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En 20 ans, le nombre de partis politiques a été multiplié par trois

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Quel qu’ait été votre vote lors des dernières élections législatives, il a rapporté gros. Pour chaque député (et sénateur) élu, les partis politiques perçoivent environ 37 000 € par an. Ils reçoivent aussi un peu plus d’un euro pour chaque voix recueillie au premier tour de l’élection à la condition d’avoir récolté au moins 1% des suffrages exprimés dans au moins 50 circonscriptions et de rendre publics leurs comptes. Ce mode de financement explique pourquoi les partis politiques se multiplient depuis 20 ans.

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) vient de publier son rapport d’activité pour l’année 2023. D’emblée, on est frappé par le nombre de partis politiques recensés : 609 !

Plus de 600 partis politiques

Oui, vous avez bien lu : 609 partis sont tenus de déposer des comptes certifiés conformément à la loi ; ils n’étaient qu’un peu plus de 200 en 2003 (et 23 en 1990). En une vingtaine d’années, leur nombre a donc été multiplié par trois comme nous pouvons le voir sur le graphe ci-dessous.

Cette importante progression est assurément due au financement public qui existe depuis 1990. En effet, l’aide publique a été mise en place pour compenser l’interdiction des dons en provenance des entreprises, et la limitation des financements des personnes physiques, aujourd’hui plafonnés à 7 500 € (dans une limite de 20 % des revenus imposables). La création de petits partis, plus ou moins ouvertement liés à des grands partis, permet de s’arranger avec la loi. Un riche donateur peut, par exemple, donner 7 500 € au parti, puis autant à un micro-parti affilié. Multiplier les petits partis permet donc de récolter davantage de dons.

Par ailleurs, nombreux sont ceux qui souhaitent toucher une partie du magot public en créant une organisation dont ils espèrent qu’elle obtiendra 1% des suffrages exprimés dans 50 circonscriptions. C’est pourquoi, le député Charles de Courson a déposé un amendement (non retenu) au projet de loi de finances pour 2024 relevant à 2% le nombre de suffrages requis pour bénéficier de l’aide publique. Il y a quelques années, c’était René Dosière qui avait suggéré que le financement public ne soit accordé qu’aux partis ayant présenté des candidats dans 100 circonscriptions. En 1989, juste avant l’entrée en vigueur de la loi, il avait même été suggéré de monter le seuil à 5%, mais le Conseil constitutionnel avait censuré la mesure pour protéger « l’expression de nouveaux courants d’idées et d’opinions ».

Cependant, même avec un seuil à 1%, le nombre de partis bénéficiant de l’aide publique directe est limité : en 2022, une trentaine d’organisations seulement se sont partagé 66,15 millions d’euros (M€). En 2024, le montant distribué a peu varié (66,44 M€), mais une quarantaine d’organisations en ont bénéficié dont 21 partis d’outre-mer qui ont obtenu 931 000 € à se répartir. Les trois premiers bénéficiaires cette année ont reçu un peu plus de 39 M€ (59% du total) : Ensemble pour la majorité présidentielle, 19,48 M€ ; le Rassemblement national, 10,18 M€ ; Les Républicains, 9,5 M€. Viennent ensuite La France insoumise avec 7,95 M€ ; le Parti socialiste, 4,67 M€ ; Europe Écologie les Verts, 3,19 M€. Même le Parti animaliste a réussi à obtenir 411 000 € !

On remarquera que ce n’est pas le parti présidentiel Renaissance qui a perçu la subvention publique mais Ensemble pour la majorité présidentielle. Cela signifie que ce « conglomérat » reverse ensuite l’aide publique aux partis qui le compose. En 2022, la moitié des 30 partis recevant l’aide publique directe en avaient fait autant, au bénéfice de 57 partis non éligibles qui avaient ainsi reçu près de 8 M€.

Les élections législatives des 30 juin et 7 juillet 2024 ont rebattu la donne. Désormais, c’est le RN qui percevra le plus (21,4%) alors que la coalition macroniste se contentera de 20,3% de la manne et les Républicains de 12,6%. Quant aux partis composant le Nouveau Front populaire, ils se répartiront 28,9% de l’ensemble.

D’autres sources de financement

A côté de cette aide publique directe, les partis politiques bénéficient d’une aide dite indirecte qui consiste en une réduction d’impôt accordée aux donateurs et cotisants en contrepartie des sommes versées aux formations politiques.

La réduction d’impôt accordée aux donateurs et cotisants des partis politiques est, depuis 2005, égale à 66% du montant versé dans la limite de 7 500 € par personne (et 15 000 € par foyer fiscal). Il est également possible de donner, dans les mêmes conditions de réduction d’impôt, la somme de 4 600 € par élection pour financer la campagne électorale d’un ou plusieurs candidats.

Comme le souligne le rapport, « malgré le triplement du nombre de partis politiques entre 2003 et 2022, le montant total des fonds en provenance des dons et cotisations n’a pas suivi cette évolution. Le montant total le plus faible était de 58,5 M€ en 2018 et le plus élevé de 98,3 M€ en 2013 ». En 2022, il était d’un peu moins de 80 M€. Et dans ces fonds figurent les cotisations des élus, part non négligeable du financement des partis politiques (25% en 2022).

Malgré tout, ces cotisations d’élus sont en baisse. Elles étaient d’une vingtaine de millions d’euros en 2022 alors qu’elles pouvaient frôler les 40 M€ en 2009 et 2010. Comme le dit le rapport, « la baisse marquée du montant des cotisations en provenance des élus à partir de 2017 marque le recul des partis ayant pour tradition une participation financière importante de leurs élus », comme les partis communiste et socialiste.

L’argent public est prépondérant dans le financement des principaux partis politiques

Comme le montre le schéma ci-dessous, les sources de financement des partis politiques peuvent considérablement changer d’une organisation à l’autre. Cependant, pour la plupart d’entre elles, les fonds proviennent en majorité de l’aide publique directe (Renaissance, LR, RN et LFI). Seul le parti d’Éric Zemmour ne recevait pas de fonds publics en 2022 car il n’y était pas éligible. Il l’est devenu après les législatives de 2022.

On remarquera que LFI ne reçoit aucune cotisation d’adhérents et très peu de dons de personnes physiques, et que le parti Renaissance d’Emmanuel Macron ne fait guère mieux. Ainsi les deux forces politiques les plus récentes ont, certes, des électeurs, mais n’ont que très peu d’adhérents et de sympathisants. Les élus contribuent, par ailleurs, que très modestement au budget du parti (458 000 € pour Renaissance et 74 000 € pour LFI). En fait, ils sont totalement dépendants des fonds publics. C’est aussi en grande partie le cas de LR et du RN.

Cet assujettissement au financement public est, somme toute, choquant. Certes, nous pouvons comprendre que la démocratie ait un coût et que le budget de l’État puisse prendre en charge certaines dépenses électorales. Mais ne serait-il pas plus sain que les partis politiques – comme les syndicats – tirent l’essentiel de leurs ressources des cotisations des adhérents et des dons des sympathisants ?

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