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Tout est permis ou presque à un ancien ou à un futur président de la République

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Au pays de l’égalitarisme forcené qu’est la France, le chef de l’État reste au-dessus des lois.

Le président de la République a toujours été, de fait et non de droit bien entendu, doté des plus grands pouvoirs sous la Ve République, hors période de cohabitation. Titulaire du pouvoir exécutif, le Premier ministre n’étant qu’un commis ou un collaborateur, titulaire également du pouvoir législatif, la majorité à l’Assemblée nationale étant aux ordres, le président n’était pas gêné par une justice bridée. Quant au Conseil constitutionnel, cour suprême de musée Grévin, pour reprendre la cruelle expression de Mitterrand, il était constitué de personnes à l’indépendance et aux compétences juridiques parfois plus qu’évanescentes. Les choses ont très progressivement changé à partir des années 1970, avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, puis avec des juges judiciaires qui ont souhaité s’émanciper, parfois non sans polémiques.

Le président de la République n’en demeure pas moins l’héritier de la personne royale au sein de ce que l’on a judicieusement appelé une monarchie républicaine. Un régime quasi-unique au monde et participant de la malheureuse exception française qui a même connu récemment un nouveau développement : ce n’est plus seulement le chef de l’État en poste qui bénéficie de passe-droits, ce peut être un éventuel futur chef de l’État.

Nous faisons référence à l’épisode Marine Le Pen, défendue au nom de la « souveraineté du peuple ». Condamnée sévèrement par des juges dits « rouges » qui auraient décidé coûte que coûte de l’empêcher de se présenter à la prochaine élection présidentielle, la cheffe du Rassemblement National aurait dû bénéficier, dit-on, d’un privilège putatif : l’onction populaire laverait tout, avant même de l’avoir reçue, à commencer par une si dérisoire condamnation à un détournement de fonds. Vous pouvez donc voler, piller, peu importe : en votre qualité de dirigeant ou de fondateur d’un parti politique, tout vous serait permis puisque vous vous présenterez ultérieurement devant le « peuple » à l’élection présidentielle. Et le « peuple », comme la terre jadis, ne ment jamais.

C’est surtout un ancien président de la République qui continue de bénéficier du statut de personne au-dessus des lois. Rappelons que le chef de l’Etat est reconnu lors de sa cérémonie d’investiture comme le grand maître de l’ordre national de la Légion d’honneur et que la dignité de grand-croix lui est conférée. Cette dignité au sein de la plus haute distinction honorifique de notre pays est exceptionnelle, d’autant plus qu’il n’existe que quelques dizaines de titulaires de la grand-croix, 75 au maximum, tel Bernard Arnault ou Serge Klarsfeld. L’article R91 du code de la Légion d’honneur prévoit que toute personne condamnée définitivement à une peine de prison égale ou supérieure à un an ferme est « de droit exclue » de l’ordre. Or, Nicolas Sarkozy a été définitivement condamné à trois ans de prison, dont un ferme, pour corruption à la suite d’un arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 2024 qui a rejeté son pourvoi. Le grand chancelier de l’ordre avait donc annoncé le 3 mars 2025 le lancement de la procédure disciplinaire au titre du retrait de la Légion d’honneur de Nicolas Sarkozy et ce, au nom du devoir « d’exemplarité ». La procédure devait se clore avec un décret du président de la République actuel en sa qualité de Grand maître de l’ordre.

Eh bien, ce décret ne sera pas pris ! En effet, Emmanuel Macron a déclaré le 24 avril qu’il s’opposait au retrait de la Légion d’honneur de l’ancien chef de l’État, au terme d’une argumentation alambiquée, bref macronienne. Il a d’abord rappelé qu’il était constitutionnellement « garant » de l’institution judiciaire, ce qui devait logiquement l’amener à signer un décret de retrait, simple conséquence d’un arrêt rendu par la plus haute cour de notre ordre judiciaire. Mais, en même temps si l’on peut dire, Emmanuel Macron a argué que Nicolas Sarkozy, certes condamné à titre définitif en France, avait formé un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, ce qui revient à signifier que la justice française n’est pas souveraine (en droit, une décision de la Cour européenne n’annule pas une décision interne, mais le plaignant peut ensuite solliciter la révision de la décision interne de condamnation). Mais c’est surtout la dernière partie de l’argumentation qui retient l’attention : selon Emmanuel Macron, Nicolas Sarkozy « mérite le respect », « du fait qu’il a été élu président par le peuple souverain ». L’avocat de Nicolas Sarkozy avait, lui, appelé à distinguer l’homme de la fonction éminente pour sauver la Légion d’honneur de son client (BFMTV, 8 mars 2025).

Moralité (si l’on peut dire) : si vous êtes un ancien chef de l’État et que vous êtes ensuite devenu un repris de justice, au sens courant de l’expression, le devoir d’exemplarité actuel cède devant la volonté populaire passée. Décidément, notre pays est loin, très loin d’être un État de droit.

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21 commentaires

FrançoisLibre 28 avril 2025 - 7:43 am

Le problème, c’est la condamnation complètement pipeau de Nicolas Sarkozy. Aucune preuves, manipulation des faits, et petite vengeance politique par des juges à la botte des dirigeants socialistes. Donc même si Nicolas Sarkozy a été condamné, Emmanuel Macron considère que c’est une parodie de justice et qu’on ne va pas lui enlever sa légion d’honneur pour autant….

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Broussard 28 avril 2025 - 8:01 am

Aïe !
une République bananière de plus ?
l’actuel “président” ne se ménage-t-il pas ses arrières et son futur ?
qu’il me soit permis de le croire…

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Eric 28 avril 2025 - 12:55 pm

On parle de la condamnation en appelle du jugement des écoutes e trafic d’influences dit l’affaire Bismut et pas l’ affaire du financement Lybien actuellement en délibérée de premier jugement et ses terribles requisition !

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Barbier 28 avril 2025 - 5:35 pm

J’apprécie les analyses de l’IREF, mais je suis surpris par la véritable haine temoignée dans les chroniques concernant l’affaire des assistants parlementaires du Rassemblement National ou Nicolas Sarkosy.

Les contributeurs y raisonnent comme si l’institution judiciaire française était une collection absolument unique dans le monde réel d’individus parfaits, sans passions tristes et/ou engagement politiique extrême, ou, à tout le moins, capables de les dominer dans le cadre de l’exercice de leur très haute fonction.

Pour au moins un bon tiers d’entre eux, ils noud ont eux-mêmes donné preuve, entre autre par le moyen de leur tristemt célèbre mur des cons, combien ils éraient éloignés de cet idéal de perfection.

Nicolas Sarkosy est certainement beaucoup plus coupable de ne pas avoir tenu compte du rejet par les électeurs du traité européen que d’avoir friquoté avec des intermédiaires douteux dans des entreprises stupides, mais il y a là un tropisme bien connu et partagé, les princes adorent les voyous et les voyous sont fiers d’être ainsi distingués.

Les assistants parlementaires et la répartition de leur tãches. Vaste sujet aux mutilples imbrications et interprétations…

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Alain Charoy 28 avril 2025 - 9:19 am

Les juges partiaux, ça ose tout ; c’est d’ailleurs à ça qu’on les reconnait !

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Marly 28 avril 2025 - 9:52 am

Vous oubliez un peu vite que Marine Le Pen ne sera déclarée coupable que si la cour d’appel le décide. Dans l’entre-temps, elle reste dans le cadre de la présomption d’innocence.

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Feldman Jean-Philippe 28 avril 2025 - 10:48 am

Je ne l’oublie nullement.
Me Jean-Philippe Feldman

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Bernard 28 avril 2025 - 10:43 am

Poutine CDN et la chine etc vous croyez pas qu’ils protègent leurs caste et les royautes c’est pareil et ailleurs c’est le premier ministre qui change tous les quatres matin et personne n’y trouve rien a redire.
Le roi bien dans ses baskets il signe les décrets les lois il est aime comme tout il touche sa royale PENSION au frais de ses royals sujets il est vénéré comme un dieu comme l’empereur du Japon il faut baissé les yeux quand on voit chaque pays voit midi a sa porte et les chefs d’états et ses sujets acceptent ou n’acceptent pas et les bâches seront bien gardées.
Et Chirac avec les journalistes affaires mairie de Paris aux journalistes leurs a dit mon affaire va faire Pchitttt tt c’est se foutre de la gueule de son peuple.
Mitterrand avec ses affaires d’écoute téléphoniques a des journalistes belges leurs a dit discution terminée si j’avais su ce que cet entretient irait je l’aurais refusé.
Et le roi des Belges vous croyez qu’il n’y a rien a redire ainsi.que le Royal Charles III non fait pas touché a ses messieurs ou dames qui nous gouvernent sinon peche de lez Majesté.

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Jean-Aymar de Sekonla 28 avril 2025 - 10:44 am

Bien argumenté !
Et que dire d’un type qui promettait à ses électeurs de faire 60 milliards d’économies par ans pour se faire élire et qui, une fois élu, accable ses électeurs et le autres de plus de 100 milliards de dette par an?

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Oncpicsou 28 avril 2025 - 6:33 pm

Circulez y a rien a voir, ce n’est pas répréhensible dans le “droit” … Vous voyez bien que la belle formule “état de droit” c’est de la poudre aux yeux !

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poivre 28 avril 2025 - 10:52 am

“Décidément, notre pays est loin, très loin d’être un État de droit…….”
En effet mais la Russie de Poutine, la Chine de Xijinping, le Vietnam, la Birmanie, Cuba et compagnie nous en remontrent largement, ce qui devrait vous consoler.

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BEAUCHAMPS 28 avril 2025 - 11:05 am

Je ne comprends pas pourquoi il y a eu la Révolution française en 1789 qui était sensée régler le problème, supprimer la monarchie et supprimer les privilèges des féodaux. En 2025 nous sommes toujours en monarchie, la France est sous le règne d’un seul homme qui a tous les pouvoirs et qui a à ses ordres des vassaux qui obéissent au doigt et à l’oeil. Ce président monarche dicte sa loi et a asservi 68 millions de personnes. Quant au conseil constitutionnel, c’est une institution sous les ordres du président monarche tout puissant, et cette institution qui ne sert à rien et qui nous coûte si chère rejette systématiquement les demandes du peuple dès qu’elles ne sont pas conformes à la volonté du président monarche. D’ailleurs le président monarche a nommé à tous les postes stratégiques ses bons amis afin d’être sûr que toutes ses décisions et toutes ses volontés seront exécutées sans discussion. Donc en résumé des milliers de révolutionnaires sont morts en 1789 pour instaurer la Liberté, l’Egalité et la Fraternité, mais malheusement ils sont morts pour rien, car aujourd’hui la France est toujours sous monarchie dirigée par un seul homme qui a détruit non seulement notre histoire et qui en plus a détruit notre souveraineté. Quant aux privilèges des politiques malgré la loi du 4 AOÛT 1789 qui a abolie tous les privilèges, cette loi n’a jamais été appliquée car aujourd’hui les Français continuent à payer lourdement tous les anciens présidents et tous les anciens ministres à vie, et surtout ces anciens politiques qui ne sont plus en fonction font supporter aux Français tous leurs frais quotidiens exorbitants sans aucun scrupule. Donc nous pouvons dire que la France est toujours sous monarchie, que la Révolution française n’a servie à rien, avant 1789 il y avait la taille, la dime et la gabelle et aujourd’hui c’est pire les gouvernements successifs du président monarche taxent, surtaxent et impôsent les français jusqu’à l’asphyxie, et bien sûr suppriment tous les acquis. Mais ni le président monarche, ni ses vaussaux politicards ne veulent diminuer leur train de vie. Ils continuent sans scrupule à sucer le sang des Français jusqu’à la mort. La monarchie d’aujourd’hui coûte la peau du dos aux Français la preuve en est que la France est en faillite. Et n’oublions pas qu’aujourd’hui la liberté d’expression et la démocratie ont presque disparues.

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Virgile 28 avril 2025 - 12:39 pm

Faut il rappeler à cet auteur qu’il n’y a AUCUNE preuve contre Sarkozy. Depuis quand condamne t’on dans une démocratie sur des présomptions et des accusations politicardes!

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Nicolas Lecaussin 28 avril 2025 - 1:36 pm

La Cour de cassation a confirmé la condamnation dans l’affaire des écoutes…il a même été reconnu coupable deux fois…

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MIMOSAS 29 avril 2025 - 5:53 pm

Condamné pour avoir discuté de peut-être faire ceci ou cela. Un peu léger. Mais comme vous dites ça permet de condamner et ensuite de dire “il est coupable, il a été condamné”.

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Galipon 28 avril 2025 - 5:05 pm

De toute manière quoique vous fassiez nos hommes politiques à quelques exceptions près sont des pourritures!
Je ne sais pas qui peu nous sortir de la, la pourriture s’est tellement installé que la maison France est complètement vermoulue!

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Val Guillaume 29 avril 2025 - 5:14 pm

Tout est tordu . 40% de l hémicycle faisait la même chose que F Fillon mais il a été le seul à plonger. Je laisse à l auteur deviner pourquoi. Cela éclaire la découverte de casseroles de MLP et de Sarkozy. Bizarrement d autres casseroles restent bien enfouies (celles de Macron dont la déclaration d’impôt de 2017 interpellé) , celle de Ferrand frappée judicieusement de prescription. On attend la découverte d autres casseroles, elles sortent de terre avant les élections, c est le printemps électoral .

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MIMOSAS 30 avril 2025 - 12:22 pm

En effet, tout est tordu. Croire que la Justice est impartiale, pourquoi pas, mais force est de constater que certains sont poursuivis et pas d’autres, et que comme par hasard le point commun entre ceux qui sont poursuivis est toujours l’orientation politique à droite.
Les casseroles de Kohler ? Lui, comme Macron, échappe à tout questionnement. Dès que vous êtes à gauche, la Justice vous oublie.
Et derrière, même les plus érudits se servent de ces condamnations pour fustiger, sans questionner la réalité des preuves soumises. Tant que cela concerne des politiques trop à droite ou non appréciés.

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MIMOSAS 29 avril 2025 - 5:49 pm

Si on suit votre raisonnement, il n’y a rien à redire à la décision du tribunal administratif de rétablir le partenariat du lycée Averroès avec l’Etat. Les Juges ont dit, vive les Juges… et ce lycée ne doit absolument plus être suspecté de quoi que ce soit concernant l’entrisme islamique…
Les Juges ont Parlé, honte à ceux qui osent même juste vaguement s’exprimer sur leur impartialité (et donc leurs décisions).

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Essentielliste 1 mai 2025 - 1:04 am

“VOLER, PILLER et..” Ainsi que dit le professeur Feldman parlant de madame Lepen tout lui serait permis sauf que
les “juges rouges” en ont décidé autrement…
Deux remarques:
a/je n’ai pas entendu monsieur le Professeur s’indigner autant lorsque de nombreux élus ont utilisé comme
elle leurs émoluments pour financer leur parti depuis toutes ces dernières années .
Qui aurait dit que Monsieur Chirac a volé et pillé ?
Quant à Monsieur Mitterrand ce n’était pas quelques menus émoluments versés pour soutenir sa campagne
mais bien des détournements gigantesques en bande organisée sur base de fausses factures ! en a-t-il soufflé”
mot ?

b/ enfin et subsidiairement, les juges en question que Monsieur le professeur qualifie entre guillemets de “rouges”
comme pour faire accroire qu’ils ne le sont pas, faut-il rappeler que précisément ces personnes avaient ete parmi
les auteurs du “MUR DES CONS ?

On connaissait la détestation de Mr. Feldmann pour la fille de Mr. lepen mais est-ce si judicieux de sa part de vouloir confirmer le jugement que bien des Personnalités de droite comme de gauche ont qualifier d’excessif et même contraire à l’esprit des LOIS ?? également des Juristes éminents non politisés se sont exprimés dans ce sens.

Alors une petite dernière et petite question : la Justice ne ce moque-t-elle pas elle même de la Justice, Monsieur
le professeur ?

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Boutté 1 mai 2025 - 6:38 am

Quand on voit ce que la souveraineté du Suffrage nous a donné comme Guides Suprêmes, il y a lieu en effet de s’interroger sur l’originalité de la Démocratie des urnes et sur le pouvoir des Juges dans notre pays. Le pouvoir royal avait des limites que notre République ne connait même plus .

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