêteront plus aussi facilement. C’est la remise en cause forcée de l’Etat providence. Elle sera salutaire si elle permet aux vieux pays occidentaux de se souvenir que nous ne sommes pas assez riches pour vivre sans travailler dur et pour dépenser sans compter, quand bien même ils ne s’en souviendraient que parce qu’ils n’auraient pas d’autre choix. Les crises peuvent avoir leurs vertus.

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