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En finir avec les 35 heures et le mythe du partage du temps de travail

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Voilà des années que la France disserte sur la pertinence de réduire le temps de travail pour lutter contre le chômage. Deux siècles plus tôt, le polémiste Frédéric Bastiat moquait déjà l’idée de limiter le travail des uns pour augmenter l’employabilité des autres.

Il suggérait ironiquement d’interdire aux ouvriers français d’utiliser leur main gauche pour les forcer à ne travailler qu’avec la main droite. Ainsi rendus deux fois moins productifs, ils créeraient deux fois plus d’emplois. Pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt ?

Cette logique sous-tendue par les partisans du « partage du temps de travail » est hélas très répandue dans les médias, comme en témoigne l’intervention de Guillaume Duval, éditorialiste pour Alternatives économiques, sur LCI.

Ce dernier proclame que le problème de la France tient à ce que les Français seraient trop productifs…Nous produirions trop de richesses en trop peu de temps, réduisant par ce mécanisme les opportunités économiques de nos concitoyens…Une autre variante de la décroissance ?

Quantité d’emplois : le mythe de la masse fixe à répartir

Le partage du travail se fonde sur l’idée que la quantité d’emplois dans une société serait fixe. Or la quantité d’emplois est plutôt à l’image de nos besoins insatiables. Elle est donc illimitée.

Si cette vision restrictive de l’emploi était correcte, le chômage augmenterait automatiquement au rythme de la croissance démographique, de l’arrivée des femmes dans la population active, ou de l’automatisation. Or ainsi que l’attestent les données exposées ci-dessous, ces corrélations n’existent nulle part, indépendamment du référentiel pris.

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TABLEAU 1 : Intensité robotique et chômage dans certains pays sélectionnés

TABLEAU 1 : Intensité robotique et chômage dans certains pays sélectionnés

Ainsi que le rappelle l’économiste français Jean Tirole : « Les économistes condamnent quasi unanimement le sophisme de l’emploi en quantité fixe, un concept selon lequel le nombre total d’emplois dans une économie est fixe et donc doit être partagé équitablement. »

Si le travail n’est pas une masse fixe, alors les 35 heures ne favorisent pas l’employabilité des travailleurs. Les déverrouiller complètement ne nuira pas non plus à l’économie française. Limiter arbitrairement le temps de travail des uns et des autres n’a en définitive que deux conséquences : empêcher les travailleurs désireux de produire plus pour élever leur train de vie de le faire, et encourager une mauvaise allocation de la main-d’œuvre en forçant certains employeurs à embaucher une main-d’œuvre redondante pour une même tâche, au détriment des besoins de main-d’œuvre dans une autre industrie.

Les véritables causes du chômage français

Dans un rapport publié pour l’IREF l’année dernière, nous avions déjà observé que la France avait l’un des marchés du travail les plus rigides de l’OCDE. Cette rigidité se traduit par un chômage qui touche particulièrement les travailleurs les moins qualifiés du pays (FIGURE 3). Pour eux, c’est avant tout le salaire minimum légal qu’il faut incriminer puisque ce dernier a pour fonction d’exclure les moins productifs du marché de l’emploi. Le salaire minimum légal français est d’autant plus excluant que son ratio avec le salaire médian est l’un des plus élevés de l’OCDE (FIGURE 4).

FIGURE 3 : taux de chômage en fonction des qualifications

FIGURE 3 : taux de chômage en fonction des qualifications

FIGURE 4 : ratio salaire minimum par rapport au salaire médian en 2016

FIGURE 4 : ratio salaire minimum par rapport au salaire médian en 2016

Travailler moins pour gagner plus, une aspiration légitime

Au-delà des erreurs communes sur le rôle des 35 heures ou les causes du chômage français, l’idéal de réduction du temps de travail est légitime. En effet, la formule « travailler moins pour gagner plus » s’applique parfaitement au destin des sociétés industrielles, ainsi que l’attestent le tableau 2 et la figure 5 ci-dessous. Au cours de ces dernières décennies, nous n’avons cessé de travailler moins individuellement tout en produisant plus de richesses.

TABLEAU 2 : heures travaillées annuellement dans certains pays sélectionnés (moyenne)

TABLEAU 2 : heures travaillées annuellement dans certains pays sélectionnés (moyenne)

FIGURE 5 : évolution du PIB par habitant dans certains pays sélectionnés

FIGURE 5 : évolution du PIB par habitant dans certains pays sélectionnés

Ces évolutions ont été permises par la croissance des gains de productivité. Or cette même productivité est générée par l’accumulation d’épargne et de capital productif, par une division du travail et une spécialisation des industries toujours plus optimales (liberté du commerce et de l’industrie) et par le progrès technique. Voilà les recettes à mettre en œuvre pour remettre la France en marche.

1-2.jpg2-2.jpgTABLEAU 1 : Intensité robotique et chômage dans certains pays sélectionnés
TABLEAU 1 : Intensité robotique et chômage dans certains pays sélectionnés
FIGURE 3 : taux de chômage en fonction des qualifications
FIGURE 3 : taux de chômage en fonction des qualifications
FIGURE 4 : ratio salaire minimum par rapport au salaire médian en 2016
FIGURE 4 : ratio salaire minimum par rapport au salaire médian en 2016
TABLEAU 2 : heures travaillées annuellement dans certains pays sélectionnés (moyenne)
TABLEAU 2 : heures travaillées annuellement dans certains pays sélectionnés (moyenne)
FIGURE 5 : évolution du PIB par habitant dans certains pays sélectionnés
FIGURE 5 : évolution du PIB par habitant dans certains pays sélectionnés

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4 commentaires

zelectron 30 avril 2019 - 12:11

Liberté de travail
Ceux qui peuvent, veulent, aiment ou sont obligés de travailler peuvent travailler autant d'heures raisonnables que se peut jusqu'50 heures pour les plus costauds
Ceux qui ne veulent pas travailler en payeront le prix !

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PhB 30 avril 2019 - 11:05

Quand on peut allier son travail à une passion (comme dans mon cas: ingénieur électronicien, pendant plus de 40 ans), le temps consacré ne compte plus. Le souci: ne pas se laisser déborder ni "bouffer" par les profiteurs de toutes espèces (dirigeants mais aussi collègues) qui savent vite vous repérer et en tirer les avantages. Certaines tâches sont pénibles voir harassantes dans beaucoup de métiers dont ceux de la santé, de l'assistance à la personne, dans le bâtiment aussi, chez les enseignants dans certaines zones avec la démission de parents: d'ailleurs, on devrait dire l'Instruction Publique comme à l'époque, c'est aux parents de faire l'Education.
Je gagne très bien ma vie et estime en avoir assez mais c'est scandaleux de voir, les rémunérations de certains(ne). Faudrait faire comme en Norvège où tout ce qui dépasse un certain plafond (fort raisonnable) est directement reversé aux impôts. Ou, comme les Danois, qui sont le plus imposés et fiers de payer des impôts parce qu'ils constatent qu'ils sont bien utilisés. Le problème en France, on engraisse les riches du haut et on assiste trop ceux du bas avec la montée au créneau des associations dès que quelqu'un veut mettre en place une petite contribution à la vie de la collectivité en contrepartie des allocations de tout poil. Tout individu, même handicapé, peut être utile à la société et c'est aux politiques de redonner de la dignité à tout citoyen en organisant la société pour que chacun y trouve sa place.
PhB qui dans deux mois va faire du bénévolat en tant que retraité.

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Paul 11 mai 2019 - 7:24

+ de Productivité = + de vente
Je suis allé à la foire de Paris. J'ai acheté chinois américain et allemand car les produits dit français sont trop onéreux ou inexistant. A qualité égale ou par non concurrent le mieux disant était étranger. Un prix de vente moins cher attire le client qui n'a pas de ressources illimitées. Pour vendre à qualité égale moins cher on ne peut pas faire baisser les matière première car sujet au cours mondiale. Il ne reste que la main d'œuvre: baisse des salaires ou augmentation de la productivité. Comme on importe des migrants, c'est la baisse des salaires d'autant plus qu'il faut compenser l'augmentation des charges étatiques.
Réduire le temps de travail à salaire horaire constant c'est appauvrir tout le monde. Dans le cas du salaire annuel conservé c'est augmenter le prix et diminuer les ventes.
Raisonner encore en économie fermée ne marche pas.

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Laurent46 3 septembre 2019 - 9:10

Partage ?
Il ne se passe pas un discours, un commentaire ou écrit médiatique, aucun débat de soit disant experts et d'ailleurs aucune action sans que le mot "PARTAGE" y soit répété X fois. C'est peut-être là le fond du problème.

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