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La guerre nécessaire contre le narcotrafic

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Le narcotrafic explose. Il y aurait eu 182 assassinats ou tentatives d’assassinat et règlements de compte entre bandes rivales au premier semestre 2024 avec 42 morts et 172 blessés, dont nombre de victimes innocentes « collatérales ». Il y aurait eu en 2023 à Marseille 84 fusillades liées à la drogue. La France est bien en voie de mexicanisation, n’en déplaise à l’aveuglement idéologique du garde des Sceaux.

Dans leur rapport de commission d’enquête, remarquable, déposé le 7 mai 2024, deux sénateurs, le rapporteur Etienne Blanc, LR proche de Bruno Retailleau et de David Lisnard, et le président Jérôme Durain, socialiste, font un constat alarmant. En témoigne  le premier paragraphe : «  Submersion : c’est l’image qui s’impose pour décrire le phénomène auquel la France est confrontée, tant les routes par lesquelles la drogue est acheminée dans notre pays sont nombreuses, tant les moyens par lesquels elle est introduite sont variés, tant les façons de la distribuer et de la vendre sont multiples. Avec l’explosion simultanée de l’offre et de la demande, plus aucun territoire, plus aucune catégorie sociale ne sont épargnés – et les outre-mer, victimes de leur situation géographique, sont particulièrement pénalisés. Le trafic s’infiltre partout, avec pour corollaire une violence exacerbée ; dans le même temps, il mute sous l’effet d’une ubérisation qui témoigne de l’extrême rationalité économique des trafiquants ».

Une responsabilité partagée

Les saisies de cocaïne ont été multipliées par cinq en l’espace de dix ans, mais elles ne représentent sans doute qu’une faible part du trafic. L’apparition incessante de nouvelles drogues de synthèse produites directement sur le sol européen, le maintien à des niveaux inquiétants de la consommation de cannabis et d’héroïne, la pureté et la nocivité croissantes des produits, l’augmentation continue des cultures et laboratoires illicites en vue de la fabrication de drogues, la situation dramatique dans nos « cités » et dans les collectivités d’outre-mer, participent de cette submersion qui touche désormais l’intégralité du territoire sur lequel il y aurait 3 000 points de deal.

Certes le gain facile à tous les niveaux de la chaîne de production et de commercialisation favorise le développement des filières de la drogue. Mais le progressisme ambiant qui voudrait rendre licite la consommation de cannabis en est aussi la cause. L’idée que le cannabis n’est qu’un produit récréatif, au fond pas plus dangereux que le tabac ou l’alcool, alimente une consommation facile puisque les consommateurs ne sont guère inquiétés tant qu’ils ne causent pas d’incidents. Mais le cannabis est de plus en plus transformé avec des produits plus dangereux, il est la première drogue produite, trafiquée et consommée au monde par environ 219 millions de personnes, soit davantage que toutes les autres drogues réunies, il est l’entrée vers la consommation de drogues plus dures en donnant l’habitude et le besoin de la drogue, mais déjà il amoindrit les réflexes, avilit la volonté, dégrade la personnalité… C’est pourquoi l’argument de ceux qui veulent le rendre licite pour mieux en contrôler la consommation n’est pas recevable.

Un combat légitime

Il ne faut donc pas douter de la justice du combat contre toutes les drogues. L’interdiction de la drogue n’est pas une atteinte à la liberté mais un moyen de rétablir une certaine sécurité et d’assurer l’exercice de nos libertés. Je suis attaché, avec Kant, à l’idée que l’homme ne peut pas utiliser son corps ou celui d’autrui comme une chose voire seulement comme un moyen. Il doit le respecter en tant qu’il est constitutif de son être dans son essence et que de ce fait, il ne peut pas le transformer indûment ni le supprimer de sa seule volonté et moins encore pour son plaisir ou par absence de volonté. La dignité humaine, que tend à établir toute société de liberté, consiste à respecter l’intégrité de l’être, celle de l’autre comme celle de soi-même. Ce qui justifie aussi, sauf bien sûr nécessité médicale et faute de mieux, toutes réserves à l’égard de l’autorisation de toutes drogues, qui, toutes,  attentent à l’intégrité du corps et de l’esprit et génère des comportements déréglés à l’égard d’autrui.

A cet égard le rapport sénatorial susvisé est courageux et il inspire légitimement la proposition de loi préparée par ses instigateurs et les mesures qu’envisage le ministre de l’Intérieur pour « sortir la France du piège du narcotrafic ». Il s’agit notamment, et parmi nombre de propositions, de compléter l’arsenal pénal de la lutte contre les trafiquants pour être plus réactifs et plus intransigeants, de renforcer les moyens et les contrôles de nos territoires ultramarins autant que de nos ports et aéroports, d’intensifier la collaboration des services au double niveau national et international, de veiller plus attentivement sur les risques de corruption des agents publics, de créer un parquet national antistupéfiants (Pnast), d’assurer une meilleure protection des informateurs et des repentis et un recours plus facile à ce statut…

Il faut aussi, comme l’a dit Bruno Retailleau, atteindre les consommateurs. Certes, il faudra que les moyens suivent. Etienne Blanc insiste, à juste titre, sur l’intérêt de confisquer les biens indûment acquis des trafiquants pour financer la lutte contre eux.

Les limites de l’état de droit

Certes, il faut trouver un bon équilibre entre la nécessaire éradication des cartels de la drogue et le respect de l’état de droit. Mais il ne faut pas non plus être ingénu. A défaut d’employer sans tarder les moyens de gagner la guerre que nous infligent ces mafias immensément puissantes, ce sont elles qui détruiront nos pays en plongeant trop de nos concitoyens dans la dépendance et la violence. A défaut de prendre dès à présent les dispositions les plus fermes, il faudra demain faire comme le Salvador, l’Equateur, le Honduras et maintenant le Pérou qui ont été contraints, avec l’approbation très large de leur population, de mettre en œuvre des mesures radicales pour arrêter les consommateurs, placer les suspects dans des prisons de haute sécurité dont les autorités publiques ont repris un contrôle qui leur avait échappé, voire instaurer l’état d’urgence comme au Honduras… Ainsi, le nombre d’homicides a ainsi été réduit de 92 % au Salvador, une des nations les plus dangereuses d’Amérique du Sud qui est devenue l’une des plus sécurisées. Mais à quel prix ? Ces gouvernements ont dû parfois piétiner l’état de droit pour rétablir les libertés. Essayons d’anticiper pour ne pas en venir à ces extrémités.

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