En janvier 2025, juste avant son investiture, Trump lança sa propre cryptomonnaie au nom aussi évocateur que concis : $TRUMP. Retour sur un épiphénomène peut-être pas si anodin.
Le $TRUMP fut annoncé le 18 janvier 2025, via une publication sur X. Très vite sa valeur grimpa de façon exponentielle, passant d’un peu moins de 10 dollars à 74 dollars dans les premières heures qui suivirent son lancement. En moins de deux jours, sa capitalisation boursière atteignit 10 milliards de dollars. Le jour même de l’investiture de Donald Trump, le $TRUMP fit une envolée jusqu’à… 109 071 dollars ! Aujourd’hui la « hype » est un peu retombée et le $TRUMP frôle les 19 dollars pour une capitalisation boursière toujours solide puisqu’elle s’élève à 3,8 milliards de dollars (paradoxalement une « petite » déception puisque sa valorisation avait atteint 57 milliards de dollars !). Enfin, là où auparavant il n’y avait rien, réside désormais un bon paquet de dollars (et tangibles ceux-là).
Le $TRUMP s’inscrit dans la catégorie des « meme coin » à savoir une niche monétaire capitalisant sur la popularité d’une personnalité ou sur la vague d’un phénomène culturel. Plus qu’une simple émission financière, nous avons affaire, ici, à une thésaurisation de la figure de Donald Trump (figure elle-même « parasitée » par la marque Trump). Le symbole mange le symbole lui-même mangé par un autre symbole.
Et pour ceux qui s’indignent, émettre de la monnaie n’a-t-il pas été – de tout temps – un pari sur une figure royale ou sur une personnalité détentrice du pouvoir ? La capacité à créer et à réguler la monnaie fit souvent partie des prérogatives royales où les monarques (et avant eux les grands seigneurs) avaient seuls le droit de battre monnaie. Avec l’avènement des États-nations, le pouvoir glissa des alcôves de la royauté au « secret » des banques. Alors, la question qui se pose est celle-ci : le lancement du $TRUMP n’est-il qu’un caprice sans lendemain ou symbolise-t-il à la perfection une tendance nouvelle chez les leaders politiques forts qui seraient désormais tentés de « battre » monnaie en dehors de l’Etat et en dehors des contraintes légales et réglementaires qui pèsent sur les systèmes monétaires traditionnels ?
Cela dit, le lancement du $TRUMP ne s’est pas fait sans controverses. Des inquiétudes furent exprimées quant aux conflits d’intérêts étant donné que la famille Trump contrôle une large partie de l’offre de tokens. Selon CNN Business, 80% des tokens $TRUMP sont d’ailleurs détenus par des filiales de l’Organisation Trump. Autrement dit, l’émission monétaire se gère en famille, à l’abris d’intervenants trop extérieurs. Nul doute que les Médicis ont eu la même tentation. Les honnit-on pour autant ?
Par ailleurs, la réglementation des cryptomonnaies est un sujet aussi épineux que controversé. Avec le président Trump à la tête des Etats-Unis, une partie de l’industrie espère une politique de dérégulation qui plaiderait en faveur de l’innovation (ce qui n’irait toutefois pas sans présenter des risques accrus pour les investisseurs…). La nomination de David Sacks comme « czar de l’IA et de la crypto » dans l’administration Trump indique, en tout cas, une direction claire vers un environnement réglementaire plus permissif.
Payerons-nous un jour, non plus en dollars, mais en $TRUMP ? Pour l’instant ce n’est qu’une fiévreuse divagation mais qui sait ?
