Après s’être mobilisés pour « faire barrage à l’extrême droite » lors de l’élection présidentielle, les Français constatent que le grand danger est désormais l’extrême gauche. Mélenchon a habilement réussi à construire une union de forces de gauche, agrégeant socialistes et écologistes pour que l’issue des prochaines élections législatives devienne incertaine. La perspective d’un gouvernement de gauche dirigé par Mélenchon en inquiète plus d’un, à cause de son programme économique catastrophique et aussi à cause du risque de voir se fissurer l’unité euro-atlantique.
A cette extrême gauche (les « Insoumis », les trotskystes, les communistes) s’ajoute une « ultra-gauche » en France (le terme s’est imposé comme tel), qui est pour ainsi dire encore plus à gauche que l’extrême gauche. Tout le monde a vu, par exemple, que lors des diverses manifestations, des groupes d’individus cagoulés ont brisé les vitrines des magasins, incendié des voitures, agressé les forces de l’ordre, etc. Parmi eux se trouvent des émeutiers, mais aussi des groupes radicaux qui agissent au nom d’idéaux anticapitalistes, qui réclament la régularisation des immigrés sans papiers, qui luttent contre le « fascisme », qui occupent les bâtiments de la faculté, etc. C’est une minorité mais une minorité agressive, avec une longue histoire derrière elle. C’est le mérite de Christophe Bourseiller de remonter aux origines de l’extrême gauche et de suivre son évolution dans cet ouvrage très documenté. L’auteur a abordé le sujet il y a deux décennies et le remet aujourd’hui au goût du jour en réfléchissant sur les perspectives d’un mouvement qui continue de faire preuve d’une surprenante vitalité.
Un point important : l’ultra-gauche a toujours contesté le communisme officiel, a considéré le système soviétique comme un « capitalisme d’État » et s’est présentée comme une alternative radicale, renouvelant son projet utopique originel. L’acte symbolique fondateur de l’extrême gauche serait la révolte des esclaves romains menée par Spartacus. A l’époque moderne, le nom de référence est Rosa Luxemburg, qui n’accepte pas la thèse de Lénine selon laquelle le prolétariat doit être dirigé par le Parti communiste. Sous l’influence de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht, des conseils ouvriers sont créés et, à la fin de la Première Guerre mondiale, des tentatives sont faites pour établir une Allemagne « rouge », tentative violemment réprimée. Des idées radicales se répandent ensuite dans d’autres pays européens, conduisant à des positions étranges : ainsi, la démocratie et le fascisme ne seraient que deux faces, également condamnables, du capitalisme. Un grand nombre de groupes trotskystes prolifèrent désormais, hostiles à la fois au stalinisme et au fascisme ainsi qu’aux régimes démocratiques. En fait, une caractéristique de l’ultra-gauche (valable aussi pour l’extrême gauche) est la fragmentation, la formation de micro-mouvements, certains étant très éphémères. Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de tentatives pour construire des ponts entre différents groupes, comme la formation (en Italie, par exemple) de partis « internationalistes ».
En France, après la Seconde Guerre mondiale, l’implication de quelques intellectuels et écrivains célèbres est notable. Le surréaliste Benjamin Péret, trotskyste, devient un militant d’extrême gauche actif. Dans la zone radicale se situe, au moins pour un temps, le groupe Socialisme ou barbarie, avec Claude Lefort, Cornelius Castoriadis, Jean-François Lyotard, Guy Debord, entre autres. De même, le groupe autour du magazine Arguments, dirigé par Edgar Morin (le jeune Gérard Genette était, au début, très proche de Lefort et Morin). Ces magazines et groupes préparent l’apparition des Situationnistes, dont le représentant emblématique était Guy Debord. Pour eux, le capitalisme est essentiellement un spectacle et l’individu est prisonnier de la civilisation marchande ; grâce au spectacle, le capitalisme n’a même pas besoin de recourir à la dictature. Avec la création de l’Internationale situationniste, le mouvement connaît son heure de gloire. Du fait de la virulence anticapitaliste, le situationnisme a ouvert la voie aux groupes néo-anarchistes et, bien sûr, aux émeutes de mai 1968. Des personnalités connues, Daniel Cohn-Bendit en premier lieu, entrent en scène. D’ailleurs, lors des événements de mai 68, l’ultra-gauche est à l’origine de nombreuses destructions et altercations violentes.
Ce qui ressort du livre de Christophe Bourseiller, c’est qu’on a affaire, au sein de l’extrême gauche et de l' »ultra » gauche, à une nébuleuse, constituée de centaines, de milliers de formations et de groupes qui disparaissent puis réapparaissent sous d’autres noms. Le mouvement des « gilets jaunes » était aussi une forme de révolte radicale. Le but est toujours de saboter la démocratie et le libéralisme. Cela suffit pour constituer un motif d’inquiétude.
6 commentaires
Non le mouvement des gilets jaune n’était pas antidémocratique au contraire il s’est rapproché d’une vraie démocratie en demandant le RIC si vous pensez qu’à l’heure où je vous parle vous vivez dans une démocratie alors comment expliquez-vous un conseil scientifique dévié en secret défense et un parlement érigé en chambre d’enregistrement
Sans parler du 49.3 et le manque de proportionnelle,non c’était bien plus démocratique lors de la 3ème République ou le gouvernement pouvait sauter plus facilement et devait faire attention à respecter certaines règles…de démocratie.
Le mouvement des gilets jaunes était justifié au début, ensuite il a été phagocyté par des syndicalistes et autres casseurs (comme j’ai pu le constater à Paris)…il n’y avait plus rien de démocratique dans ses demandes…
NL
Paris ne fait pas tout, les casseurs ,black block et même certains policiers déguisés en GJ étaient bien sur de la partie pour destabiliser le mouvement mais je vous parle des rond -points dans toute la France où les débats étaient légions et la démocratie était de mise sans syndicats et sans partis politiques et l’aboutissement du RIC qui deviendra incontournable j’en suis convaincu
sur quelques rond-points, oui…Sinon, les gilets jaunes sont devenus des gilets rouges..
Bravo M Lecaussin il vaut mieux appeler « un chat, un chat » et rétablir la vérité comme vous le faites de manière absolument remarquable.
Merci à vous !