Nouveaux droits de douane de Trump : calculs foireux, pays pauvres menacés et dictatures épargnées

Les droits de douanes de base de 10 % imposés, mercredi soir, par Donald Trump à la plus grande partie des pays de la planète, sans compter des droits additionnels allant de 30 à… 90 %, a plongé les chefs d’entreprise, ministres et économistes dans un mélange de stupéfaction, de colère et d’inquiétude. Ce qu’a illustré une chute de la plupart des Bourses du monde.

Ces mesures, bien pires que ce qui était attendu, ont en effet de quoi sidérer. Pas seulement parce qu’elles n’ont pas grand sens économique du point de vue même des ménages et entreprises américains : les premiers vont subir une hausse des prix des produits importés quand les produits locaux de qualité équivalente et guère plus chers pouvant s’y substituer n’existent pas, les secondes subiront un renchérissement des matières premières et composants dont ils ont besoin, tant les économies modernes sont interdépendantes. Bref, la fameuse re-industrialisation de l’Amérique vantée par le président américain semble illusoire.

En outre, les calculs des droits de douanes semblent n’avoir rien à voir avec les droits de douanes imposés de leur côté par les pays visés aux produits américains, contrairement à ce que prétend la Maison-Blanche : ils sont calculés en proportion du ratio d’excédent commercial dudit pays par le montant de ses exportations totale. En clair, la doctrine sous-jacente est que tout excédent commercial est un pillage, sans considérer un instant que cela peut être parce que le pays concerné dispose d’avantages naturels sur des produits dont les Américains seraient friands.  En clair, l’objectif est d’empêcher les Américains d’acheter quoi que ce soit à des pays qui se trouvent ne pas être intéressés par des produits américains, ou n’ont simplement pas les moyens d’en acheter.

Troisième point ; ces droits de douanes vont tout simplement massacrer l’économie de pays pauvres dépendant fortement de leurs exportations vers les Etats-Unis. Par exemple, le Lesotho, un des pays les plus pauvres du monde va subir des tarifs de 50 %, comptant peu d’équivalent dans le monde. Donald Trump a fait rire ses collaborateurs en pointant le Cambodge, puni de droits de douanes de 97 % car ils « ont profité des Etats-Unis, ils ont fait fortune sur notre dos ». Le salaire moyen au Cambodge est de 7 dollars par jour…

Enfin, la Maison-Blanche n’a pas imposé de droits de douanes à une brochette de dictatures, Russie, Bélarus, Cuba et Corée du nord, au motif qu’ils étaient déjà tellement sanctionnés pour raison politique que leur commerce avec les Etats-Unis était désormais insignifiant. C’est exact pour Cuba et la Corée du nord, dont les exportations se comptent en dizaines de millions de dollars à peine, mais cela n’a pas empêché Washington d’imposer des taxes supplémentaires à l’Iran, qui n’a vendu l’an dernier que pour 7 millions de dollars aux Etats-Unis. Surtout, pour ce qui est des exportations « insignifiantes » de la Russie avec les Etats-Unis, elles se sont élevées l’an dernier à 3.5 milliards de dollars, plus élevées que celles de… cent trente-huit pays de la planète, dont l’Ukraine, qui a subi une surtaxe.

En fait, tout semble indiquer que ces mesures n’ont rien d’économique mais sont simplement un outil politique pour soumettre, grâce à la taille du marché américain, tous les partenaires commerciaux de Washington, à grands coups de tarifs punitifs qui seraient exonérés à l’issue de « deals ».