Ces derniers jours avec l’investiture de Joe Biden et Kamala Harris, le président et la vice-présidente ont sans doute été les deux personnages politiques américains les plus médiatisés. Cependant, pour comprendre et analyser les mesures qui seront mises en place lors des quatre prochaines années, il faudra s’intéresser à Nancy Pelosi, politicienne peut-être moins connue en France mais qui a acquis un grand pouvoir au sein du Parti démocrate.
Nancy Pelosi, quatre-vingts ans, est la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis depuis 2019. Elle a, début janvier, été réélue pour un second mandat (jusqu’en 2023). Durant les quatre années du mandant de Donald Trump elle a profité de l’opposition en bloc au président républicain pour consolider son pouvoir. Plus récemment, c’est elle qui a insisté pour lancer la deuxième procédure d’impeachment malgré les appels à l’unité de Joe Biden. Elle a parié que cette action pourrait renforcer son pouvoir, tout en sachant pertinemment que cela diviserait encore plus le pays dans les mois à venir.
Elle a un rôle crucial dans une assemblée où la majorité démocrate ne tient qu’à une voix. Madame Pelosi sait se servir de ce pouvoir pour asseoir sa domination sur le Parlement, parfois à la limite de la légalité.
Les électeurs américains ayant donné aux Démocrates leur plus faible majorité à la Chambre des représentants depuis 1940, elle a notamment tenté de modifier certaines règles afin de se garantir une plus grande marge de manœuvre. Juste après avoir été reconduite début janvier, elle a proposé une loi demandant aux états d’inscrire automatiquement les citoyens présents sur différentes bases de données fédérales ou des États (dans le cadre de la délivrance de permis de conduire ou d’aides sociales par exemple) sur les listes électorales. Cela aurait eu pour conséquence de réduire les contrôles contre la fraude électorale pour un électorat qui penche majoritairement du côté démocrate. Cette même loi demande la mise en place de commissions en charge de dessiner les cartes électorales, ces commissions s’étant montrées par le passé en majorité favorable aux Démocrates. Nancy Pelosi voulait aussi faire de la capitale des États-Unis, Washington D.C, un État à part entière. Ce qui rapporterait quasi automatiquement deux sièges de plus à son parti, l’électorat de la capitale étant très majoritairement marqué à gauche. Enfin, elle a essayé d’obliger les partis politiques à déclarer publiquement le nom des donateurs au-delà de certaines sommes, ce qui les exposerait à des représailles. Cela bien sûr, pour affaiblir les soutiens financiers des Républicains.
Le Sénat à majorité républicaine a bloqué cette loi, mais elle devrait revenir à l’ordre du jour sous Joe Biden. Nancy Pelosi est parvenue à supprimer un mécanisme législatif qui autoriserait les partis minoritaires à proposer des amendements. De plus, elle a créé un régime d’exception pour les lois concernant le Covid-19 et le changement climatique. Il permet de s’affranchir des règles d’équilibre budgétaire que doivent normalement respecter toutes les lois et qui veulent qu’un déficit provoqué par la mise en vigueur d’une loi soit contrebalancé par des recettes prévues ailleurs dans cette même loi.
Autre exploit, sémantique celui-ci : Nancy Pelosi a réussi à faire bannir, à la Chambre des représentants, l’emploi de mots « genrés » comme « père » ou « mère » pour les remplacer par des mots neutres…
Sources
https://www.wsj.com/articles/pelosis-top-priority-consolidating-power-11610667245
https://www.wsj.com/articles/pelosis-revealing-house-rules-11609888634