Qui va être notre prochain (mauvais) Premier ministre ?

La trêve olympique unilatéralement décrétée par… Jupiter s’achève et avec elle, la mission du  gouvernement démissionnaire. Le fait qu’un gouvernement ne fasse qu’administrer les affaires courantes, comme l’ont expérimenté à maintes reprises nos amis belges et italiens, comme nos républiques précédentes l’ont également connu, n’a en rien dégradé la qualité de notre « gouvernance ». Certes, un gouvernement démissionnaire ne peut pas bien faire, mais il peut faire moins mal car ses attributions sont bridées.

Quoi qu’il en soit, cette période prend fin et il appartient au président de la République, conformément à la Constitution, de nommer un nouveau Premier ministre. Plus question de louvoyer… Compte tenu de l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale et de la grande difficulté à trouver une majorité relative suffisamment stable, cela lui laisse une forte marge de latitude. Qui Emmanuel Macron va-t-il bien pouvoir désigner ? Les dents des candidats rayent déjà le parquet depuis plusieurs semaines. Tour d’horizon.

Lucie Castets, le clone de La France insoumise

Le Nouveau Front populaire a choisi sa candidate, Lucie Castets. Aux forceps, ce qui démontre combien le NFP n’est qu’une machine électorale traversée par de multiples tensions. La France insoumise, mais aussi les Verts ont tenté de faire pression sur le président afin qu’il nomme au plus vite le nouveau chef du gouvernement en présentant de manière controuvée les résultats des élections comme un triomphe de la gauche et avant tout de l’extrême gauche.

On a trop souvent omis de signaler combien le profil de Lucie Castets apparaît proche de la perfection : femme, jeune, du secteur public, plus encore énarque, sans aucune expérience du secteur privé, (très) à gauche et, cerise sur le gâteau, homosexuelle, comme elle s’en est vantée dans Paris Match . Les « wokistes » regretteront seulement qu’elle soit blonde aux yeux bleus. Personne n’est parfait, comme le disait le grand Joe E.Brown dans Certains l’aiment chaud…

Cependant, avec l’attitude outrancière de Jean-Luc Mélenchon et les scandales quotidiens provoqués par ses troupes, on en vient à se demander si LFI entend vraiment exercer le pouvoir. Tactiquement, le coup serait certainement bien joué car, comme en 1978, fût-ce de manière involontaire, mieux vaut pour elle que la gauche et la gauche de la gauche ne forment pas de gouvernement afin de préserver les chances du Lider Maximo lors de la prochaine élection présidentielle. En effet, il est prévisible qu’un Premier ministre LFI, ou adoubé par LFI, provoquerait un désastre économique et social à faire regretter 1981.

En tout état de cause, Emmanuel Macron a signifié qu’il ne désignerait pas Lucie Castets et aucune personne sensée ne s’en plaindra.

Xavier Bertrand, l’extrémiste du centre

A la suite de son vibrant échec lors des « primaires » de la droite en 2021 et vexé comme un pou, Xavier Bertrand avait officiellement tiré un trait sur ses ambitions nationales, ce qu’on oublie de lui rappeler aujourd’hui. Il avait alors déclaré : « J’ai toujours pour habitude de faire ce que je dis ». Chacun jugera… Croyant sans doute faire don de sa personne à la nation et répondre à une lame de fond en sa faveur, il entend se sacrifier aujourd’hui en se présentant comme la personne idoine pour diriger un gouvernement d’union nationale, de la gauche à la droite.

Clairement opposé à l’extrême droite, ce qui doit être son seul principe ou à peu près, il semble entièrement « Macron-compatible », si ce n’est qu’il a laissé échapper à plusieurs reprises des mots aigres-doux sur notre immense chef de l’État. Ce qu’il doit amèrement regretter aujourd’hui…

S’il s’agit de nommer un Premier ministre sans idées, Xavier Bertrand présente toutes les garanties. Malheureusement, le « gaullisme social » dont il se réclame est rejeté par une grande partie des électeurs et par beaucoup d’anciens Républicains. La « droite molle » qu’il incarne n’est pas de nature à se concilier la droite et encore moins l’extrême droite. Dès lors, comment pourrait-il rassembler ?

François Bayrou, l’extrémiste du centre (bis)

On ne le note que trop rarement mais le profil de François Bayrou est très proche de celui de Xavier Bertrand. Une même absence d’idées en dépit de longues carrières politiques, des mots creux, un même étatisme tous azimuts, des passages sans relief au gouvernement, une même ambition présidentielle qui semble tenir lieu de programme.

Il existe tout de même une double différence entre les deux hommes : François Bayrou, qui, lui, est proche du chef de l’État, se contenterait d’un beau maroquin. Sa souplesse légendaire pourrait donc l’amener à intégrer un gouvernement d’union nationale, dans l’attente de la prochaine échéance présidentielle.

La surprise du (grand) chef

Il y a bien longtemps que les présidents de la République successifs provoquent des surprises, plus ou moins bonnes, souvent moins que plus, en nommant un Premier ministre improbable. Le cas s’est présenté depuis les années 1960, surtout en fin de mandat : hauts fonctionnaires zélés, affidés flagorneurs et autres inconnus. Qui se souvient de Couve de Murville, pourtant ministre des Affaires étrangères de longues années durant ? Ou d’Edith Cresson, sauf peut-être pour avoir parlé de la « vie de fourmis » des Japonais et de l’homosexualité des Anglais ? Ou de Bernard Cazeneuve, il est vrai Premier ministre fugace mais toujours mentionné dans la liste des candidats actuels au poste ? Qui se souviendra de Jean Castex, sympathique haut fonctionnaire mais Premier ministre totalement effacé avant de devenir un président de la RATP très à l’écoute des syndicats ?

Au moins n’attend-on rien d’Emmanuel Macron depuis bien longtemps ; c’est le meilleur moyen de ne pas être déçu…