Institut de Recherches Economiques et Fiscales

Faire un don

Nos ressources proviennent uniquement des dons privés !

anglais
Accueil » La majoration de la CSG expliquée aux retraités :

La majoration de la CSG expliquée aux retraités :

par
211 vues

Tristement, les uns après les autres, beaucoup de retraités commencent en recevant leurs pensions à constater les dégâts et ils s’aperçoivent que le trou creusé par la majoration non compensée de la CSG annoncée à 1,70% entraîne en réalité une baisse nettement supérieure du montant net de leur pension. Rappelons d’ailleurs à toutes fins utiles que ce 1,70 point d’augmentation correspond en réalité pour la plupart des retraités à une augmentation de plus de 25% du poids de la CSG, puisque (6,60 +1,70= 8,30 et 8,30/ 6,60 = 1,2576). Nous pensons donc rendre service à nos lecteurs en cernant la portée précise de la réforme, d’abord en recensant ceux qui y échappent (I), puis en calculant l’incidence exacte de la majoration sur le net à payer (II) et enfin en recherchant à quelle hauteur elle peut être partiellement compensée par la baisse résultante d’impôt sur le revenu, puisque la majoration est intégralement déductible de la base d’imposition (III). Pour des raisons de simplicité, tous les calculs seront conduits à pension brute constante et hors de toute revalorisation.

I – LES RETRAITÉS EXONÉRÉS

Des chiffres ont circulé à plusieurs reprises comme quoi serait exonéré tout retraité, dont le total personnel des pensions mensuelles n’excéderait pas € 1 200 ou 1 250. Or selon la vieille inclination de notre administration fiscale, les choses sont loin d’être aussi simples. Non, ce qui compte, c’est le revenu fiscal de référence et là si nous ne leur disons pas tout de suite que ce revenu est celui qui figure sur la troisième page leur dernier avis d’imposition d’impôt sur le revenu reçu au début de l’été 2017, nous perdons immédiatement les deux tiers de nos lecteurs. Mais qu’est donc précisément ce « revenu de référence »? Nous ne résistons pas au plaisir de vous livrer telle quelle le « brouet administratif » que nous sert le très officiel site « Service public.fr », jugez-plutôt:

Le revenu fiscal de référence est calculé par l’administration à partir du montant net de vos revenus et plus-values retenus pour le calcul de l’impôt sur le revenu de l’année précédente. Ce montant est ensuite augmenté, notamment :
de certains revenus exonérés d’impôt (exemple : rémunération des salariés détachés à l’étranger) ou soumis à un prélèvement libératoire (exemple : revenus des capitaux mobiliers) ;
de certains abattements et charges déductibles du revenu.

Nul doute qu’après cette lecture instructive, vous ayez compris que, puisque l’Administration l’a déjà calculé pour vous, ce n’est pas la peine que vous vous épuisiez dans une tentative de reconstitution probablement vouée à l’échec. Surtout que nous avons mieux à faire, puisqu’on apprend que le plafond d’exonération est calqué sur celui des retraites les plus modestes ouvrant droit au taux réduit de CSG de 3,80%. Or ce plafond annuel est de € 14 404 pour un retraité vivant seul, somme généreusement portée à € 22 096 pour un ménage de retraités sans personne à charge. On voit donc que si les € 14 404 annuels coïncident bien avec les € 1 200 mensuels évoqués plus haut, il n’en va pas du tout de même pour le plafond annuel pour un ménage, soit € 22 096 dont la réduction mensuelle s’essouffle à € 1 841, soit une moyenne de € 921 par individu. On rappellera pour situer les ordres de « mesquinerie » (plutôt que de grandeur) en cause que le seuil de pauvreté s’établit actuellement à € 1 015 par mois pour une personne isolée et à € 1 523 pour un couple sans personne à charge. Et en plus en couple, ce qui compte pour le revenu de référence, c’est le revenu du ménage tout entier et donc si les € 22 096 fatidiques sont dépassés, la majoration de CSG s’applique à l’ensemble des pensions du ménage, même si, chaque mois, l’un des conjoints perçoit individuellement une pension de misère de € 300 ou 400. Mais ne nous emballons pas, ce n’est que le premier aspect injuste d’une réforme qui en comporte beaucoup d’autres.

II – L’INCIDENCE EXACTE DE LA MAJORATION DE CSG SUR LE NET À PAYER

On rappellera d’abord en tant que de besoin que la retraite de base de la Sécurité sociale est versée à terme échu, ce qui veut dire
que la majoration de CSG s’appliquera pour la première fois au versement reçu en février 2018 au titre du mois de janvier précédent. Comme nos administrations adorent la simplicité, au contraire les retraites complémentaires sont versées d’avance et donc la majoration cette fois s’appliquera dès le versement de janvier 2018 correspondant à la pension du même mois. On dénoncera comme il se doit ce défaut de concordance des temps dont le seul but est de procurer à la Sécurité sociale un avantage abusif de trésorerie au détriment des retraités, puisque les pensions ayant identiquement par nature un caractère alimentaire devraient toutes être systématiquement versées d’avance en début de mois. Ce décalage s’inscrit dans la même ligne – en les aggravant encore – que les reports successifs et honteux des dates d’effet des actualisations des pensions de base qui aboutissent pratiquement à voler sans vergogne les retraités d’une année complète de revalorisation.

Mais revenons maintenant à notre majoration de CSG. Certes vous avez bien retenu le chiffre officiel de 1,70% et comme la majorité des retraités, vous vous attendez donc à perdre 1,70% de votre pouvoir d’achat dans la réforme. Or là, vous vous trompez et lourdement. Examinons en effet l’incidence de la réforme sur une retraite de base d’abord et ensuite sur une retraite complémentaire.

Pour une retraite de base, pour 100 de pension brute on obtient un net de:
Avant la réforme: 100,00 – (6,60 CSG + 0,50 CRDS + 0,30 CASA=solidarité autonomie) = 92,60
Après la réforme: 100,00 – ( 6,60 + 1,70 = nouvelle CSG + 0,50 CRDS+ 0,30 CASA) = 90,90.

Or ce nouveau net de 90,90 ne représente que 90,90/92,60 = 98,16% de l’ancien net, soit une perte réelle en terme de pouvoir d’achat de 100,00 – 98,16 = 1,84%
Pour une retraite complémentaire, la démarche est rigoureusement la même sauf qu’il faut le plus souvent rajouter 1% de cotisation maladie,

Avant la réforme: 100,00 – (6,60 CSG + 0,50 CRDS + 1,00 ass.maladie+ 0,30 CASA) = 91,60
Après la réforme: 100,00 – ( 6,60 + 1,70 = nouvelle CSG + 0,50 CRDS+ 1,00 ass. maladie + 0,30 CASA) = 89,90

Or ce nouveau net de 89,90 ne représente que 89,90/91,60 = 98,14% de l’ancien net, soit une perte réelle en terme de pouvoir d’achat de 100,00- 98,16 = 1,86%

On voit donc bien à partir de ce calcul que le sacrifice exigé des retraités est très nettement supérieur au taux nominal de 1,70% annoncé, puisque le taux effectif s’établit en moyenne à 1,85% de perte en pouvoir d’achat, soit une « surcote » sournoise de presque 9% (1,85/1,70 = 108,82 exactement) par rapport à l’annonce officielle. Et en prenant un minimum de recul, on s’aperçoit que, si on ajoute la contribution solidarité-autonomie de 0,30% de Hollande en 2013 à la majoration de 1,70% de CSG de Macron en 2018, les retraités auront perdu en 5 ans un peu plus que l’équivalent d’une semaine de pension par an. De quoi fêter dignement l’avènement de ces deux derniers Présidents, qui n’ont pas caché leur hostilité à l’égard de ceux qu’ils ont honteusement présentés ou laissé présenter comme des nantis, ou pire pour le dernier, dans son langage fleuri de financier, comme des « rentiers ». Mais, question: imagine-t-on dans ce pays payer les fonctionnaires 51 semaines par an? Il y a donc bien une discrimination à raison de l’âge, mais que toutes les institutions de la République (Conseil d’État, Parlement, Conseil constitutionnel, Défenseur des droits etc.) se sont liguées pour ne pas voir.

Cependant, tout n’est pas si noir: nous avons en effet gardé le meilleur pour la fin: une petite gâterie pour ceux des retraités qui acquittent l’impôt sur le revenu!

III – LE LOT DE CONSOLATION: UNE COMPENSATION FISCALE PARTIELLE

En effet, la nouvelle majoration de CSG est intégralement déductible des pensions auxquelles elle s’applique, ce qui veut dire que tous les retraités qui acquittent l’impôt sur le revenu vont bénéficier d’une réduction de cet impôt. Mais cette réduction va varier fortement puisque en suivant par ordre croissant, les taux des différentes tranches marginales d’imposition et sur une base 100 : à 14% l’économie fiscale sera de 1,70 * 0,14 = 0,24, à 30% l’économie fiscale sera de 1,70*0,30 = 0,51, à 41% l’économie fiscale sera de 0,70 et qu’enfin à 45%, l’économie fiscale sera de 1,70*0,45 = 0,77.

On s’aperçoit que la ristourne fiscale varie de 0,24 à 0,77 point et donc plus que du simple au triple et que – suprême paradoxe – ce sont donc ceux qui ont les revenus les plus élevés qui vont bénéficier au maximum de cette ristourne, en complet contre-sens avec la progressivité de l’impôt sur le revenu. Ainsi et alors que le moindre impôt proportionnel est immédiatement dénoncé comme une insupportable faveur faite aux riches, nous venons d’assister à la mise en place dans une discrétion stupéfiante du premier impôt réellement dégressif, puisque les retraités les plus fortunés ne supporteront en réalité et après compensation entre l’augmentation de CSG et la diminution d’impôt sur le revenu qu’un prélèvement net de 1,85 – 0,77 = 1,08% sur leur pouvoir d’achat, cependant que les retraités demeurant imposables en bas de l’échelle verront le leur baisser de 1,85 – 0,24 = 1,61%, soit une lourde sur-taxation des plus pauvres par rapport aux plus riches de 49% (1,61/1,08 = 1,49). Certes cette incongruité a curieusement échappé tout autant au Conseil d’État qu’au Parlement et au Conseil constitutionnel, mais ils avaient – c’est vrai – visiblement décidé cette fois de ne pas créer d’ennui au jeune Président. Ceci montre bien pourtant que cette réforme n’est pas seulement injuste et inégalitaire, mais qu’elle est incohérente et témoigne ainsi de la haute faculté d’innovation fiscale de nos élites administratives.

IV CONCLUSION: JUSQU’OÙ, JUSQU’À QUAND?

Avant de clore, juste une dernière anomalie, qui montre bien que la propagande officielle sévit sans relâche et sur tous les fronts. En effet la note d’information reçue derniers jours directement de l’Assurance Retraite renvoie abusivement le lecteur retraité à la baisse éventuelle de sa taxe d’habitation pour mesurer l’impact réel du changement de taux de la CSG. C’est évidemment de la manipulation pure et simple et on voit que la communication macronienne ne recule devant aucune mystification, puisque nos lecteurs sont suffisamment avertis pour savoir qu’il n’existe aucune relation directe entre la CSG et la taxe d’habitation, dont les publics, l’assiette, l’objet et les taux sont éminemment différents. Sur le plan des principes même, en évoquant une taxe d’habitation parfaitement étrangère à son domaine de compétence, la Sécurité sociale sort illégalement du principe de spécialité qui borne l’action aussi bien des collectivités que des personnes morales. D’autant plus que, contrairement à l’enfumage officiel, nombre de retraités assujettis à la majoration de CSG savent parfaitement qu’ils ne bénéficieront en rien de la réduction de la taxe d’habitation. On retrouve bien là et une fois de plus la propension naturelle des gens de finance et d’impôt à prendre leurs interlocuteurs (qui sont aussi le plus souvent leurs victimes) pour des débiles profonds.

En tout cas, désormais, le doute n’est plus permis :
• à partir des attaques conjointes et redoublées de Terra Nova, de MM. Piketty et Pisani-Ferry ainsi que de France-Stratégie,
• avec le concours bienveillant au surplus de la plupart des membres de la haute fonction publique (notamment le Conseil d’État, la Cour des comptes et l’Inspection des Finances), dont le récent ouvrage « Les intouchables d’État » (Vincent Jauvert – Robert Laffont éditeur – nous y reviendrons prochainement ) nous confirme que les pratiques en cours leur assurent souvent très tôt une retraite hors du besoin,
• compte tenu enfin de l’ambition présidentielle à peine dissimulée de privilégier les jeunes et les actifs en dépouillant les vieux, dépeints pour les besoins de la cause comme d’insatiables nantis et taxés en terme à peine voilés de parasitisme,

l’euthanasie financière des retraités est bien lancée: elle est maintenant « en marche » et il n’y a rigoureusement aucune raison pour qu’elle s’arrête d’elle-même. Aux retraités honteusement exclus comme des pestiférés aussi bien du Conseil d’Orientation des Retraites que du Comité de Suivi des retraites,

• de savoir s’ils entendent subir passivement cette lente strangulation, qui renforcera inévitablement l’appétit de leurs prédateurs (d’où le titre de cette conclusion),
• ou si, – au plus tard lors de la prochaine élection – ils comptent enfin s’organiser pour réagir massivement et clairement contre l’injustice qui leur est faite avec les 17 millions de bulletins de vote ( 36% du corps électoral 2017 évalué à 47 millions d’électeurs) qu’ils détiennent et dont nul n’a encore osé les priver.

Abonnez-vous à la Lettre des libertés !

Vous pouvez aussi aimer

Laissez un commentaire

10 commentaires

Durif Gerard 30 janvier 2018 - 8:34

trop d'impôts et / ou de prélèvements, tue l'impôt
Nos grands penseurs de Bercy et nos Politiques oublient ou mettent sous le tapis le fait que beaucoup de retraités aident dans leur famille et la jeunesse , et même sont souvent généreux avec les associations caritatives,jusqu'à quand?
Y compris en disponibilité
Ce qui leur est confisqué d'un côté va manquer de l'autre , tout au moins pour ceux qui en ont les moyens .

Répondre
ARMAND 30 janvier 2018 - 11:12

12 MILLIONS de retraites qui se sont fait avoir une fois de plus par un jeune pretentieux sans enfants qui croit tout connaitre de la vie et de ses difficultes.Face au front national et au Medias c'etait super bien organisé, mais aux prochaines echeances on le deboulonne de son piedestal le JUPITER.Quelle invention des MEDIAS qui continuent a l'applaudir.Pauvre FRANCE

Répondre
theano 30 janvier 2018 - 8:01

Euthanasie, oui!
Euthanasie financière des retraités, comme vous dites. Avant l'euthanasie tout court que ne manquera pas de proposer le macreux aux retraités un jour ou l'autre. La solution Soleil Vert. Pauvre France!

Répondre
10 MILLION DE RETRAITES DE RETRAITES 31 janvier 2018 - 11:07 Répondre
roullier 4 février 2018 - 3:24

Les retraités les vaches à lait
Impensable le minet , faire crever des vieux pour satisfaire les bougeoirs , le patronat et les localités,c'est à dire"les maires des communes augmente le personnel , ect avec notre monnaies ,mème ils ont trouvés une taxe supplémentaire de 40 euros par pour faire face à la pluie "inondation" c'est à dire "40 euros par personne qui habite dans la même maison.Comment peut -on imaginer faire payer des vieux qui ont fais la France"guerre,Algérie,ect: qui on bossé de 12ans à 62 ans et qui ont développé la vrais France,plumés par un jeune minet sans expérience.

Répondre
PATJAC44 17 février 2018 - 12:02

Mais il a raison ce Monsieur notre Macrotte , il porte bien sont non c' est un banquier de Merde

Répondre
Astérix 5 février 2018 - 9:19

Pauvre France !
Les Français n'élisent que des énarco technocrates parfaitement incompétents; à partir de ce constat, il n'y a rien à espérer, sauf le chômage de masse, la baisse du pouvoir d'achat, l'écrasement des entreprises et des particuliers par les taxes, impôts, prélèvements en tout genre, sans compter les réglementations, normes imbéciles de nature à décourager un peu plus chaque jour les entrepreneurs.
L'état ne cesse de nous faire ch… chaque matin avec de nouvelles herses mises en travers de notre chemin…!? ASSEZ.!
Toutes les conditions d'une déconfiture sont réunies depuis des lustres.
Mais le Français ne voit rien, ne pressent rien, est masochiste et comptant de l'être…!?
Continuons !

Répondre
vicorse 6 février 2018 - 6:34

et si les retraités s'amusaient à rouler à 40 km/h à l'entrée des villes, histoire de montrer qu'ils existent, et qu'ils peuvent paralyser la France, il suffit de s'organiser, ou alors on continue se subir

Répondre
Gérard Dosogne 9 février 2018 - 3:44

Merci pour cet article
les retraités d'aujourd'hui ont bien souvent été bien plus "actifs" que les jeunes actifs d'aujourd'hui… plutot 45 h que 35 h , 4 à 5 semaines de congé max, et ils ont payé les retraites de leurs ainés. J'espère qu'il y aura quelqu'un pour payer la retraite du jeune Macron….

Répondre
papillon 13 février 2018 - 10:23

Les français sont un peu ramolos..!
Merci pour ces renseignements,nous ne sommes pas sortis
des griffes de ce beau parleur,tous les journalistes se mettent à l'imité(toutes celles et ceux,toutes et tous etc….) des léches bottes…! et ne parlons pas de son entourage…;tous sur le meme style.

Répondre