Nous avons déjà eu l’occasion d’écrire sur ce sujet dit du « fair share », c’est-à-dire du financement partagé des infrastructures de connectivité. Ainsi que nous l’expliquions l’année dernière, les opérateurs voudraient faire financer les infrastructures de télécoms par ceux profitant le plus de la bande passante, les Google, Netflix, Amazon et consorts. Comme si les consommateurs, abonnés à Orange, Free, Bouygues, SFR, etc., ne payaient pas le service !
C’est comme si les exploitants d’autoroutes ne demandaient pas seulement aux utilisateurs de payer quand ils empruntent le réseau (par exemple, les transporteurs routiers), mais mettaient à contribution, pour construire les routes, les entreprises qui ont fabriqué les marchandises transportées. Tout le monde trouverait cela idiot. Mais dans le cas des télécoms, beaucoup trouvent qu’il serait « équitable » que les plateformes apportent leur obole.
Les opérateurs télécoms ont déployé des trésors d’imagination pour en convaincre la Commission européenne, en particulier Thierry Breton, l’ancien commissaire au marché intérieur (et ex-PDG de France Telecom).
Cet été, la Commission a lancé une consultation sur le livre blanc qu’elle a produit sur le sujet. Les résultats sont sans appel : 67% des répondants se disent opposés à toute réglementation du marché de l’interconnexion IP qui pourrait entraîner l’introduction de redevances par une voie détournée. Ce camp du « non » regroupe des associations de consommateurs, des organisations professionnels du secteur de la création, des radiodiffuseurs, des startups, le secteur des jeux vidéo et jusqu’au ministère néerlandais des affaires économiques. Dans l’autre camp, celui du « oui » à la réglementation et la taxation (28% des répondants), on ne trouve que des entreprises de télécommunications et leurs associations professionnelles.
C’est la deuxième fois en autant d’années que la Commission demande aux parties prenantes européennes de donner leur avis sur l’avenir du secteur de la connectivité. Une fois de plus, le message est clair et net : aucune intervention réglementaire n’est nécessaire, ces secteurs fonctionnent correctement ou sont déjà très réglementés.
Les nouveaux commissaires européens chargés de ces sujets sauront-ils apprendre des erreurs de leurs prédécesseurs ? Comprendront-ils que l’Europe n’a pas besoin de davantage de taxes et de réglementations, mais d’un écosystème favorable aux entrepreneurs, dans le domaine des télécommunications et de l’informatiques comme dans les autres ? Comprendront-ils enfin que l’absence de GAFAM sur le sol de l’UE trouve son explication dans les règles bruxelloises ? A défaut, les pays européens regarderont passer les trains, à commencer par celui de l’IA.
2 commentaires
L’Europe tue l’Europe.
Ci dessous la traduction d’un extrait d’un article d’investisseurs américains sur la réglementation de l’IA en Europe.
« … En attendant, les entreprises américaines et asiatiques se servent de l’IA pour fonctionner plus efficacement et innover à toute allure.
Et elles sont sur le point d’écraser l’Europe.
Et il est sûr que si les entreprises européennes sont désavantagées, les entreprises américaines sont prêtes à capitaliser sur cette faiblesse.
Notre équipe d’investissement est sur le qui-vive. Nous passons le marché au crible, en quête des entreprises américaines les mieux placées pour bénéficier de cette avance concurrentielle sur leurs rivales européennes.
Restez à l’écoute !
La révolution de l’IA n’attend personne… pas même des régulateurs bien intentionnés. »
!!!
La comparaison en début d’article est très mal utilisée.
Si on compare les réseaux telecom aux autoroutes, la situation actuelle est que l’utilisateur paye le colis commandé (son film sur Netflix par exemple), et que le transporteur ne paye pas l’autoroute. Les opérateurs financent des réseaux très coûteux sans qu’il y ait de péage, sinon le simple petit abonnement pour l’utilisateur final.
Leur proposition : messieurs les livreurs de contenu, si vous voulez utiliser l’autoroute, il faut payer.