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Le danger mortel du programme institutionnel Mélenchon/LFI/NFP

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On n’en a guère parlé et pourtant… Le programme du Nouveau Front populaire en matière d’institutions représente un danger mortel pour notre pays. L’explication est simple : il s’agit ni plus ni moins de la reprise du programme de Jean-Luc Mélenchon et de La France insoumise.

Ruptures et continuités

Le programme du NFP pour les élections législatives, dit « contrat de législature », comporte un volet institutionnel au titre des « transformations » à faire dans les trois mois de la prise du pouvoir. Au fond, il s’agit d’aller « vers une 6e République » par l’instauration de la représentation proportionnelle comme mode de scrutin, l’abrogation de l’article 49-3 de la Constitution actuelle sur l’engagement de la responsabilité du gouvernement, l’instauration du référendum d’initiative citoyenne et le renforcement du référendum d’initiative partagée. En la forme, et ceci est essentiel, il s’agit de « passer à une 6e République par la convocation d’une Assemblée constituante citoyenne élue ».

L’idée d’une assemblée constituante représente une rupture avec la grande période socialo-communiste des années 1970 et du début des années 1980. En effet, la 3e partie du Programme commun de gouvernement de 1972, intitulée « démocratiser les institutions, garantir et développer les libertés », ne comportait rien de tel, pas plus que les 110 propositions de 1981 et leur 3e partie réservée à la liberté.

En revanche, l’idée d’une assemblée constituante renvoie aux précédents, souvent peu convaincants, de 1789, 1848 et 1945, et elle renvoie également à la constituante avortée du Venezuela en 2017, un pays cher au cœur de Jean-Luc Mélenchon.

Le  programme de Jean-Luc Mélenchon de 2022 : personne ne l’a entériné

Le programme de Jean-Luc Mélenchon lors de l’élection présidentielle de 2022 comportait un aspect institutionnel dévoilé dans un livret intitulé « Pour une Assemblée constituante » (édition 2022, 24 pages).

Le livret, qui s’ouvrait par une citation de Salvador Allende, par un article de la Déclaration des droits de 1793 et par un autre de la Déclaration de 1789, se divisait en trois parties. Dans la première, les auteurs critiquaient violemment la Ve République comme une Constitution « contre le peuple » (Jean-Luc Mélenchon s’octroyant avec LFI le monopole de son expression, nous y reviendrons).

Dans la seconde était livré le projet d’une assemblée constituante. Louant les « révolutions citoyennes d’Amérique latine », le texte énonçait le fond et la forme. Pour le fond, il s’agissait de consacrer « l’intervention populaire », de modifier les règles du jeu et de consacrer de « nouveaux droits et libertés ». La façon d’opérer était clairement présentée : référendum décidé par le président Mélenchon sur le projet de loi de convocation d’une assemblée constituante, puis désignation de ses membres par l’élection et (sûrement pour s’assurer de la présence des meilleurs et des plus compétents en matière constitutionnelle…) par le tirage au sort, référendum sur le texte issu des travaux de l’assemblée sous deux années. Si le « peuple » (sans doute mal informé et encore miné par des influences bourgeoises) venait à le rejeter, retour à l’assemblée constituante afin d’en rédiger un autre (en 1945, il avait été prévu que le texte rejeté provoquerait l’élection d’une nouvelle assemblée constituante. Ici la même assemblée rédigerait les textes successifs jusqu’à l’adoption, de guerre lasse, du document définitif…). Tant que la nouvelle Constitution ne serait pas adoptée, le président de la République et le gouvernement useraient des règles constitutionnelles en vigueur. Mais, avant même son adoption, d’importants changements se produiraient avec une « démocratisation de la pratique du pouvoir », dont le « renforcement des droits sociaux ».

Le livret entendait, pour le déclenchement de la procédure, user de l’article 11 de la Constitution actuelle qui permet au chef de l’État de soumettre à référendum un projet de loi « portant sur l’organisation des pouvoirs publics », comme le fit le général de Gaulle par deux fois. Ce qui n’apparaissait pas, c’est le fait que l’utilisation de l’article 11 avait fait l’objet de force polémiques et que, aujourd’hui, aucun constitutionnaliste sérieux ne soutient la possibilité d’un changement constitutionnel par cette voie. L’objectif était évidemment d’éviter l’indispensable case sénatoriale où les Insoumis sont très minoritaires… Implicitement, le livret confirmait la position du publiciste Carl Schmitt (juriste antilibéral qui sombrera dans le nazisme et l’antisémitisme) selon lequel une nouvelle constitution n’a pas à respecter la précédente et particulièrement sa procédure de révision constitutionnelle.

La troisième et dernière partie du livret développait les propositions de modifications constitutionnelles selon quatre grandes idées :

  • une nouvelle déclaration des droits avec des « nouveaux droits » inventés par les Insoumis : « règle verte selon laquelle on ne doit pas prélever sur la nature plus que ce qu’elle peut reconstituer » ; « réappropriation collective des biens communs, […] « l’air, l’eau, l’alimentation, le vivant, la santé, l’énergie, la monnaie, qui ne sont pas des marchandises et doivent être gérés démocratiquement » (autrement dit la collectivisation quasi-totale du pays) ; soumission du droit de propriété « à l’intérêt général » (autrement dit, disparition du droit de propriété, ce point étant évidemment relié au précédent), cette soumission étant double, en matière écologique avec la subordination « du droit de propriété des actionnaires » (qui subsisteraient donc dans un premier temps avant leur élimination) et en matière sociale avec la primauté des « droits des travailleurs », la « République de l’intervention populaire » (le livret ne parle pas de république populaire…) n’étant autre qu’une « République sociale », et la constitutionnalisation des « droit au travail » et « droit au logement », de même que celle de deux nouveaux « droits à » qui seraient « le droit à l’IVG » et « le droit à mourir dans la dignité » (le texte ne précise pas si les actionnaires sont concernés…). Il faudrait encore (pour bien former les citoyens …) « libérer les médias des forces de l’argent », comme le prévoyait le Conseil national de la Résistance (autrement dit, mettre fin au monopole de la droite sur les médias que tout un chacun peut quotidiennement constater en France…). Le texte confirme la volonté d’abolir « la monarchie présidentielle » et de « séparer les pouvoirs » avec un régime parlementaire stable, mais avec la généralisation du mode de scrutin proportionnel (tout cela est très confus car la représentation proportionnelle n’est a priori guère de nature à assurer une stabilité gouvernementale, d’autant plus si les mécanismes de parlementarisme rationalisé, tel l’article 49-3, disparaissent en contrepoint des régimes de nos voisins).
  • « Une garantie d’exercice effectif de la souveraineté populaire », avec entre autres le droit de vote à 16 ans et son caractère obligatoire à partir de 18 ans (les jeunes votant généralement « bien », encore que la forte croissance du Rassemblement National puisse amener à réviser cette position) et le droit de vote aux élections locales « pour les résidents étrangers en situation régulière » (vieille antienne de la gauche).
  • « Des mesures de vitalité démocratique pour rompre avec l’exclusion civique », dont « l’encadrement des sondages d’intention de vote » et un large soutien aux associations (deux propositions inquiétantes qui aboutiraient à une manipulation de l’opinion politique et à l’effacement encore plus grand de la sphère de la société civile).
  • « Un plan de séparation de l’argent et de l’État », peu cohérent au regard de son titre, dont la fin du monopole de la parole des patrons par le Medef et la réforme du financement de la vie politique par abaissement à 200 € du plafond des dons individuels aux partis politiques (ce qui limiterait la voix de la société civile et assurerait le quasi-monopole de l’État dans le financement des partis), de même que la création de « conventions citoyennes », composées de citoyens tirés au sort et recevant « une information complète et contradictoire (sic) ».

Le programme de LFI aux élections législatives de 2024

Le programme de LFI aux élections législatives de 2022 comportait en liminaire une citation du grand démocrate Robespierre de 1792 et une autre de la révolutionnaire Louise Michel de 1883. Son chapitre 1, « Démocratie et institutions », reprenait l’essentiel du livret de la présidentielle de 2022 dans ses six parties, l’une d’entre elles étant intitulée de manière parlante « Balayer l’oligarchie, abolir les privilèges de la caste » (dans le plus pur style populiste et complotiste).

L’Assemblée constituante, prélude à la démocratie populaire présidée par Jean-Luc Mélenchon

L’assemblée constituante soutenue par Jean-Luc Mélenchon et LFI, et aujourd’hui entérinée de manière inconsciente par le NFP, apparaît particulièrement inquiétante. Sous couvert de volonté du « peuple », dont le parti au pouvoir s’assurerait le monopole de l’interprétation, il s’agirait de rédiger un texte attentatoire aux libertés par des personnes sans compétence pour la plupart, mais bien « formées » à l’école, par des médias encore plus dirigés qu’actuellement et avec un délitement de la société civile. La consécration de droits constitutionnels socialistes permettrait de bloquer tout retour en arrière de nature pacifique, de même que la collectivisation à marche forcée et la manipulation de l’opinion publique dès le plus jeune âge des citoyens.

La démocratie populaire du Lider Maximo et de ses thuriféraires serait ainsi gravée dans le marbre. Nous sommes clairement prévenus.

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