Dans ce petit roman d’Emilienne Malfatto, longtemps journaliste-reporteur, non seulement la guerre n’est plus synonyme de gloire, mais elle est même à bannir. Les nuits du colonel ont une fonction symbolique. Ce tortionnaire est rattrapé par ses victimes, hanté par ces physionomies de poissons, déformées par la torture avant d’être noyées, devenant à leur tour ses propres bourreaux. A cause d’eux , il perd non seulement le sommeil mais toute conviction militaire et tout désir de continuer à martyriser, à dénoncer, à remplir sa mission d’informateur. L’environnement, comme le style lui-même, est contaminé par une grisaille permanente qui efface reliefs et personnalités.
Une eau sale tombe du ciel jusqu’à noyer toute lucidité et velléité. La seule lueur subsistante vient des regards des torturés dont la haine avant la mort a fini par tomber. Ainsi l’écart se creuse entre la perception des horreurs et leur cause. Le style devient indéniablement fureur poétique, révolte antimilitariste, avec pour seul envie, une vie en pantoufles et quelques galons en salaire ! Ce livre est un petit bijou littéraire dont on a le droit de douter de l’opportunité à l’heure où grand nombre de pays envahis luttent et meurent pour leur liberté.
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