Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’industrie manufacturière américaine a connu de profondes transformations. Dans les années 1940, ce secteur représentait près de 45 % de l’emploi total aux États-Unis, incarnant la puissance industrielle du pays. En 1950, malgré une croissance économique soutenue, une classe moyenne en expansion et un meilleur accès à l’éducation grâce au GI Bill de 1944, cette part est tombée à 34 %.
Le déclin de l’industrie s’est poursuivi au fil des décennies. Dans les années 1980, elle ne représentait plus que 20 % de l’emploi total, et ce chiffre est tombé sous la barre des 10 % dans les années 2020. Ce recul s’explique notamment par la montée en puissance de pays émergents tels que le Mexique, la Corée du Sud ou encore la Chine, cette dernière ayant rejoint l’Organisation mondiale du commerce en 2001. L’écart des exportations de biens entre les États-Unis et la Chine continue de se creuser, Pékin ayant dépassé les 3 000 milliards de dollars, contre environ 2 000 milliards de dollars pour Washington en 2023, poussant les États-Unis à se replier sur les exportations de services pour compenser ses faiblesses industrielles. Sans compter l’évolution de la part du PIB de l’industrie manufacturière, passant de 23 % en 1997 à 17 % en 2021.
Face à cette désindustrialisation, Donald Trump a tenté de relancer l’industrie nationale à travers une politique commerciale protectionniste., avec l’imposition d’un tarif moyen de 20% et d’un tarif minimum de 145 % sur certaines importations chinoises, en date du 18 avril 2025.
Cette stratégie rend sceptiques les économistes. Les mesures tarifaires adoptées en 2018-2019, avec l’instauration de droits de douane de 10 %, portés à 25 % en janvier 2019 sur 200 milliards de dollars de produits chinois, ont entraîné une hausse des prix à la consommation. L’indice des prix à la consommation (IPC) indiquait ainsi une augmentation de + 0,3 % par rapport à ce qu’il aurait été en l’absence de ces droits de douane, sans que cela ait permis une relance durable de l’emploi manufacturier.
Néanmoins, même en cas de reprise, un gain de 30 % de la production industrielle dans le PIB ne porterait sa part dans l’emploi privé qu’à environ 12 %, en raison notamment de l’automatisation et des gains de productivité. Ce phénomène n’est pas propre aux États-Unis. En Allemagne, la part de l’emploi dans l’industrie est passée de 41 % en 1983 à 26 % en 2023 (part du PIB passant de 24 % en 1991 à 19 % en 2023). En France, elle est tombée à 19 % en 2023, contre 38 % en 1969 (part du PIB passant de 22 % en 1960 à 9 % en 2023). Même constat au Royaume-Uni, passant de 45 % en 1969 à 17 % en 2023 (part du PIB passant de 16 % en 1990 à 8 % en 2023). Ce recul généralisé s’explique en grande partie par le développement des technologies numériques et l’automatisation, qui confient une part croissante de la production à des machines intelligentes, marquant ainsi une transition générationnelle du travail (voir les graphiques plus bas).
2 commentaires
Votre constat sur l’emploi manufacturier dans les pays développé est factuel et exact. Par contre l’objectif de l’Administration Trump n’est pas forcément de relocaliser tout l’emploi manufacturier aux États Unis et encore moins l’emploi a faible valeur ajoutée. Il s’agit avant tout de rééquilibrer les finances publiques. Le libre-échange ne peut fonctionner que si tous les pays jouent le jeu. Hors la Chine ne le fait pas: non-convertibilité de la devise, subventions massives des exportations, transfert force de technologie: se sont tous des éléments qui faussent la libre concurrence. Quand a l’Europe, elle impose des normes strictes qui limitent également les importations. Par ailleurs l’évolution de l’automatisation n’est pas forcement un frein a l’emploi, cela redirige simplement l’emploi vers des postes plus qualifiés ce qui correspond a l’évolution de nos sociétés. Pour finir, l’inflation aux États Unis, comme dans la plupart des pays est dictée en majorité par le prix de l’énergie: hors depuis l’arrivée de Trump au pouvoir le prix du pétrole a chute de presque $20, ce qui impacte directement le pouvoir d’achat des américains.
Les machines ne sont pas intelligentes ! C’est l’homme qui les conçoit qui l’est, ou pas, tout dépendant de l’usage qu’il veut en faire ! Tout bien considéré, il n’y a pas de désindustrialisation en cours, ce sont juste les produits et leurs “chaînes de montage” qui sont différents.