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Plan Climat: l’Union européenne en marche vers un désert industriel

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Mardi 18 avril, le Parlement de l’Union européenne a adopté un “plan climat” célébré par les déclarations grandiloquentes de la présidente dudit Parlement, Roberta Metsola, et par la présidente de la commission, Ursula Von der Leyen. Même les représentants de la droite allemande au sein du PPE se sont réjouis de ce vote pour le “plus grand plan de protection du climat de tous les temps”, oubliant commodément que leur pays vient de fermer ses derniers réacteurs nucléaires.

Des taxes, et encore des taxes…

Que prévoit ce plan ? En bref :

  • l’application d’une taxe carbone à la consommation de gaz domestique des ménages, sur la base de 45 euros/tonne à partir de 2027. Pour un consommateur français, l’augmentation du prix du kWh-gaz sera d’environ 11%[1];
  • une taxe carbone aux frontières, dont le dispositif confine à l’usine à gaz, alourdira de quelques milliards la facture des importations continentales ;
  • “naturellement”, après avoir taxé, il ne faut pas oublier de subventionner : un fonds social de 86 milliards sera créé pour amortir le choc de ces nouvelles taxes sur les plus pauvres.

Industries lourdes: vers des fermetures et des délocalisations

Intéressons-nous plus particulièrement à la mesure phare de ce plan : l’obligation, pour les industries énergivores, d’abaisser d’ici à 2030 leurs émissions de 62% par rapport à celles de 2005, au lieu de 43% précédemment. Un calcul simple montre que cela revient à forcer ces industries à accélérer la baisse de leurs émissions d’une moyenne de 2,3% par an jusqu’ici, à 7,6% par an de maintenant à 2030. Or, sans baguette magique, il est impossible multiplier par plus de 3 le rythme de décarbonation de l’économie : les technologies qui pourraient réaliser cet exploit n’existent pas, et quand bien même, le rythme des investissements nécessaires pour les déployer dans un délai aussi court excèderait de loin les capacités des économies et du système financier européen.

Cependant, tel est le plan. Pour tenter d’y satisfaire il faudra, de manière forcée, réduire les quotas des crédits-carbone mis sur le marché par les autorités de l’Union, ce qui fera flamber leur prix. Nombre d’entreprises, afin de juste garder la tête hors de l’eau et maintenir la production, devront payer des sommes astronomiques. Beaucoup d’autres n’auront d’autre choix que de fermer en Europe et de se délocaliser dans des pays imposant moins de contraintes, comme la Chine, l’Inde, ou maints autres pays émergents, lesquels font régulièrement savoir qu’ils ne se soumettront pas au “néocolonialisme écologique” de l’Occident.

Le plan pour une “industrie net zéro” risque donc de se muer en plan pour une “industrie zéro”, ou en tout cas en forte contraction. Nous laissons à chacun le soin d’en imaginer les conséquences économiques et sociales.

Impact climatique : “net zéro”

“C’est pour sauver le climat !”, rétorquerez-vous.

Hélas, c’est faux. Les lecteurs réguliers de l’IREF savent déjà que l’impact climatique des politiques “anti CO2” de l’Union européenne est proche de zéro. L’image ci-dessous synthétise les résultats de l’étude que nous avons publiée en novembre dernier, qui évalue l’influence que l’UE aura sur les températures mondiales en fonction de plusieurs scénarios technologiques, en se basant strictement sur les données fournies par le dernier rapport (AR6) du GIEC.

Entre les scénarios “jaune” ou “rouge” (évolution technologique normale des sociétés à rythme de progrès technologique plus ou moins constant) et le scénario “vert” (mise en œuvre des objectifs de l’Union, ce qui n’est possible que via des moyens coercitifs), la différence d’émissions de maintenant à l’an 2100 n’est que de ≈80 Gt de CO2, correspondant à une différence de moyenne des températures de ≈0,04°C.

Détruire en moins de 10 ans une part non négligeable de notre industrie pour réduire de 4 centièmes de degré Celsius la moyenne des températures mondiales en 2100, est-ce vraiment un bon deal ?

Pendant ce temps, en Asie, en Allemagne…

 Alors que la folie de l’UE est supposée faire “économiser” 80 Gt d’émissions entre maintenant et l’an 2100, le continent asiatique émettra à lui seul environ 250 Gt de CO2 durant la seule décennie actuelle[2]. La Chine et l’Inde, pour ne citer qu’elles, mettent en service tellement de nouvelles centrales à charbon, pour répondre à leur demande d’électricité en hausse exponentielle, qu’il est probable que ces émissions continuent d’augmenter durant la décennie suivante.

Ce sont donc au minimum 500 Gt de CO2 qui seront rejetées par l’Asie dans l’atmosphère en seulement deux décennies (soit environ 0,23°C d’augmentation des températures), donc 6 fois plus que la diminution que l’on pourrait en théorie attendre du suicide de l’industrie européenne d’ici la fin du siècle. Et logiquement, si nombre d’industries nous quittent pour aller prospérer dans des contrées moins obsédées par quelques dixièmes de degrés en plus ou en moins, les émissions asiatiques s’en trouveront probablement accélérées.

Point n’est besoin de regarder l’Asie pour s’indigner des incohérences européennes. L’Allemagne a fermé 17 réacteurs nucléaires parfaitement fonctionnels depuis 2011, renforçant le maintien et l’extension de son parc de centrales au gaz et au charbon. Ces réacteurs lui auraient pourtant permis de réduire ses émissions de plus de 120 millions de tonnes par an. On veut donc imposer aux ménages et aux entreprises européennes de nouvelles contraintes alors que le gouvernement du pays le plus peuplé et le plus riche de l’Union s’exonère de ces obligations en termes de production électrique. Comment, dans ces conditions, s’étonner du fort ressentiment des populations envers leurs élites dirigeantes ?

Les Européens doivent se réveiller

Les calculs qui précèdent n’ont rien de complexe, et ne devraient pas être ignorés des dirigeants et parlementaires européens. Mais la déraison semble prévaloir dans tous les lieux de pouvoir du vieux continent. Si les Européens ne veulent pas être entraînés vers un suicide économique et démocratique sans précédent, et ce en pure perte du point de vue du climat, ils doivent de toute urgence se réveiller et forcer leurs politiciens à changer radicalement leur façon d’aborder les risques climatiques, risques qui seront d’autant mieux gérés que nos économies resteront prospères.


[1] Selon Eurostat, 1 kWh de production de chaleur gaz dégage 216 g de CO2 ; donc 45€ /t ajoutent près d’un centime au kWh gaz, lequel est actuellement facturé à peu près 9 cts/kWh en période “non tendue” par des événements conjoncturels extérieurs.

[2] Source: https://frirefeurope.b-cdn.net/wp-content/uploads/sites/2/2022/11/IREF-Politiques-Climatiques-de-lUE-Un-examen-critique-Novembre-2022.pdf , chapitre II.4

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14 commentaires

maxens 26 avril 2023 - 5:50

il faut interdire d’entrée en europe les productions qui pourraient être produites en europe…quand les étales seront vides, les citoyens prendront conscience que vouloir tout et son contraire est impossible

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Goufio 26 avril 2023 - 6:50

Excellent article. Mais comme d’habitude que faire ? Tous les politiciens sont pour la lutte contre le CO2 parce que soit disant des sondages de 1.018 personnes représentant la société française ont peurs de la « poêle à frire » C’est un acquis qu’il n’est même plus permis de questionner

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JR 26 avril 2023 - 8:25

Bonjour, je pense qu’il est temps de passer à l’action. Merci

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Jean Aymar de Sékonla 26 avril 2023 - 9:05

Toujours les imbéciles en action !
Le résultat sera pire, car ce qui ne sera pas produit en Europe le sera ailleurs, dans de plus mauvaises conditions, et l’Europe l’importera ! (En perdant encore un peu plus d’emplois et d’indépendance)
Jean-Aymar

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CLEMENT 26 avril 2023 - 10:48

CE N’EST PAS LE RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE QUI NOUS TUERA, C’EST LE REFROIDISSEMENT ECONOMIQUE !

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Astérix 26 avril 2023 - 4:16

Bravo CLEMENT, très juste ! J’ajouterai le réchauffement de la connerie !

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Barelli 26 avril 2023 - 5:42

Cela remplace l’écotaxe de 2014/2016
Nous allons soit mourir à petit feu soit la révolution EN MARCHE !!
Réveillons nous !!

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JR 26 avril 2023 - 8:22

Bonjour, cela fait plus 7 ans que j’ai pris cette affaire d’escroquerie carbo-climatique au sérieux. Au début, tout le monde me disait  » mais non, mais non cela ne risque rien », et puis l’étau se referme comme nous étions nombreux à le pressentir. Il s’agit indiscutablement d’un génocide organisé méticuleusement, à l’instar des idéologies mortifères comme le communisme et le nazisme, la néo religion carbo-climatique fera autant de dégât, dont certains irréversibles. https://www.climato-realistes.fr/le-carbo-reductionnisme-est-un-mensonge-qui-doit-cesser/ . Il faut les stopper à tout prix et vite, « quoi qu’il en coûte ! La lutte contre ce dogme doit devenir une priorité absolue des citoyens contribuables libres. Merci

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Dudufe 27 avril 2023 - 9:39

On se demande même si les pays gros émetteurs de CO2 n’ont pas infiltré l’UE afin d’être pratiquement les seuls à pouvoir émettre autant qu’ils veulent de CO2 et ainsi couler l’industrie européenne.

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Braquehais 27 avril 2023 - 5:59

De puis quand avons-nous une démonstration scientifique incontestable sur le rapport entre le réchauffement climatique et l’augmentation du CO2 anthropique ou pas ?

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Dumortier 27 avril 2023 - 7:16

Jamais l’UE n’a été aussi mal dirigée ! La Commission actuelle trône au sommet de l’incompétence, soutenue – hélas ! – par un parlement tout aussi incapable de sortir des ornières tracées par le GIEC, et dont les décisions souvent stupides ne sont dictées que par des impératifs électoraux, démagogiques, émotionnels aussi, sans aucune base scientifique… De surcroît, je fais l’impasse sur tous les pots-de-vin et royalties qui pervertissent de telles institutions !
Bref, les « décideurs » eurocrates, comme tous les politiciens en général, ne connaissent rien, absolument rien, en matière d’energie, de climat, et d’écologie !

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Duhamel 30 avril 2023 - 8:41

On a critiqué Trump , mais lui au moins il est patriote. Il a dit aux constructeurs automobiles americains que s’ils se délocalisaient en Chine , ils ne vendraient plus de bagnoles aux USA .Chez nous, ce sont les predidents qui emmenent des industtieks en Chine pour delocaliser . A qui ca profite a votre avis ?

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AlainD 5 mai 2023 - 8:45

Tous ces gens qui prétendent gouverner l’Europe tout comme les chefs d’Etats doivent avoir des oeillères ou alors ce sont des imbéciles, incultes et prétentieux. A force de laisser les pseudo-verts nous gangréner nous allons mourir à petit feu et le CO2 honni par ces abrutis n’y sera pas pour grand chose.

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Jean-Pierre Bardinet 28 mai 2023 - 7:45

Industrie verte = industrie détruite. Prenons le cas d’une verrerie. Pour une production donnée, il faut une énergie E pour chauffer les fours, atteindre et maintenir la température adéquate et le plus efficace et le plus souple est d’utiliser du gaz. Si le gouvernement impose à cette verrerie de réduire ses émissions de CO2, la conséquence est simple : réduction de la production, chute du CA et des bénéfices, voire fermeture de l’usine et personnel au chômage. Au niveau européen, c’est la même chose : réduction de la production industrielle, fermeture d’usines, dizaines de millions de chômeurs, baisse drastique du pouvoir d’achat des ménages, impactés par la dérive du prix de l’énergie et du kWh, les taxes carbone pour les activités de la vie courante (chauffage, déplacements, …) et la réduction drastique des libertés individuelles. Ce vert destructeur me fait voir rouge …

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