Mélenchon veut passer à la 6e République comme on change un vieux canapé, mais sans se soucier du mode d’emploi constitutionnel.
La petite musique est soigneusement réglée depuis plusieurs semaines chez les Insoumis et les discours de ses dirigeants sont à l’unisson en matière institutionnelle : Emmanuel Macron doit être destitué ; à défaut il doit démissionner le plus vite possible, fût-ce sous la pression de la rue. Aussi Jean-Luc Mélenchon et son équipe ont-ils d’ores et déjà entamé la sélection des élus pour obtenir les 500 signatures qui permettront au leader d’être candidat à l’élection présidentielle.
On ne pourra pas faire comme si on ne savait pas
Tant Mathilde Panot que Manuel Bompard ont parlé au début du mois de décembre d’un changement de Constitution, d’une modification de la loi électorale et par conséquent d’un déblocage de la situation de crise actuelle. Mais qu’ont en tête les Insoumis ? Les déclarations du meneur de La France Insoumise et de ses proches associées aux publications officielles de La France Insoumise en ligne depuis plusieurs années permettent de le savoir sans détour.
Ce qui est frappant chez eux, c’est que tout est annoncé, même si leurs objectifs sont inavouables. On ne pourra donc pas dire qu’on ne savait pas. Ainsi en est-il des cibles électorales, les jeunes, les femmes et les musulmans des villes et des banlieues, comme cela a été signifié par Jean-Luc Mélenchon lui-même. Quant à la question institutionnelle, elle a été présentée de manière adamantine dans une brochure lors de la campagne présidentielle de 2022 et intitulée sans fard « Comment nous allons passer à la 6e République ».
Voici donc ce qu’il va se passer selon les Insoumis : une fois élu, leur chef débloquera la situation pour la simple et bonne raison qu’il ne sera pas bridé par la Constitution actuelle qui interdit au chef de l’État de dissoudre l’Assemblée nationale avant juillet 2025, donc qui en pratique interdit la tenue d’élections avant septembre prochain. Dès après son élection, Jean-Luc Mélenchon utilisera l’article 11 de la Constitution, un pouvoir personnel du chef de l’État. Non pas pour la réviser comme l’avait fait le général de Gaulle à plusieurs reprises au grand dam de l’ensemble des constitutionnalistes sérieux qui jugeaient que cet article ne pouvait concerner que des textes de valeur législative et que seul l’article 89 pouvait être utilisé pour modifier la Constitution, c’est-à-dire avec l’accord des deux chambres du Parlement. Mais pour carrément changer de Constitution.