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Les raisons de l’exil fiscal

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Qui sont les exilés fiscaux et pourquoi partent-ils ? Pour Pierre Moscovici l’exil fiscal n’est pas lié au taux de 75 %. Jean Philippe Delsol, avocat fiscaliste et administrateur de l’IREF, est bien placé pour connaître la vérité : c’est l’instabilité fiscale qui pousse une nouvelle génération de dirigeants et cadres à se délocaliser. Hélas, le Conseil Constitutionnel n’a pas fermé la porte de l’instabilité.

A peine le Conseil constitutionnel avait-il rendu sa décision sur le fameux 75 % que le Président Hollande a pris un malin plaisir à aller lui présenter ses vœux pour lui dire en mots aimables qu’il ferait tout pour en faire fi : « Vous avez eu l’occasion de rendre plusieurs décisions remarquées. Il ne m’appartient pas de les commenter. Elles ont l’autorité de la chose jugée », a sobrement déclaré le chef de l’Etat, mais pour préciser aussitôt que « le gouvernement en tiendra le plus grand compte » lorsqu’il reformulera les dispositions censurées.

Il n’abandonne donc pas la partie. Et son ministre Pierre Moscovici n’a pas manqué de déclarer peu après au Figaro : « La nouvelle contribution reprendra l’esprit de la taxe à 75%, tout en respectant les principes fixés par le Conseil constitutionnel. Nous la présenterons d’ici à quelques semaines, afin que les acteurs économiques soient fixés. J’ajoute que les raisons de l’exil fiscal ne sont pas dues à un tel dispositif. La fiscalité ne fait pas tout : à l’époque du bouclier fiscal à 50 % de la droite, il y avait pourtant 700 départs par an. »

Fuite devant l’instabilité fiscale

Certes, il est vrai que la fiscalité ne fait pas tout. L’instabilité chronique de la fiscalité française aura été la cause principale de l’inefficacité du bouclier fiscal institué par Villepin et Sarkozy. Beaucoup d’exilés se sont posés la question de revenir lorsque le dit bouclier a été institué, tant il est vrai que la plupart d’entre eux ne sont pas partis de gaieté de cœur. Mais ils y ont renoncé en craignant que cette mesure ne dure pas. Malheureusement, ils avaient raison. L’instabilité fiscale empêche les contribuables d’entreprendre, de planifier leurs projets personnels ou professionnels ; elle installe les gens dans l’éphémère au mieux, l’insécurité au pire, ce qui en tous cas est nocif à l’investissement, à la croissance, au développement, qui s’inscrivent nécessairement dans le long terme.

Une nouvelle génération d’exilés

C’est aussi ce qui explique que les contribuables qui partent sont désormais des actifs plus jeunes et moins fortunés, qui ne veulent plus construire leur avenir dans un climat incertain, voire hostile.

Selon les données fournies par Bercy au Président de la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale, en 2010 les ménages soumis à l’impôt sur la fortune et quittant la France avaient en moyenne 54 ans, soit douze ans de moins que le redevable moyen à l’ISF. 33 % de ces exilés étaient des dirigeants et 31 % des cadres. Ce sont bien des forces vives qui ont pris le chemin de l’étranger. Selon Le Figaro, qui rapporte ces chiffres, « en s’installant à l’étranger, ces redevables à l’ISF ont en réalité emmené avec eux – et donc délocalisé – 3,6 milliards d’euros de patrimoine en 2010. Soit le double qu’en 2009. Cela laisse augurer de chiffres records pour les années 2012 et suivantes… De façon générale, la France fait partir des ménages fortunés : le patrimoine net des exilés était en moyenne de 5 millions en 2010, alors que celui des redevables à l’ISF avoisinait 2,6 millions en moyenne. Les ménages revenant en France disposaient quant à eux de 2,4 millions. »

Des exilés qui ne sont pas soumis à l’ISF ou à l’exit tax

Au demeurant les chiffres eux-mêmes ne donnent qu’une vision imparfaite de la réalité. Au titre de 2011, 128 ménages auraient souscrit une déclaration d’exit tax faisant ressortir 1,4 milliard d’euros de plus-values latentes sur des portefeuilles d’actions sortis du pays. Mais l’exit tax n’est entrée en vigueur qu’au cours de cette année 2011 et beaucoup de contribuables qui quittent le pays ont sans doute évité de se soumettre à cette taxe lorsque par ailleurs ils n’étaient pas assujettis à l’ISF, du fait notamment que leurs biens les plus importants étaient leur outil de travail, exonéré. D’autres contribuables sont partis qui n’étaient pas assujettis à cette exit tax, l’assurance-vie et les OPCVM n’entrant pas dans son champ d’application, pas plus que l’immobilier.

Il reste que le niveau de fiscalité est bien le motif de beaucoup d’exilés. « Je pars parce que vous considérez que le succès, la création, le talent, en fait, la différence, doivent être sanctionnés », écrit à juste titre Gérard Depardieu, dont le revenu annuel est estimé à 2 millions d’euros, le plaçant automatiquement sous la menace de la nouvelle taxe à 75%.

Peut-on s’en remettre au Conseil Constitutionnel ?

Cependant, le plus dérangeant de l’affaire est peut-être l’inquiétude que suscitent les attendus du Conseil Constitutionnel. Il a pris un ensemble de décisions plus satisfaisantes dans leur résultat que dans leur motivation. Entre autres, il a annulé la taxe de 75% qu’il a annulée parce qu’elle ne prenait pas en compte le foyer fiscal. Or, le même Conseil constitutionnel avait rejeté il y a deux ans cet argument en matière d’ISF (Décision n° 2010-44 QPC du 29 septembre 2010). Plus généralement, le Conseil constitutionnel n’a pas fixé nettement la barre au-delà de laquelle l’impôt devient confiscatoire, comme l’avait fait la Cour de Karlsruhe en Allemagne en 1995 avec un seuil de 50%. Cela laisse craindre que sa décision ait été plus politique que juridique, ce qui serait le pire de tout, car le Conseil laisserait encore grande ouverte la porte de l’instabilité fiscale.

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3 commentaires

Anonyme 19 janvier 2013 - 2:01

Adieu belle France de mes aïeux (Couet)
Voila plus de 20 ans que des francais, à l’esprit gagneur, quittent de plus en plus nombreux le pays (jeunes et vieux), à cause des impôts,taxes et cotisations sociales, ayant atteint un niveau anormal, spoliateur, immoral ; mais aussi, pour fuir une certaine attitude irrespectueuse, de permanent combat, un esprit méprisant, provocateur et frondeur.

Bref une névrose collective. On début de sa vie on pense, que c’est temporaire, ensuite on s’aperçoit que c’est endémique, viscéral, chronique qu’on est dans une société à 2 vitesses.

Et puis on voit « ce peuple agité imbibé des péchés tels : paresse profonde, envie-jalousie, luxure, mensonge, avarice ou égoïsme, orgueil et fanfaronnade, colère ».

Un peuple « sans coeur », ni générosité contrairement au prétendu… du moins dans ce train à 2 vitesses.

Et, un jour on s’en va… loin du Marxisme dirigiste.

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Anonyme 19 janvier 2013 - 8:02

et nous les petits
nous les petits avec nos 1430 € de retraite pouvons nous aussi partir ?

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Anonyme 20 janvier 2013 - 10:36

Et les petits aussi!
Oui, les petits, mais en Retraite; il y a des pays ou 1400euros, c’est pas mal. Ici, que nous reste-t-il après avoir enlevé: Taxe habitation; Taxe foncière; CSG; Taxe Ordures; et la vie chère en CADEAU

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