Au mois de mai 2025, l’Assemblée nationale examinera une proposition de loi visant à créer un statut de l’élu local. Ce texte a de bonnes chances d’être adopté puisqu’il est consensuel. Le Sénat l’a déjà adopté en mars de l’année dernière. Et, en janvier 2025, la délégation aux collectivités territoriales de l’Assemblée nationale a organisé deux débats sur le sujet qui ont donné lieu à un rapport d’information remis, par le député socialiste Stéphane Delautrette, à François Rebsamen, ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, le 13 février dernier.
Le texte contient tout de même des mesures qui ne font pas l’unanimité. C’est le cas, par exemple, de l’attribution d’une indemnité minimale à tous les élus locaux. Pour le groupe Ensemble pour la République sa mise en place est une « priorité », tout comme pour le groupe Écologiste et Social qui considère « l’indemnisation de tous les élus municipaux » comme essentielle. Le groupe Libertés, Indépendants, Outre-Mer et Territoires (Liot) estime qu’une « indemnisation généralisée peut être envisagée si elle reste symbolique et modulable ». La France insoumise se dit « réservée » afin de ne pas remettre en cause le principe de gratuité des fonctions d’élu local. Quant au Rassemblement national, il pense qu’une telle indemnité « aboutirait à des vocations purement vénales sans intérêt démocratique ».
En revanche, un consensus semble se dégager la reconversion professionnelle des anciens élus locaux dans la fonction publique et notamment dans la territoriale. Pas seulement, comme le souhaite le groupe UDR (Union des droites pour la République) en permettant aux anciens élus de postuler à des emplois de contractuels, mais aussi en aménageant les épreuves de la « troisième voie d’accès » à la fonction publique.
Cette « troisième voie » offre pourtant déjà des conditions d’accès privilégiées à ceux qui justifient de quatre années de mandat. Il s’agirait donc, si nous avons bien compris, de renforcer les passe-droits, notamment en exonérant les anciens élus locaux de tout ou partie du concours permettant d’accéder au statut de fonctionnaire.
Tous ces parlementaires qui n’ont que le mot « égalité » à la bouche verraient donc d’un très bon œil l’instauration de privilèges leur facilitant l’entrée dans la fonction publique. Cette proposition est choquante car elle écorne encore un peu plus le principe constitutionnel d’égal accès aux emplois publics. Elle soulève aussi des questions déontologiques. Un maire ou un conseiller municipal pourraient-ils être recrutés par la mairie qu’ils viennent de quitter ? Un élu local fraîchement battu dans sa commune pourra-t-il rejoindre l’intercommunalité dont le président est de la même couleur politique que lui ?
Enfin, ce texte prouve qu’aucun député et sénateur ne proposera la suppression du statut de la fonction publique en dépit du souhait des fonctionnaires eux-mêmes.