Une presse régionale antilibérale : l’exemple paradigmatique de Ouest France

Il est loin le temps où la presse était majoritairement de droite. C’est également le cas au niveau régional, comme il ressort de son titre le plus diffusé.

Une lecture régulière du titre régional de loin le plus diffusé, Ouest France, permet de comprendre combien les idées de gauche ne sont pas seulement majoritaires au sein de la presse nationale. Bien que nous prenions connaissance quotidiennement de son contenu, nous avons choisi d’en présenter le biais idéologique au hasard (nos lecteurs peuvent nous croire) en prenant pour exemple l’édition du dimanche 23 mars.

A la une, le titre phare concerne la colocation, mais le second titre le plus important s’intitule « Dans la rue contre le racisme ». En cinquième page, un article  sur le sujet se contente de parler « des Français encore mobilisés » contre le racisme et l’extrême droite sans préciser le caractère décevant du nombre des manifestants dans l’Ouest, mais aussi dans toute la France. Il se borne également à une rapide référence à la polémique née de l’affiche de LFI. Pas de mention des heurts habituels lors des manifestations de gauche et d’extrême gauche, pas plus de mention des slogans parfois peu reluisants repris dans certains cortèges, mais peut-être était-ce dû à l’heure de parution du journal.

En page 2, une grande page est consacrée à une « enquête dans un Royaume-Uni miné par la pauvreté » (il est vrai que les Anglais n’ont pas la chance de vivre dans notre pays si prospère), écrite par la correspondante du quotidien à Londres. Cette dernière, nous précise le sous-titre, a « constaté l’échec de décennies d’austérité ». En cause évidemment « l’implacable Première ministre Margaret Thatcher » qui a fermé « mines et usines  à tour de bras, dans les années 1990 » (pas dans les années 1980 ?). Un « autre tournant » provient du « retour de son Parti conservateur au pouvoir, de 2010 à 2024 », qualifié de tournant de « l’austérité idéologique ». Même un lecteur peu informé se demanderait pour quelle raison les conservateurs auraient tenu le gouvernement durant 14 années consécutives si le tableau cataclysmique du Royaume-Uni ainsi présenté était exact. Un lecteur plus informé se demanderait aussi pour quelle raison l’horrible Thatcher a été réélue à deux reprises, pour quelle raison une minorité non négligeable d’ouvriers en est venue à voter tory, pour quelle raison encore un pays décadent, largement derrière nous avant l’arrivée au pouvoir de Thatcher, nous a dépassé sur le plan économique en dépit des difficultés et des erreurs de ses gouvernants, pour quelle raison enfin un budget croissant serait « austéritaire ».

En page 11, une page complète célèbre le 75^e anniversaire de la mort d’Emmanuel Mounier, le très antilibéral philosophe du personnalisme. L’entretien dithyrambique donné par l’ancien inspecteur du travail Jacques Le Goff (à ne pas confondre avec le grand historien) rappelle combien Mounier éprouvait « un sentiment d’étouffement et de révolte contre le culte capitaliste de l’argent » et il estime que le personnalisme « est une source d’inspiration pour penser l’économie, remise sur ses pieds au service d’autre chose que du seul intérêt financier ».

Quant aux pages Culture, elles ne versent pas plus dans l’objectivité. En page 14 du magazine, la nouvelle version de Blanche Neige sortie par Disney, est-il dit, « ne méritait pas tant de polémiques », puisque le film est un « honnête divertissement familial ». Le fait qu’une « ravissante métisse » joue l’héroïne en vertu d’un wokisme très contemporain ne paraît poser aucun problème au journaliste, même s’il regrette les nains de synthèse. Avec ce quotidien, la France est vraiment à l’Ouest.